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Sécher sa récolte en environnement contrôlé avec les frais qui s’ensuivent ou attendre et profiter de la générosité de dame Nature avec ses incertitudes inhérentes?
Chaque producteur a sa méthode, ses équipements, son expérience, mais selon l’agronome Nicolas St-Pierre, les bénéfices qu’il y a à récolter ses céréales plus tôt et à les conditionner en silo surpassent les économies qu’on pourrait faire en les laissant sécher au champ. C’est une question de contrôle de la qualité, selon lui.
« Plus on les laisse longtemps dans le champ à l’automne, plus elles sont à risque de se dégrader, plus on amène des facteurs d’altération comme les variations de température et d’humidité qui feront en sorte de noircir le grain », explique l’enseignant-chercheur au Collège d’Alma, au Saguenay–Lac-Saint-Jean.
Reconnu pour son expertise dans le domaine de la ventilation, du conditionnement et du séchage des grains, Nicolas St-Pierre est encore plus catégorique lorsqu’il s’agit de céréales destinées à la consommation humaine.
« En les sortant plus tôt, on conserve ainsi leurs propriétés technologiques. Si on les récolte à un taux d’humidité de 17 à 18 %, ce sont des conditions qui nous permettent de les conditionner facilement en silo, sans nécessairement utiliser le propane. Il y a donc peu de coûts reliés à l’opération. » De plus, certaines céréales comme le blé et l’orge sont très sensibles à la prégermination sur le plant si on les laisse trop longtemps dans le sol, note-t-il.
Quant aux céréales destinées à l’alimentation animale, l’enseignant recommande de les récolter plus tôt que tard même si ce n’est pas une pratique courante chez les producteurs. « On ne sait jamais ce qui va se passer dans l’année, comment le marché va évoluer. L’orge offre un bon débouché pour l’alimentation des porcs, mais l’industrie recherche une orge de qualité. »
Nicolas St-Pierre fait une exception pour le maïs, qu’il recommande de laisser sécher au champ le plus longtemps possible afin de faire diminuer son taux d’humidité. « Si je le sors trop vite, je devrai le traiter au propane pour faire baisser son taux d’humidité. Il y a donc des coûts reliés à ça et je dois aussi éviter trop de chaleur pour éviter d’altérer l’amidon à l’intérieur du grain. Avec le maïs, il faut connaître la limite entre le laisser sécher au champ assez longtemps et le sortir avant qu’il ne se mette à verser et amène des problèmes à la récolte. »
La maturité avant l’humidité
Copropriétaire de la Ferme Taillon et Fils, à Saint-Prime, au Saguenay–Lac-Saint-Jean, Olivier Milot fait partie de ces producteurs de grandes céréales qui ne jurent que par le séchage contrôlé. « Comme on est dans une production pour l’alimentation humaine, on vise le séchoir. En le laissant au champ, je perds de la qualité parce que la météo n’est pas toujours de notre bord. Avant, on en laissait un peu plus aux champs pour faire sécher, mais les oies blanches arrivaient quand ce n’était pas la pluie. Toutes sortes d’affaires qu’on ne contrôle pas et qui pouvaient mettre la récolte en péril. »
Dans leur ferme de près de 800 hectares, Olivier Milot et ses partenaires cultivent du blé, du chanvre, du sarrasin, du lin et se réservent une superficie de 200 hectares en cultures fourragères pour nourrir le troupeau de vaches. Comme ils sont bien équipés en termes de séchoirs et de silos, la décision de récolter est prise en fonction de la maturité des grains plus que de leur teneur en humidité. « Dans un champ qui n’est pas de maturité égale, je vais patienter avant de le récolter, mais ça ne sera pas pour une question de le faire sécher. Ici, à partir de 20 % d’humidité dans le blé, je vais le battre », explique-t-il.
Nicolas St-Pierre souligne également qu’en optant pour le séchage en silo, le producteur se garde toutes les options si le marché devient favorable. « Ça fait des années que je travaille à changer les façons de faire au niveau de la conservation, du séchage et de la ventilation des grains. Les pratiques sont en train de changer. Progressivement, les producteurs s’aperçoivent que ça fonctionne et qu’il y a de réels gains à faire ça », conclut l’enseignant-chercheur.