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« Je n’ai plus de vie », dit d’emblée Étienne Gosselin, qui était en route pour livrer ses raisins de table lorsque La Terre l’a contacté. Cette récolte 2024 lui apparaît comme la meilleure pour les rendements, tandis que la qualité a quelque peu souffert des coups d’eau de l’été. Mais chose certaine, la demande est là.
« Le raisin, c’est le 4e fruit le plus consommé. Dans mes points de vente, je n’ai pas à convaincre le monde d’acheter. Surtout que contrairement à celui de l’épicerie, où la variété n’est pas importante, celui qu’on produit ici, il est différent. J’ai trois variétés et j’en ai planté cinq nouvelles parce que le goût est différent. Ça fait des affaires à découvrir, et les gens sont curieux », dit M. Gosselin, qui possède 1 700 plants sur un demi-hectare, à Stanbridge East, en Estrie.
Le fait qu’il y a peu de producteurs de raisins de table au Québec lui permet de fixer le prix qui lui plaît. « Je m’arrange pour ne pas le vendre plus cher que le raisin bio importé. Je pourrais le vendre plus cher, mais je ne veux pas que ça devienne un produit de luxe », raisonne celui qui est également journaliste agricole.
À Berthierville, dans Lanaudière, Jean-François Chaussé a commencé, le 23 août, sa récolte de raisins, laquelle s’annonce record. Il anticipe un rendement de 10 à 12 tonnes à l’hectare, selon les variétés. « Il y a beaucoup, beaucoup de raisins, et dans les sections non touchées par les inondations, il est très beau », dit celui qui pourrait bien être le plus gros producteur de raisins de table du Québec avec ses 10 000 vignes sur trois hectares.
La forte demande de ses clients le motive à accroître de plus de 50 % son nombre de vignes d’ici deux ans. « Je fournis des grossistes et ça prendrait plus de raisins du Québec. Il y a encore de la place, ça, c’est clair », affirme-t-il. Selon lui, les producteurs de raisins qui vendent à la ferme à petite échelle « ne fournissent pas à la demande ». Ce dernier vend par ailleurs 7 000 vignes par année à ceux qui veulent démarrer une production de raisins de table.
Jean-François Chaussé signale que tout n’est pas rose en viticulture. Il y a plusieurs étapes techniques qui compliquent la culture. Il a déjà vu un producteur arracher ses vignes. Lui-même a nommé son entreprise le Vignoble du vent maudit, en l’honneur du vent qui a détruit la structure de ses vignes à ses débuts…
Plusieurs options pour ne rien perdre
Fait intéressant, même si le produit est très périssable, les producteurs de raisins de table n’ont pas beaucoup de pertes. Jean-François Chaussé recycle ses raisins de catégorie 2 pour en faire du vin. De son côté, après avoir essayé les confitures et les raisins secs, Étienne Gosselin a découvert que la solution la plus facile consiste à transformer le tout en jus de raisin pasteurisé. « C’est vraiment bon, assure-t-il. C’est du jus très goûteux. L’an passé, on a fait 300 litres et c’était très concluant. Cette année, on devrait au moins doubler les quantités. »
L’importance de se regrouper
Pour se développer, la filière du raisin de table nécessite une meilleure organisation entre producteurs, estime Étienne Gosselin. « Il faudrait une association pour driver la production comme l’ont fait les fraises et framboises. Un regroupement aussi pour les équipements et se partager une effeuilleuse au lieu de le faire à la main. Mais depuis 2020, il n’y a pas d’activité [de regroupement]. »