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Si vous avez des parterres fleuris, vous y avez probablement vu butiner le syrphe d’Amérique, reconnaissable à ses grands yeux rouges et à ses allures de petite guêpe. Apprécié des jardiniers parce que ses larves raffolent des pucerons, le syrphe d’Amérique est devenu en 2021 la première espèce de la famille des Syrphidae offerte aux producteurs au Canada. À la fois efficace et rustique, cette mouche n’a pas fini d’étonner les chercheurs.
« Il s’agit d’une espèce qui rend un double service aux producteurs. L’adulte pollinise les plantes et la larve mange les pucerons », explique Noémie Gonzalez, étudiante au doctorat au sein du Laboratoire de lutte biologique d’Éric Lucas de l’UQAM, lequel mène des recherches sur cet insecte depuis 2014. « Le syrphe est très vorace et va se nourrir d’un grand nombre d’espèces. En laboratoire, il se nourrit de divers pucerons. »
Selon le site d’Anatis bioprotection, qui en fait la distribution commerciale, la larve du syrphe d’Amérique est furtive et se déplace à travers les pucerons sans les faire tomber. Elle peut en manger jusqu’à 300 durant sa phase de développement.
Puisque l’espèce est migratrice, cette mouche peut parcourir de grandes distances, ce qui présente un avantage par rapport à d’autres auxiliaires qui ont une capacité de dispersion limitée.
Un auxiliaire pour l’hiver?
« En serre, on pense que le syrphe est bien adapté pour les cultures l’hiver et le printemps, alors que les températures sont plus froides », poursuit Noémie Gonzalez. Considérant que les producteurs en serre ont moins d’auxiliaires disponibles pendant ces saisons, l’équipe du Laboratoire de lutte biologique a mené divers tests sur l’activité du syrphe à plus faible température, afin de reproduire les paramètres des différents types de serres exploités au Québec.
« En serres d’hiver ou en tunnels non chauffés, on pense qu’il pourrait fonctionner, car on l’a observé actif à des températures de 18 °C, de 15 °C et même de 12 °C », résume-t-elle.
Résultats encourageants
Dans le cadre de sa thèse de doctorat, elle a testé en parallèle l’activité du syrphe sur des photopériodes plus courtes. Ainsi, elle a observé à l’hiver 2022 son comportement dans une serre expérimentale de poivrons. Une partie ne bénéficiait que de 8 à 9 heures de lumière naturelle par jour et deux autres sections recevaient un traitement lumineux artificiel de 16 heures, l’une avec des lampes au sodium et l’autre avec des ampoules DEL. La serre était à une température de 24 °C le jour et de 19 °C la nuit.
Noémie Gonzalez a étudié la croissance des pucerons et le nombre d’œufs pondus par le syrphe dans les colonies de pucerons, en tenant compte qu’une luminosité prolongée favorise le développement du nuisible. « Au niveau de la fécondité, on n’a pas vu de différence pour le syrphe, quel que soit le traitement de lumière », mentionne la doctorante, qui a partagé ses résultats durant la réunion annuelle de la Société d’entomologie du Québec.
Par contre, l’ajout de l’éclairage artificiel a amélioré le taux d’éclosion des œufs de la mouche, bien qu’il ait obtenu une bonne performance avec la lumière naturelle, soit plus de 75 % des œufs éclos. La doctorante a aussi observé que le taux d’éclosion était sensiblement meilleur avec les ampoules DEL. La raison de cette différence demeure inconnue.
Actuellement, des chercheurs au Centre de recherche agroalimentaire de Mirabel (CRAM) observent le comportement du syrphe dans des conditions de serres minimalement chauffées ou de serres froides sans éclairage artificiel pour explorer tout le potentiel de cet auxiliaire chez nous.
« Le défi, c’est de garder la mouche en serre, car c’est un insecte migratoire. Le producteur pourrait installer des fleurs pour l’inciter à demeurer à l’intérieur », suggère-t-elle.