Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
À la fin décembre, quatre éleveurs québécois ont remporté les grands honneurs au concours GenOvis récompensant les meilleurs troupeaux en matière de génétique au Canada. « Ça démontre la qualité remarquable du travail qu’ont accompli nos éleveurs », explique Cathy Michaud, directrice générale de la Société des éleveurs de moutons de race pure du Québec.
Les éleveurs récompensés font partie des figures de proue d’une industrie qui voit grand. « Je suis flabergasté par leur dynamisme », dit Claude Robert, professeur en amélioration génétique animale à l’Université Laval. Ce dernier a travaillé auprès de plusieurs secteurs animaliers au Canada et porte l’actuel projet de recherche en génomique ovine, une première nord-américaine.
La qualité génétique de ses troupeaux, le secteur ovin la doit notamment aux outils dont elle s’est dotée. Le Québec est le seul en Amérique du Nord à avoir instauré un programme de classification de la conformation sur les animaux vivants, dans le cadre duquel un évaluateur note l’apparence physique de chaque animal. « C’est pour ça qu’on reçoit des appels d’acheteurs de l’extérieur », explique Sylvain Blanchette, propriétaire de la Ferme Ovimax, à Saint-Philippe-de-Néri, au Bas-Saint-Laurent, l’un des éleveurs couronnés en décembre.
Réouverture des frontières américaines
Le téléphone a notamment commencé à sonner en provenance des États-Unis, un marché qui vient de rouvrir, 19 ans après le début de la crise de la vache folle, laquelle avait entraîné la fermeture des frontières. Comme d’autres acheteurs extérieurs, les Américains ont été amenés à découvrir la génétique ovine québécoise grâce aux encans en ligne, organisés dans la foulée des contraintes de la COVID-19.
Les premiers animaux ont été exportés aux États-Unis en septembre 2022.
« C’est satisfaisant de travailler avec des clients qui apprécient notre travail et les sujets de qualité qu’on leur propose, relate Sylvain Blanchette, qui a notamment vendu ses animaux de race Arcott-Rideau à des éleveurs du Kentucky. Et là, ça commence à débloquer. Je suis approché par des gens du Texas et du Dakota du Nord. » Dans ce dernier cas, l’acheteur est tellement motivé qu’il envisage de venir lui-même chercher les animaux au Québec.
Ce serait un soulagement pour Sylvain Blanchette, car de l’avis des éleveurs, l’exportation est exigeante d’un point de vue logistique. « Ça peut prendre jusqu’à trois mois, organiser toute la paperasse. Et c’est aussi beaucoup d’heures sur la route pour les animaux », explique Marie-France Bouffard, copropriétaire de la ferme Agronovie, à Granby, en Estrie, qui a vendu ses Arcott-Rideau en Ohio et qui est en pourparlers avec le Kentucky.
Il reste à développer l’offre des éleveurs, qui est encore limitée. Afin d’augmenter la sienne, Agronovie a doublé son cheptel d’Arcott-Rideau en 2018.
« Même à ça, notre carnet de commandes est plein jusqu’à l’automne 2024, explique Mme Bouffard. On a dû refuser des offres. »
Et avec les récents accords internationaux, la demande n’est pas près de s’estomper. Au début de l’automne, c’est le marché mexicain qui s’est ouvert, puis, en octobre, le marché sud-américain, avec la Colombie. « Ça faisait douze ans que les Colombiens voulaient pouvoir obtenir de la génétique canadienne », explique Cathy Michaud.
Pour répondre à la fois à la demande et aux enjeux de déplacement des animaux, une nouvelle avenue se profile dans l’industrie. La vente de semences et d’embryons est une solution que compte développer Larry Mastine, éleveur de moutons de race Soffolk à Danville, en Estrie. « On veut pouvoir vendre notre génétique mondialement », dit le propriétaire d’Elm Shade Suffolks, qui a dû tourner le dos, en 2021, à une commande de 450 semences de la part d’acheteurs américains, faute de soutien technique. « On va s’arranger pour avoir les ressources pour y répondre [dans l’avenir]. »
Sylvain Blanchette fait aussi partie de ceux qui comptent développer l’offre de semences et embryons. « Les éleveurs étrangers veulent créer leurs propres troupeaux d’Arcott-Rideau. Je suis en train de créer ma propre concurrence. Mais ça ne me dérange pas. On est tellement en avance! On est hot au Québec! » dit-il avec un large sourire.
Le Québec veut aussi vendre son expertise
Il n’y a pas que les animaux que l’industrie ovine québécoise compte exporter; il y a aussi son savoir et ses ressources en matière d’amélioration génétique des troupeaux. « Les autres provinces souhaitent avoir accès à notre système de classification de la conformation sur les animaux vivants, qui est unique au pays. Nous sommes à voir comment le faire évoluer, explique Cathy Michaud, directrice générale de la Société des éleveurs de moutons de race pure du Québec. On travaille aussi sur la promotion de notre programme de conformité des brebis laitières, qui est aussi unique en Amérique du Nord. »