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Quels impacts auront les changements climatiques sur la disponibilité de l’eau, cette ressource essentielle en agriculture? Les réponses varient selon les régions et les situations. Mais différentes mesures peuvent déjà être mises en œuvre pour réduire le gaspillage et sécuriser l’approvisionnement.
« Quand on parle de prélèvement [d’eau] pour l’agriculture, on fait face à de multiples situations qui sont différentes en fonction d’où on est situé et du type de ressource en eau qu’on a », relève Sylvestre Delmotte, conseiller en agroenvironnement, modélisation et démarches participatives au Conseil pour le développement de l’agriculture du Québec (CDAQ).
Dans ce contexte, impossible, selon M. Delmotte, d’appliquer « la même recette » pour sécuriser l’approvisionnement en eau des fermes porcines québécoises. Les solutions doivent être « locales ».
La gestion de l’eau se décline d’ailleurs en deux volets : l’approvisionnement et l’usage qui en est fait à la ferme, souligne Sylvestre Delmotte.
Autant de questions qu’il importe de se poser, estime M. Delmotte, qui a participé à la réalisation de la capsule vidéo « Conséquences des changements climatiques sur la disponibilité de l’eau pour l’agriculture ». Celle-ci peut être visionnée sur le site Internet du Centre de développement du porc du Québec (CDPQ).
Selon lui, les réflexions portant sur ces deux aspects doivent être réalisées « en parallèle pour limiter les risques de manquer d’eau ».
À surveiller
De façon générale, souligne par ailleurs Sylvestre Delmotte, les nappes phréatiques de surface sont plus vulnérables aux changements climatiques. Une tendance à la diminution des niveaux des puits de surface et des étangs d’irrigation pourrait ainsi être observée annuellement à la fin de l’été.
« Pour les producteurs qui utilisent ce type de ressource, c’est un signal qu’il va falloir peut-être regarder avec un peu plus d’attention l’évolution des niveaux d’eau », souligne le conseiller en agroenvironnement.
A contrario, dit-il, la disponibilité des eaux souterraines semble moins vulnérable à l’évolution du climat. Elle pourrait même être présente en plus grande quantité, dans le climat futur.
« Dans les dernières années, les producteurs qui ont eu le plus de difficultés sont justement ceux qui étaient dans des régions où l’eau de surface est davantage utilisée », relève M. Delmotte. Chose certaine, les changements climatiques devraient se traduire par une hausse des besoins en eau dans les entreprises porcines, que ce soit, par exemple, pour l’abreuvement des animaux ou le contrôle des conditions ambiantes des bâtiments.
« Il faut donc se demander si l’eau qu’on utilise vient d’un captage profond ou en surface, ou encore si l’eau provient d’un seul ou de plusieurs puits », dit Sylvestre Delmotte. Des tests de captage peuvent, au besoin, être réalisés avec un puisatier. « Anticiper, c’est mieux que de tenir pour acquise notre ressource et découvrir, un jour, qu’elle n’est peut-être pas aussi abondante », fait-il valoir.
De l’eau en réserve
L’agronome Sébastien Turcotte, responsable bâtiments et régie d’élevage au CDPQ, rappelle pour sa part l’importance pour les producteurs d’évaluer la capacité de leurs puits et de disposer de réserves d’eau à la ferme afin d’être mieux préparés aux périodes de sécheresse.
Selon la documentation du CDPQ, ces réserves devraient être équivalentes à deux jours d’utilisation minimum. Elles doivent également être conçues pour permettre l’approvisionnement par camion-citerne, si un problème survient avec le puits.
« Pour calculer le volume minimal de la réserve d’eau, il faut utiliser la situation où les besoins sont les plus grands, comme lors d’un lavage en pleine canicule. Pour ce faire, il faut additionner les besoins hydriques maximaux des animaux à la consommation maximale d’eau de lavage », est-il recommandé.
Selon M. Turcotte, les entreprises porcines qui disposent de réserves d’eau ne sont toutefois plus si rares. « Toutes les nouvelles installations de maternité en ont, dit-il. Il y en a aussi dans les régions où les producteurs ont eu des problèmes d’approvisionnement d’eau. »
Mission optimisation
Il est également recommandé de mettre en place des techniques d’élevage qui optimisent l’utilisation de l’eau. Des projets de recherche ont été réalisés il y a quelques années afin de cibler les meilleurs équipements d’abreuvement pour limiter le gaspillage d’eau, souligne Sébastien Turcotte.
Les résultats ont démontré que les bols conventionnels sont idéaux pour les porcs en engraissement, tandis que les suces installées entre deux bat-flanc (panneaux de plastique) sont optimales pour les truies en groupe.
Anecdote : c’est par hasard que ce dernier constat s’est imposé. Les panneaux de plastique avaient à l’origine été installés dans le cadre du projet de recherche pour permettre une lecture plus efficace des puces électroniques des truies.
Autre technique à favoriser, poursuit M. Turcotte : faire détremper les salles des installations à laver, c’est-à-dire mouiller les surfaces, puis laisser l’eau ramollir les saletés. « En détrempant judicieusement les salles, on peut diminuer par trois le temps de lavage et de 50 % la consommation d’eau », dit-il.
Même principe avec l’utilisation de la rotabuse (buse rotative pour nettoyeur haute pression) pour laver les planchers. Cet équipement, déjà utilisé par une majorité d’éleveurs, selon Sébastien Turcotte, entraîne également des économies de temps et d’argent.
Sans surprise, l’utilisation de l’eau chaude, plutôt que de l’eau froide, permet de gagner en efficacité dans l’opération nettoyage, ajoute le responsable bâtiments et régie d’élevage au CDPQ.
Finalement, le monitorage de l’eau en continu, offert par les contrôles de nouvelle génération, permet d’agir rapidement en cas de fuites, de bris ou de manque d’eau. Une alarme est envoyée au producteur dès qu’un problème est détecté. « Parfois, ça peut éviter les problèmes de bien-être animal ou même de mortalités », fait valoir Sébastien Turcotte.