Volailles 19 juillet 2024

Pourquoi les feux de ripe sont-ils fréquents dans les poulaillers?

Au début juin, un poulailler de Notre-Dame-de-Stanbridge, en Estrie, a été rasé par les flammes en quelques heures. Aucun oiseau n’a péri, puisque le feu est survenu juste avant l’entrée de nouveaux poussins dans le bâtiment. En 2024 seulement, plusieurs incendies de poulaillers sont survenus dans des circonstances similaires, soit juste avant ou peu après l’entrée des poussins. 

Il s’agit d’un moment où les risques d’incendie sont plus élevés, rapporte Guy Naud, directeur technique en prévention pour le Groupe Estrie-Richelieu, une mutuelle d’assurance agricole. Car c’est à ce moment que l’éleveur doit chauffer le bâtiment pour accueillir les poussins, alors que de la ripe fraîche et sèche vient d’être déposée au sol.

Guy Naud

Les systèmes de chauffage de la majorité des poulaillers fonctionnent au propane ou au gaz naturel. Ce gaz circule à travers un circuit de couveuses installées très près du sol, avec une flamme nue juste au-dessus de la ripe. S’il y a mauvais entretien des couveuses et des dépôts de charbon qui tombent à ce moment, quand la ripe est sèche, c’est très dangereux.

Guy Naud, directeur technique en prévention pour le Groupe Estrie-Richelieu
En 2024, plusieurs incendies de poulaillers sont survenus dans des circonstances similaires à celui de Notre-Dame-de Stanbridge, survenu au début juin. Photo : Gracieuseté de la Ferme avicole Benoît Fontaine

Les risques diminuent environ une semaine après l’entrée des poussins, car les déjections humidifient progressivement la ripe. Ces risques sont également plus élevés en hiver, puisque le bâtiment doit être chauffé sur une plus longue période.

Bien que ce type d’incendie soit fréquent, M. Naud se ­rappelle que la situation a déjà été bien pire. « Dans les années 1970, raconte-t-il, c’était tellement fréquent [les incendies] qu’on s’est mis à inspecter tous les poulaillers avec un explosimètre, pour détecter les fuites de gaz sur toute la ligne de propane. On faisait des tournées une fois par année dans chaque ferme. Depuis environ 1985, l’équipement et les systèmes de ventilation se sont beaucoup améliorés, tellement qu’on n’a plus besoin de le faire. »

Il spécifie néanmoins que « ça reste toujours un problème, en raison de la flamme de 24-26 couveuses par poulailler qui est très près de la ripe ».

Suzelle Barrington

Vers des poulaillers zéro risque

Selon Suzelle Barrington, consultante à la firme de génie-conseil Consumaj, ce risque d’incendie restera présent dans les poulaillers, à moins que le système de chauffage soit complètement repensé. 

Certaines compagnies européennes offrent d’ailleurs, depuis quelques années, des systèmes d’échangeur de chaleur complètement différents, qui permettent de réduire le risque d’incendie à presque zéro, mentionne la consultante. Consumaj a d’ailleurs participé à l’installation de l’un de ces systèmes en 2020, dans un vaste bâtiment de poules pondeuses de l’entreprise Lebco, à Saint-Hyacinthe.

L’échangeur d’air est installé à l’extérieur du bâtiment avicole, ce qui réduit considérablement les risques d’incendie, puisqu’il n’y a plus de contact avec la ripe et aucun gaz propane dans le bâtiment. Photo : Gracieuseté de Consumaj

L’échangeur d’air est installé dans une partie externe, qui fait environ 14 mètres de longueur. L’air froid de l’extérieur y circule pour être réchauffé et est ensuite propulsé dans un tube perforé qui redistribue l’air chaud (ou l’air froid en été) d’un bout à l’autre du bâtiment. 

Ce que ça fait, c’est que le système de chauffage est totalement à l’extérieur du poulailler, donc il n’y a aucun contact avec la litière. De plus, il n’y a plus de propane qui sort dans la bâtisse.

Suzelle Barrington, consultante à la firme de génie-conseil Consumaj

Ces systèmes pourraient bien devenir la norme dans les prochaines années, selon la consultante, mais ils sont encore peu présents au Québec parce qu’ils sont très coûteux. Ils permettent, en revanche, de grandes économies du point de vue de la consommation énergétique, en plus de favoriser une plus grande productivité des troupeaux, précise Mme Barrington.

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