Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
Confrontée à un enjeu de la qualité de son approvisionnement, l’industrie québécoise du veau lourd est en quête de solutions. Une partie de la réponse se trouverait dans l’amélioration des normes de biosécurité et du bien-être dans le transport des veaux laitiers, croient les Producteurs de bovins du Québec, qui ont lancé un projet de recherche sur la question.
Dans les entreprises de veaux lourds de la province, on estime qu’environ une bête sur dix meurt avant d’atteindre l’âge d’aller à l’abattoir. « Cette proportion est nettement supérieure à ce qu’on retrouve en Europe, qui possède une importante production de veaux lourds, mais qui a adopté différentes normes en matière de transport, signale l’un des chercheurs menant le projet, le Dr Sébastien Buczinski, professeur titulaire à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal. Par exemple, les veaux arrivent généralement entre 2 et 3 semaines d’âge en unité de veaux lourds. » Au Canada, il n’existait aucune norme semblable jusqu’en février 2020. Depuis cette date, il est interdit de déplacer des veaux lourds âgés de moins de 9 jours vers les lieux de regroupement. « Plus les veaux sont jeunes, plus ils sont faciles à stresser, donc plus fragiles aux maladies », souligne Sébastien Buczinski. Le transfert de l’immunité passive grâce à la prise de colostrum qui donne les anticorps et de l’énergie aux veaux est également important pour leur préparation à l’entrée en atelier de veaux lourds. Or, selon une étude conduite par la Faculté de médecine vétérinaire et financée par le MAPAQ, sur 80 lots de veaux lourds, seulement 38 % des veaux échantillonnés à l’arrivée en lot d’engraissement avaient atteint le seuil d’immunité passive généralement recommandé. « Comme les veaux dans une unité proviennent de plusieurs fermes, ils sont davantage vulnérables », ajoute-t-il.
Cette problématique entraîne des coûts de production supplémentaires pour les entreprises et nuit à leur rentabilité. « Il y a les veaux qui meurent sans avoir été traités, mais il ne faut pas oublier ceux qui sont tombés malades et qui ont survécu grâce aux médicaments, rappelle le chercheur. De meilleures pratiques auront un impact positif sur la rentabilité de la ferme, mais aussi sur le bien-être du troupeau. »
De la ferme laitière à l’abattoir
Le projet d’amélioration amorcé en 2019 a pour mandat d’étudier l’enjeu de biosécurité et du bien-être dans le transport des veaux dans chacune des étapes de la chaîne, en vue de proposer des correctifs basés sur les observations recueillies.
Pour mener ce projet à terme, les Producteurs de bovins du Québec (PBQ) ont fait appel à la Faculté de médecine vétérinaire (FMV) de l’Université de Montréal, qui est responsable de la collecte et l’analyse de données sur l’état clinique des veaux et leur environnement immédiat. Le Centre de développement du porc du Québec (CDPQ) sera également mis en contribution en adaptant aux jeunes ruminants les outils de biosécurité qu’il a développés dans son secteur.
Le transport des veaux sous la loupe
Concrètement, l’équipe du projet s’est penchée sur les pratiques à la ferme laitière concernant la préparation des veaux laitiers en vue de leur vente en menant des entrevues auprès de plus de 400 producteurs. Des activités de collecte de données dans les encans de Saint-Hyacinthe et de Saint-Isidore ont également été réalisées pour connaître les facteurs de risque associés à la non-vente ou à des anomalies de santé en fonction de la régie du troupeau à la ferme. « On a notamment évalué les pratiques de régie et d’alimentation dans les fermes commercialisant des veaux aux encans. Notre objectif est de déterminer quelles sont les pratiques gagnantes qui permettraient au producteur laitier d’obtenir un meilleur prix », décrit le Dr Buczinski.
Les autres volets du projet s’intéresseront aux circuits fermes laitière-encans, encans-fermes de veaux, et fermes de veaux-abattoirs ainsi qu’au premier mois d’élevage des veaux. Pour réussir à recueillir des données pendant le transport des veaux des fermes laitières à l’encan, Sébastien Buczinski, sa collègue spécialisée en bien-être animal Marianne Villettaz-Robichaud et l’équipe de la Faculté de médecine vétérinaire suivront 30 voyages en prenant soin de réaliser une évaluation clinique des veaux avant le ramassage et après l’arrivée à l’encan.
L’installation de caméras et d’instruments de mesure pour l’humidité et la température dans les camions permettra par ailleurs d’évaluer les conditions du transport et d’observer le comportement des veaux. Enfin, un système GPS collectera les données du trajet. « On veut comprendre comment le métabolisme des animaux change pendant le transport, explique Sébastien Buczinski. Une étude réalisée en Ontario a constaté que les veaux arrivaient souvent déshydratés dans les fermes d’élevage et que cela avait un impact sur la mortalité. Nous souhaiterions valider ces informations et apporter les correctifs nécessaires. »
En parallèle à ces activités de recherche, le CDPQ et les PBQ veilleront à doter l’industrie d’outils de biosécurité pour le transport, notamment en menant un projet pilote d’audit de biosécurité auprès de 40 entreprises de transport et en développant du contenu de formation pour les transporteurs. Le rapport final du projet est attendu pour fin 2021.