Santé animale 8 novembre 2024

Fièvre catarrhale ovine ou maligne : deux conditions bien distinctes

Depuis quelques mois en Europe, en France notamment, une éclosion de fièvre catarrhale ovine cause beaucoup de dommages chez les moutons. Certains éleveurs inquiets ont contacté le Centre d’expertise en production ovine du Québec (CEPOQ) à ce sujet. Cet article apporte quelques précisions sur cette condition qui, bien qu’elle soit présente chez nos voisins du Sud, reste absente  de nos élevages.

Débutons par une brève description de la fièvre catarrhale maligne. Celle-ci, qui est causée par le virus de l’herpès ovin, est une condition présente ici au Canada et au Québec. Chez le mouton, elle est asymptomatique; il n’y a donc pas de signes cliniques observés. En revanche, chez les bovins et les cervidés, les animaux touchés présentent des signes cliniques graves : diarrhée, difficultés respiratoires, problèmes nerveux, érosion des muqueuses. Malheureusement, les animaux développant des signes cliniques meurent généralement. La mortalité est donc très élevée, mais non la morbidité, car heureusement, le nombre d’animaux touchés est peu élevé. Aucun traitement n’est possible. 

Depuis quelques mois en Europe, en France notamment, une éclosion de fièvre catarrhale ovine cause beaucoup de dommages chez les moutons.

Essentiellement, il faut qu’il y ait contact d’ovins porteurs vers les bovins et les cervidés pour que la maladie se développe chez ces deux espèces. Par exemple, des animaux de ces espèces qui partagent le même pâturage, les mêmes espaces dans les bâtiments, durant un transport, etc., se contaminent avec les déjections des moutons, entre autres.

La fièvre catarrhale ovine, elle, mieux connue sous le nom de « blue tongue », est causée par un virus de la famille des réovirus. Cette condition peut être présente chez les ovins, les bovins, les caprins, les cervidés et les camélidés. Fait vraiment différent de la maladie précédente, ce sont les moutons qui sont les plus touchés, les bovins étant identifiés comme le réservoir de la maladie. Pour la transmission de la maladie, il doit y avoir un vecteur : c’est un moucheron piqueur du genre culicoides, Culicoides sonorensis entre autres. Cette condition est présente aux États-Unis, où se trouve cet insecte.

Le vecteur de la fièvre catarrhale ovine est un moucheron piqueur du genre culicoides, Culicoides sonorensis entre autres. Photo : Scott Bauer, Wikimedia

Dans le passé, quelques cas ont été déclarés au Canada, soit en Colombie-­Britannique et dans le sud de l’Ontario. L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) mentionne que ces cas sont probablement survenus parce que l’insecte vecteur a été poussé sur le territoire canadien par des vents favorables. 

Des signes cliniques importants

Ainsi, le moucheron a pu piquer des bovins, qui demeurent l’espèce privilégiée de cet insecte. Cependant, c’est lorsque ces insectes piquent des moutons qu’on observe des signes cliniques importants et de la mortalité. Mondialement, on dénote 24 sérotypes différents de ce virus; certains sont plus virulents que d’autres. La maladie ne peut pas se propager directement d’un mouton à un autre; le vecteur est absolument nécessaire. Elle n’est pas non plus transmise aux humains.

Signes cliniques chez le mouton : fièvre, rougissement du tissu buccal et nasal, enflure des lèvres, de la langue et des gencives, déglutition et respiration difficiles, langue violacée et enflée, boiterie. Cela se termine souvent par la mort de l’animal touché;

Diagnostic : par les signes cliniques et par des examens de laboratoire;

Traitement et prévention : aucun traitement n’est efficace, mais heureusement, on peut prévenir par la ­vaccination avec un vaccin contenant le bon sérotype en cas de présence de la maladie dans une région. Aucun vaccin n’est actuellement offert au Canada pour lutter contre la fièvre catarrhale du mouton; il serait déployé par les autorités sanitaires en cas d’éclosion au pays selon le plan d’intervention prévu;

Signalement : attention, les sérotypes 2,10, 11,13, 17 font partie des maladies à notification immédiate en vertu du Règlement sur la santé des animaux, ce qui doit être signalé à l’ACIA. Tous les autres types de fièvre catarrhale du mouton exotiques aux États-Unis sont des maladies à déclaration obligatoire en vertu de la Loi sur la santé des animaux, ce qui doit donc être déclaré à l’ACIA.

En conclusion, bien que la fièvre catarrhale ne soit pas présente au Québec, on se doit d’être vigilant puisque cette condition, si elle se répandait vers le nord du continent, pourrait causer des dommages majeurs aux producteurs ovins. Et dans un contexte de réchauffement climatique, il n’est pas invraisemblable que ce moucheron piqueur se retrouve ici dans quelques années, comme on l’a vu ici pour le virus de la Vallée Cache, qui cause entre autres des avortements chez les moutons.