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Une réforme du programme d’assurance stabilisation des revenus agricoles (ASRA) s’avère cruciale pour la relance du secteur porcin, conclut une étude qui trace un portrait en profondeur des forces et des faiblesses de la filière porcine québécoise.
Rendue publique le 14 mai, l’Étude prospective de la filière porcine au Québec, réalisée par la firme Raymond Chabot Grant Thornton, avait été commandée par le ministre de l’Agriculture, André Lamontagne, il y a environ un an, afin de mieux orienter la relance de l’industrie qui suivra la période de décroissance en cours.
Ainsi, bien que le programme de l’ASRA ait contribué au développement d’une filière pérenne, il suscite également différents enjeux, dont celui « de limiter la compétitivité de la filière dans son ensemble », note le rapport. Il serait devenu moins bien adapté à la réalité des fermes porcines d’aujourd’hui, « désormais de plus grande envergure que les petites entreprises des années 1970 », tout en avantageant certaines fermes au détriment d’autres, comme celles des secteurs éloignés des abattoirs ou de la production de céréales, ou encore qui font du porc de spécialité. D’autre part, les auteurs font valoir que le modèle actuel de l’ASRA aurait « des avantages pour les entreprises intégrées, ce qui aurait pu contribuer à accentuer la concentration de la filière ».
Les données rapportées montrent d’ailleurs que la proportion des porcs produits par les grandes entreprises est passée de 43 % en 2012 à 61 % en 2022, « ce qui illustre la baisse de pouvoir des producteurs indépendants par rapport aux réseaux intégrés ». Le phénomène de concentration a également touché le secteur de l’abattage et de la transformation. Au fil des fusions et des acquisitions, les parts de marchés d’Olymel sont ainsi passées de 50 % à 70 % depuis 1993, ce qui nuirait, selon le rapport, à la compétitivité du secteur. Ce constat est toutefois nuancé par le fait que ce phénomène n’est pas différent de ce qui se passe dans d’autres provinces canadiennes, précise-t-on.
Les éleveurs invités à participer à la réflexion
Le président des Éleveurs de porcs du Québec, Louis-Philippe Roy, a réagi en mentionnant que ce rapport contenait « des constats intéressants, autant pour les éleveurs que pour les transformateurs ». Il a de plus révélé, dans une vidéo à l’intention des producteurs, que l’organisation s’inspirera des conclusions du rapport pour faire « un repositionnement stratégique », qui sera présenté dans le cadre de l’assemblée générale annuelle de l’organisation, au début juin. « Ce rapport va être un outil pour faire avancer les dossiers, dont le dossier majeur de notre filet de sécurité, l’ASRA. On va aller vous voir sur le terrain pour vous consulter, pour savoir ce dont on a besoin pour les prochaines années, car cette réflexion va dicter les 15-20 prochaines années. On a besoin de vous pour entamer la réflexion sur cette réforme majeure », a-t-il indiqué.
Baisse de la productivité des éleveurs de porcs québécois
L’étude de Raymond Chabot Grant Thornton rapporte une diminution de la productivité des éleveurs de porcs québécois depuis 2017. En effet, le temps moyen de travail pour produire 100 kg de porc a connu une hausse de 9 %, passant de 67 minutes en 2017 à 72 minutes en 2022. De plus, le Québec génère moins de revenus que les autres provinces pour chaque dollar d’aide financière obtenu via un programme gouvernemental. Par exemple, en 2022, les éleveurs de porcs du Québec ont généré 26 $ de revenu total d’exploitation pour chaque dollar de paiement de programmes net obtenu. En comparaison, ce montant s’établissait à 46 $ pour l’Ontario et à 52 $ pour le Manitoba. « En considérant que le gouvernement offre un soutien financier considérable qui percole à travers l’ensemble de la filière, il est nécessaire d’avoir plus de transparence sur les données financières des entreprises. Plus spécifiquement, en retour du soutien financier offert, le gouvernement du Québec est en droit de demander davantage de données permettant d’évaluer la santé financière et opérationnelle d’ensemble de la filière », mentionnent les auteurs du rapport.
Un secteur vulnérable en raison des exportations
L’étude de Raymond Chabot Grant Thoron met entre autres en évidence la grande vulnérabilité de l’industrie porcine québécoise et canadienne aux marchés internationaux, puisqu’une grande proportion de la production est destinée aux exportations. Deux solutions sont proposées pour atténuer cette dépendance. La première est d’accroître l’autonomie alimentaire, en comblant la part de la consommation locale de porcs qui provient actuellement des importations. « Le Canada pourrait ainsi réduire ses exportations jusqu’à 245 millions de tonnes de porcs en accroissant la consommation locale, qui permettrait de réduire la quantité de porc exporté de 18 % », est-il indiqué. L’autre suggestion est de diversifier davantage les marchés d’exportation de la production québécoise pour réduire la dépendance envers les États-Unis, où la province exporte 35 % de sa production.