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En se lançant dans la culture et la transformation de la caméline, une plante inconnue du grand public, la Ferme Oliméga savait qu’elle prenait un pari risqué. Six ans après sa création, l’entreprise peut dire mission accomplie : non seulement elle distribue ses produits un peu partout dans la province, mais sa marque est en pleine expansion à l’international.
« On a travaillé sans compter les heures dans ce projet, et ce n’est que tout récemment que la roue commence à tourner toute seule. Il faut dire qu’on a toujours cru dans la qualité de notre produit », confie Chantal Van Winden, présidente et directrice-générale de la Ferme Oliméga à Saint-Édouard en Montérégie.
Ce produit, c’est la caméline, une plante crucifère cultivée depuis 3000 ans, mais qui est longtemps demeurée dans l’ombre jusqu’à ce qu’on découvre les propriétés nutritionnelles et culinaires de son huile et de ses graines.
En quelques années seulement, les produits de la Ferme Oliméga, commercialisés sous la marque Signé Caméline, se sont taillés une place dans les supermarchés de la province, en plus d’être adoptés par plusieurs chefs réputés. Mais le succès de l’entreprise va au-delà de nos frontières. La caméline cultivée au Québec se retrouve maintenant au Japon, au Vietnam, en Chine et en France. Un important contrat sur le point de se conclure permettrait à l’entreprise de décupler sa présence au sud de la frontière. « Pour satisfaire à la demande, nous avons augmenté cette année de 30 % la superficie cultivée pour atteindre 270 hectares et nous prévoyons en faire autant l’année prochaine », signale la femme d’affaire.
C’est justement pour trouver de nouveaux producteurs partenaires que Chantal Van Winden et Raymond Durivage, son associé en affaires comme en amour, se sont rendus dans le Témiscamingue en juillet dernier. « On a organisé une journée d’introduction à la caméline et on a visité nos partenaires actuels pour renforcer les liens », affirme la productrice.
Un long processus
La Ferme Oliméga a été créée en 2014, mais l’aventure remonte à 2006. « À l’époque, on avait assisté à la conférence d’un scientifique allemand qui traitait de la synergie des plantes. Pendant sa présentation, il avait parlé de la caméline comme d’une plante intéressante à intégrer dans ses rotations et que son huile possédait plusieurs bénéfices pour la santé, notamment en raison de sa haute teneur en oméga-3 », se remémore Chantal.
Intriguée par cette plante, la Ferme EDPA, dont Raymond est le copropriétaire, a décidé de l’inclure dans ses plans de cultures. « Tout était à faire puisqu’on était parmi les premiers, sinon les premiers à cultiver la caméline au Québec et qu’on ne savait pas comment allait se comporter la plante qui n’est pas très compétitive et ne tolère pas les herbicides », ajoute Simon Durivage Guertin, vice-président de la production agricole de la Ferme Oliméga et neveu du couple.
Leurs travaux se sont échelonnés pendant huit ans où différentes variétés et pratiques culturales ont été testées jusqu’à ce qu’ils soient confiants de pouvoir produire en quantité suffisante une huile de qualité. Encore fallait-il faire connaître leur produit aux détaillants et aux consommateurs. « Quand on s’est lancé, personne ne connaissait la caméline. On a déployé des efforts de marketing énormes. Chaque fin de semaine, on a fait des dégustations dans les épiceries et les marchés. Le défi était immense », commente Chantal.
Un an après le début de ses activités, une occasion en or s’est présentée à la Ferme Oliméga. Invité à une journée organisée par Metro et Première Moisson pour parler de son expérience de producteur de blé, Raymond a mentionné la caméline au cours de la présentation. « Dans l’assistance, se trouvait Serge Boulanger, vice-président chez Metro. Il a remis sa carte à Raymond en lui disant qu’il y aurait une place pour nos produits. Deux mois plus tard, on rentrait dans leurs épiceries, raconte Chantal. Après, il a fallu obtenir nos points de vente un à un. Ça demande beaucoup de ténacité. »
Apprivoiser une nouvelle culture
Si la culture de la caméline représente certains défis – notamment à l’étape du criblage puisque les graines sont très petites – Simon Durivage Guertin en apprécie les grandes qualités agronomiques et environnementales. « Pour un producteur qui aime pratiquer l’agriculture de façon raisonnée, c’est une plante très intéressante à cultiver. On a constaté que les populations de ver fil-de-fer avaient chuté drastiquement dans les années qui suivaient la culture de la caméline. Il semble que la paille dégage un répulsif naturel, ce qui nous permet par la suite d’utiliser des cultivars de maïs non-traités. »
Outre la recherche de nouveaux producteurs partenaires pour assurer la croissance de ses exportations, les projets ne manquent pas à la Ferme Oliméga. « Après la pandémie, on veut reprendre nos efforts pour faire connaître la caméline auprès des consommateurs et on souhaite valoriser son tourteau comme nourriture pour les poules. On voit les choses en grand », assure Chantal Van Winden.
Yvan Durivage : un modèle Le sens de l’innovation est une valeur bien ancrée dans l’équipe de la Ferme Oliméga qui avait une source d’inspiration en Yvan Durivage [père de Raymond], récemment décédé. « Certaines familles savent très bien s’en tirer en faisant la même chose, mais d’autres réussissent à faire un peu mieux en cherchant constamment à se dépasser, c’était l’exemple que nous a inculqué mon grand-père », confie Simon. |
Cet article a été publié dans l’édition GRAINS de septembre 2020.