Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
Les Éleveurs de porcs du Québec misent sur un budget de 80 M$ pour inciter des propriétaires à fermer des sites d’élevage porcin au Québec pendant au moins cinq ans. L’objectif de ce « mécanisme de retrait temporaire » est de faire décroître la production d’un million de porcs, sans avoir à imposer une baisse de production de 15 % aux éleveurs de porcs qui choisiront de rester en activité.
« C’est un choix difficile à faire pour des éleveurs qui ont investi dans l’entreprise et pour leur relève, mais c’est là qu’on est rendus. L’objectif est de redevenir un fleuron, mais il va falloir passer par un moment difficile au cours de la prochaine année », a lancé David Duval, président des Éleveurs de porcs du Québec, en ouverture de l’assemblée générale extraordinaire du 27 mars, à laquelle près de 300 éleveurs ont assisté en ligne. Il s’agit d’une participation record depuis les vingt dernières années, a souligné M. Duval.
Selon les Éleveurs, ce mécanisme de retrait temporaire, qui est inspiré d’un outil similaire mis en place lors de la crise de 2008-2009, coûtera moins cher à administrer que les solutions qui sont actuellement utilisées pour détourner et mettre en marché les quelque 500 000 porcs produits en surplus depuis la première baisse d’achats appliquée par le transformateur Olymel.
Rappelons que ce dernier, qui fait face à des difficultés financières, a annoncé des coupes supplémentaires de 850 000 porcs au Québec en juin prochain et la fermeture de l’une de ses quatre usines de transformation. Face à cette baisse de production importante, qui est de l’ordre de 15 %, les Éleveurs de porcs du Québec sont confrontés à un défi de logistique, puisqu’ils n’ont pas la même latitude que les secteurs sous gestion de l’offre pour imposer une décroissance de la production.
Le détournement de porcs vers d’autres provinces et la vente de porcelets aux États-Unis coûtent actuellement très cher aux producteurs. « Cela coûte environ 80 $ par porc, en plus de poser un problème concernant le bien-être animal, puisque les animaux doivent être transportés sur de grandes distances. Ce n’est donc pas une solution à long terme », a spécifié Benoit Désilets, directeur des affaires économiques aux Éleveurs de porcs du Québec. L’organisation estime que ce nouvel outil de retrait volontaire, qui a été approuvé par la majorité des délégués le 27 mars, est une première étape pour diminuer la production sans trop affecter les éleveurs qui choisiront de rester en production.
Le fonds cumulatif de 85 M$ nécessaire pour administrer cette restructuration, qui comprend également un volet complémentaire de vente de porcelets, sera financé avec un prélèvement de 2,50 $ par 100 kg de porc pendant cinq ans. Cette perte de revenu sera toutefois admissible au programme provincial d’assurance stabilisation des revenus agricoles (ASRA), financé aux deux tiers par l’État.
Le temps presse
Puisque la prochaine baisse d’achats annoncée par Olymel arrive à grands pas, le délai pour réduire la production porcine est très court, ont fait savoir les Éleveurs, qui doivent encore attendre l’aval de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec pour mettre en place ce nouvel outil de retrait temporaire.
Pour ne pas perdre de temps, les éleveurs désirant quitter la production pourront déposer leur soumission dans un premier appel qui se déroulera d’avril à mai. Si nécessaire, un deuxième et un troisième concours pourraient être lancés par la suite. Ce sont les plus bas soumissionnaires qui seront sélectionnés. « Ce choix sera purement mathématique », a précisé Benoit Désilets, qui a présenté les grandes lignes de l’outil qui permettra aux Éleveurs de faire ce calcul. Celui-ci se basera principalement sur « l’unité animale équivalente », laquelle permet de moduler la valeur des sites en fonction de différents paramètres, par exemple s’il s’agit de maternités, de pouponnières ou d’engraissements.
L’organisation souhaite recevoir des soumissions de tous les types d’élevage, afin de permettre un certain équilibre dans la décroissance de la production. L’autre souhait est que les soumissions soient assez nombreuses pour éviter de devoir imposer une baisse de production aux producteurs qui resteront. « L’idée, c’est qu’il y ait un million de porcs produits en moins, soit l’équivalent de 400 000 places à l’engraissement et de 42 000 truies environ », a spécifié M. Désilets.
De nouveaux pouvoirs entre les mains des Éleveurs
Les outils de « gestion équilibrée de la production » et de « restriction temporaire de la mise en marché », qui donnent de nouveaux pouvoirs aux Éleveurs de porcs du Québec pour gérer, limiter, faire croître ou décroître la production porcine dans les fermes si la situation s’avère nécessaire, sont officiellement entrés en vigueur le 29 mars. Ces modifications au Règlement sur la production et la mise en marché des porcs, proposées dans une résolution adoptée par le conseil d’administration des Éleveurs de porcs, les 9 et 10 novembre 2022, ont par la suite fait l’objet de représentations devant la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec. Cette dernière les a ensuite approuvées dans une décision, le 17 mars. Leur entrée en vigueur a été officialisée avec la publication des modifications dans La Gazette officielle du Québec, le 29 mars. De son côté, le « mécanisme de retrait temporaire » constitue une demande de modification au règlement distincte qui devra passer par un processus similaire avant d’entrer officiellement en vigueur.