Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
Disons-le tout de suite, personne au Québec n’a pour métier principal la chasse à la marmotte, de son nom populaire siffleux. Mais pourquoi s’en prendre à une si belle boule de poils? Inoffensive, elle a tout pour rivaliser avec les lièvres et les écureuils dans la section des animaux en chocolat à Pâques.
Ingénieur à la retraite, Paul Bilodeau est un chasseur passionné. Pour demeurer au sommet de son art, l’homme de 69 ans pratique régulièrement la chasse au siffleux. Au moment de l’entrevue, au début d’août, il affichait 2 439 marmottes à son tableau. La veille, il en avait récolté une de plus de 10 lb, précise-t-il, ajoutant que son trophée pesait plus de 13 lb.
« Ma meilleure journée, j’en ai eu 102. J’avais pogné un bon spot », lance le pince-sans-rire, qui se garde bien de dévoiler l’emplacement exact de cette chasse exceptionnelle. S’il pouvait facilement toucher 25 marmottes dans une journée à ses débuts, il en va tout autrement aujourd’hui. La marmotte, explique-t-il, a perdu une bonne partie de son habitat avec la disparition des clôtures de perches et le drainage des terres.
« Aujourd’hui, il faudrait me donner un mois pour en obtenir 25 », dit-il, révélant que les agriculteurs requièrent souvent ses services. Les vaches, indique-t-il, peuvent parfois se blesser aux pattes en mettant le pied par mégarde dans un terrier. Quant au petit monticule de terre rejetée par la marmotte, il représente un obstacle coûteux pour la machinerie.
« Les faucheuses qui tournent à 800 ou 900 tours, précise-t-il, quand leurs joints sautent, ça peut coûter entre 1 000 et 2 000 $. »
Paul Bilodeau ne se limite pas aux marmottes. Au cours d’une même sortie, il chasse également la corneille et le pigeon. Là aussi, il vole au secours des agriculteurs. En effet, explique-t-il, les corneilles confondent la ficelle des balles enrobées avec des vers et percent le plastique, ce qui permet à des enzymes de se développer. Quant aux pigeons, leurs fientes contaminent le contenu des silos avec la salmonellose.
« J’ai déjà vu une ferme bovine où il y avait plus de 2 000 pigeons, relate-t-il. J’ai descendu ça à 25 et l’éleveur a pu reprendre le contrôle par la suite. »
Notre chasseur signale que les pertes de cet éleveur ont atteint 8 % en raison des fientes, et rappelle que le seul de rentabilité d’un élevage bovin ne peut guère dépasser 1 %. Depuis sa retraite, Paul Bilodeau compte pas moins de 19 000 pigeons à son actif.
Quant aux corneilles, il peut en récolter jusqu’à 600 certaines années. Fort intelligent, cet oiseau est pourtant reconnu comme une cible difficile à toucher. Paul Bilodeau y trouve une façon d’aiguiser ses réflexes et sa précision de tir.
« Quand arrive la chasse au chevreuil l’automne, c’est l’avantage au chasseur », s’amuse-t-il.
Concours
François Ratté fait partie de Chassomaniak, dont les aventures de chasse et pêche sont diffusées à TVA Sports. L’an dernier, cette équipe a produit une émission relatant un tournoi de chasse au siffleux qu’elle organise chaque année à Beauceville.
« C’est comme de la vermine, et les agriculteurs sont bien contents de nous recevoir parce qu’ils brisent leur machinerie dans les trous de siffleux », confirme-t-il pour expliquer l’intérêt de cette chasse.
« On réunit de 100 à 150 chasseurs, qui ramènent de 600 à 800 marmottes », note François Ratté. Le gagnant du tournoi est déterminé au hasard et les participants courent la chance de remporter l’un des prix de présence. Organisé chaque printemps, le tournoi de Beauceville a d’ailleurs fait des petits ailleurs au Québec.
« C’est d’abord une journée amicale de tir et de plaisir avec de longues marches dans les champs, explique François Ratté. C’est une chasse plaisante ouverte toute l’année et sans limite de prises. C’est aussi l’occasion de pratiquer ses tirs à longue portée. »
Lors du dernier tournoi, la viande de marmotte a d’ailleurs été cuite au barbecue et offerte en dégustation aux chasseurs. La viande est assez grasse, semble-t-il, et présente un goût qui ressemble à celui du poulet. Plusieurs recettes sont également disponibles dans Internet. Paul Bilodeau dira pour sa part que la viande de marmotte se cuisine comme le porc. L’animal, recommande-t-il, doit cependant être abattu entre le 15 mai et le 15 juin, sinon la viande devient trop grasse.
D’autres chasseurs vont conserver les carcasses de marmottes pour fabriquer des appâts pour la chasse printanière à l’ours. Une fois faisandée, la viande de marmotte dégage une odeur propre à chatouiller les fines narines des ours. De son côté, Paul Bilodeau abandonne les carcasses aux coyotes ou aux trappeurs, qu’il approvisionne aussi en corneilles et pigeons. Lorsque la peau des marmottes est belle, il la donne aux fabricants de mouches pour la pêche.
Coffre à outils
François Ratté signale que la chasse à la marmotte gagne aussi en popularité au Québec en raison de la sélection d’armes et de munitions. En règle générale, les petits calibres, de style 22, sont employés pour la chasse à la marmotte. Paul Bilodeau utilise pour sa part une carabine 223. Ces armes sont également utilisées pour traquer le coyote. Avantage non négligeable, les munitions pour ce type d’armes sont vendues à faible prix.
« Les magasins d’armes se sont spécialisés pour cette chasse-là, témoigne François Ratté. Ils montent ces carabines avec une bonne lunette de tir pour en faire des armes à longue portée. »