Volailles 18 juin 2024

Des mesures pour contrer la grippe aviaire

Dans le secteur avicole, le Programme de salubrité à la ferme (PSAF) met l’accent sur la qualité des produits et la biosécurité qui protège la santé des oiseaux. Reconnu par l’Agence canadienne d’inspection des aliments, ce programme en deux volets (poulet et dindon) se base sur l’approche HACCP, un système international qui permet d’identifier les problèmes durant l’élevage plutôt qu’à l’étape finale.

« Notre programme est établi depuis plus de 20 ans. La biosécurité ne pose pas d’enjeu majeur, mais on sensibilise beaucoup nos producteurs à l’application du changement de bottes et des mesures de biosécurité en général. Le succès des mesures de biosécurité est une question d’installations adaptées et d’observance », relate Nathalie Robin, directrice des Audits et programmes chez Les Éleveurs de volailles du Québec (EVQ). Les EVQ représentent près de 700 éleveurs et éleveuses de poulets et de dindons partout au Québec.

L’option 2 du PSAF révisé préconise le nettoyage obligatoire des mangeoires et abreuvoirs avec un détergent ou un désinfectant au moins une fois l’an, avec l’obligation d’effectuer ensuite un vide sanitaire.

Nettoyage et désinfection : des options flexibles

Le nettoyage du poulailler comporte plusieurs étapes qui permettent de réduire la charge bactérienne, et chacune d’elles participe à la rupture du cycle de contamination. Ces étapes, qui comprennent le nettoyage à sec, le nettoyage à pression (avec de l’eau), l’emploi de détergents ou de désinfectants et l’application d’un vide sanitaire, se déclinent en trois options. La mise à jour du PSAF publiée en 2021 offre ici plus de flexibilité aux éleveurs de volaille dans l’application d’un protocole adapté à leur production. Le processus de nettoyage doit être entrepris dès que les oiseaux ont été expédiés, et en respectant les instructions du fabricant des produits, qui risquent d’être moins efficaces s’ils sont mal employés.

Nathalie Robin, directrice des Audits et programmes chez les EVQ

« Pendant longtemps, il n’y avait que l’option 1, et c’est encore celle que la majorité utilise », note Mme Robin. « L’option 2, qui concerne principalement les mangeoires et abreuvoirs, est un peu moins utilisée par les producteurs », constate-t-elle, notant que certains utilisent plutôt l’option 3, qui préconise l’obligation d’un vide sanitaire de 14 jours après chaque troupeau. « C’est un peu plus difficile à gérer, mais ils peuvent se permettre deux fois par année d’avoir un vide sanitaire plus court que 14 jours », observe-t-elle, soupesant la logistique de ces différents protocoles sur le terrain. « Avec l’option 1, lorsque vous lavez et désinfectez votre poulailler et vos équipements, ce n’est pas une obligation d’avoir un vide sanitaire de 14 jours, même si c’est une pratique fortement recommandée. Cependant, si vous lavez juste vos mangeoires et abreuvoirs [option 2], il faut que ce soit suivi obligatoirement d’un vide ­sanitaire de 14 jours », précise l’agronome.

Pour une production rythmée par l’entrée des poussins et par les abattages, l’implantation d’un vide sanitaire, idéalement de 14 jours, peut poser certains défis. Photos : Gracieuseté des EVQ

Le vide sanitaire, une pratique à adopter

Pour une production rythmée par les entrées de poussins et l’expédition des animaux vers les abattoirs, le vide sanitaire peut poser certains défis pour les éleveurs. C’est toutefois l’approche que recommandent les EVQ à leurs membres. « Pour la nouvelle version du PSAF, les Producteurs de poulet du Canada ont fait une revue de littérature. Ce qui est ressorti énormément, c’est l’importance du vide sanitaire, et on en parle de plus en plus à nos éleveurs. Les bactéries et autres microorganismes aiment l’humidité », rappelle Mme Robin, ajoutant que le vide sanitaire permet entre autres de faire sécher le poulailler. « Les règles de vide sanitaire impliquent la même chose pour tout le monde, tandis que le lavage et la désinfection sont plus subjectifs. C’est pourquoi on essaie de sensibiliser nos éleveurs par rapport à l’importance de cette pratique », souligne l’agronome.

Quatre maladies à déclaration obligatoire

Au Québec, l’Équipe québécoise de contrôle des maladies avicoles (EQCMA) surveille les quatre maladies à déclaration obligatoire au Canada dans les volailles, soit l’influenza aviaire, la maladie de Newcastle, la typhose et la pullorose. L’EQCMA travaille avec les autorités gouvernementales et les intervenants de l’industrie avicole à la prévention, la préparation et l’intervention contre des maladies avicoles ciblées afin d’en minimiser les impacts potentiels sur l’ensemble de la filière québécoise.

Depuis 2020, c’est la grippe aviaire qui nous mobilise, suivie par la laryngotrachéite infectieuse et la mycoplasmose.

Nathalie Robin, directrice des Audits et programmes chez les EVQ

Dans son rapport annuel 2023, l’EQCMA cite d’ailleurs l’influenza aviaire comme un dossier majeur au Québec, avec 24 cas à l’hiver et au printemps de 2023, auxquels se sont ajoutés 4 cas durant la période automnale. Au total, 567 049 volailles sont mortes de la maladie ou ont été dépeuplées pour son éradication en 20231, comparativement à 532 000 en 2022. Dans les troupeaux commerciaux, on rapporte 16 troupeaux de canards et 11 troupeaux sous contingentement parmi les offices de commercialisation membres de l’EQCMA et 1 petit élevage. Les types de volailles affectés ont été principalement les canards, les dindes, avec des cas chez des poules de reproduction, des pondeuses commerciales et du poulet de chair.

Selon les données colligées par l’EQCMA, les dindes figurent parmi les types de volailles particulièrement affectées par l’influenza aviaire en 2023.

Pratiques de biosécurité et aménagements

Devant le caractère hautement contagieux des maladies, les organismes misent sur la formation sur les pratiques de biosécurité et  la mise en place d’aménagements qui les facilitent. « En plus des pratiques usuelles de changer de bottes et de laver et désinfecter les mains, on recommande beaucoup les entrées à deux zones », explique Nathalie Robin. Notons que la contamination de l’environnement autour du poulailler, la proximité d’un plan d’eau et le bris de biosécurité à l’entrée du poulailler sont les trois principaux enjeux observés dans les fermes de poulets/dindons infectées par la grippe aviaire. « Le changement de bottes reste ce qu’il y a de plus important dans le bris de biosécurité et l’introduction du virus. On incite beaucoup nos éleveurs à aménager des entrées à deux zones et à former tous leurs employés et intervenants dans l’application de cette mesure », souligne l’agronome.

La conception de cet aménagement prévoit l’identification et le contrôle des facteurs de risques déployés sur deux zones. La zone d’accès contrôlé (ZAC) inclut la cour et l’espace extérieur de l’entrée à deux zones, tandis que la zone d’accès restreint (ZAR) englobe l’espace intérieur de l’entrée à deux zones et les parquets où sont logées les volailles dans le poulailler.


1. Source : EQMA, bilan annuel 2023