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C’est l’Acte pour l’encouragement de l’école élémentaire qui, en 1829, a ordonné la construction d’écoles de rang dans les milieux ruraux québécois. Rapidement, elles ont essaimé partout dans la province, au rythme du développement agricole et de la colonisation, jetant aussi les bases du système d’éducation québécois.
« L’école de rang, perçue comme ‘’le prolongement de la famille’’ ou ‘’le vestibule de l’Église’’, reçut un accueil plus ou moins favorable dans les milieux ruraux du Québec. La modicité des ressources de l’habitant québécois, un mode de production, l’agriculture, qui requérait tous les bras disponibles au détriment de la fréquentation scolaire, amenèrent, en plusieurs milieux, une contestation musclée lorsqu’il s’agissait d’implanter une école de rang », a écrit, en 1979, l’ethnologue Jacques Dorion, spécialiste de l’enseignement et auteur du livre Les écoles de rang au Québec, l’un des rares ouvrages parus sur le sujet.
L’école de rang a en ce sens quelque chose d’identitaire, croit l’ancien juriste Robert Tessier, qui consacre sa retraite à documenter la mémoire des écoles de rang. Il note d’ailleurs que, jusqu’à l’adoption, en 1943, d’une loi rendant obligatoire et gratuite la fréquentation scolaire des garçons et des filles de 6 à 14 ans, l’absentéisme a été toléré dans une sorte de pacte tacite entre le clergé, qui conservait ainsi sa mainmise sur l’éducation, et la population, encore très rurale et articulée autour de la famille traditionnelle.
« Le cœur de la période des écoles de rang a été dans un contexte où la plupart des Québécois étaient des occupants ruraux, rappelle-t-il. Tout ça représente un phénomène social très relié à la structure de l’époque, c’est-à-dire une structure dominée par le clergé avec une organisation qui était carrément paroissiale avec un ensemble de personnages clés (maîtresse d’école, inspecteur, curé, surintendant à l’éducation), qui marquaient cette société de façon évidente. On retrouve là-dedans des éléments de l’identité. »
Le passionné d’histoire et de patrimoine, qui se décrit comme un « amateur avancé », note que l’ouverture de rangs de colonisation s’est poursuivie jusqu’au milieu des années 1950, période qui a annoncé la fin d’un modèle scolaire axé sur la proximité avec les bénéficiaires, alors que le transport scolaire a commencé à se développer. La Révolution tranquille, qui couvait alors et qui a entraîné la laïcisation des institutions québécoises, a ainsi sonné le glas du système des écoles de rang.
« Le rapport Parent coïncide très précisément avec l’extinction des écoles de rang. Le politique a été prudent là-dessus parce que le rapport Parent, c’est Mgr Parent. C’est de la politique, mais on se sert d’un religieux pour mettre l’église dehors. On a pris un système qui était de l’apanage du clergé et on l’a transformé en un système public devenu l’apanage du gouvernement », constate-t-il en référence au rapport qui a mené graduellement à la création du ministère de l’Éducation et du Conseil supérieur de l’éducation, en 1964, ainsi qu’à des écoles primaires publiques et gratuites le plus souvent situées au village. « La Révolution tranquille et les idées libérales viennent opérer un changement de garde, une progression vers le futur », conclut-il.