Volailles 29 octobre 2024

Fausses poules de réforme : la vigilance reste de mise


Même si l’importation de poules de réforme au Canada en provenance des États-Unis n’est pas revenue au niveau record de 2012 avec 106 millions de kilogrammes (Mkg), les Éleveurs de volailles du Québec (EVQ) demeurent aux aguets.

Pour contourner les contrôles à la douane et éviter de payer des droits, des importateurs canadiens achètent chez nos voisins américains de la viande de poulet à griller qui est déclarée comme de la viande de poule de réforme, celle-ci étant libre de ligne tarifaire entre les deux pays.

Benoît Fontaine, président des Éleveurs de volailles du Québec

« Passé le seuil de 100 Mkg, il y a carrément de la fraude parce que finalement, on importe plus de poules de réforme que ce les Américains produisent. Mais présentement, on est à environ que 75 à 80 Mkg. On garde l’œil ouvert parce qu’on ne veut pas revivre ça, mais ce n’est pas un sujet dont on parle tous les jours », évalue le président des EVQ, Benoît Fontaine, qui agissait aussi comme président des Producteurs de poulets du Canada (PPC) au moment où la crise a atteint son point critique. 

Le producteur avicole de Notre-Dame-de-Stanbridge, en Estrie, estime que cette accalmie est attribuable à des cas interceptés par l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA).

Une fraude à la douane canadienne, ça relève du criminel. C’est du sérieux; ça veut dire de la prison. Et il y a aussi le fait que présentement, le prix du poulet aux États-Unis est assez élevé. Donc, importer du poulet cher, [ça rapporte] moins de bénéfices pour les fraudeurs potentiels.

Benoît Fontaine, président des EVQ

Pertes économiques et enjeu de santé publique

Selon un rapport des PPC de 2022, 17 % des importations canadiennes de viande de réforme seraient en fait de la viande de poulet à griller mal étiquetée volontairement. Au plus fort des importations illégales en 2012, les PPC estimaient que l’impact économique de cette situation faisait perdre au Canada plus de 1 400 emplois, 105 M$ en contributions à l’économie, 35 M$ en taxes et impôts, et au moins 66 M$ en recettes publiques par année en raison du contournement des tarifs.

Au-delà des répercussions économiques, Benoît Fontaine soulève un enjeu de santé publique tout aussi important. « Il y a des Canadiens qui pensent acheter du poulet canadien, élevé selon nos normes, et qui se retrouvent à manger du poulet des États-Unis. Et si ça s’avère de la vraie poule de réforme, soit des vieilles poules pondeuses, il y a des traces d’œuf là-dedans. Ça peut être dangereux pour quelqu’un qui a des allergies. »

Toute la question de la traçabilité est également compromise, ajoute le président des EVQ. « Si tu te retrouves avec un cas de salmonelle dans un de ces poulets frauduleusement importés, comment fais-tu pour remonter la chaîne? Nous, ici au Canada, on a le Programme de salubrité des aliments à la ferme, le bien-être animal, les densités d’élevage. On se sert de notre savoir-faire pour sécuriser l’approvisionnement du poulet canadien pour nos concitoyens. Puis, à côté, tu as des produits mal étiquetés, dont tu ne sais pas d’où ils viennent, avec peut-être des traces d’œuf. Donc, ça vient impacter toute l’image de marque qu’on a et la qualité soutenue et beaucoup plus assidue du poulet canadien », conclut Benoît Fontaine.