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Le temps des Fêtes a eu une tout autre allure, cette année, pour le père et le fils Bertrand. Il y a un an, peu avant Noël, ils recevaient de leur principal partenaire d’affaires, Canopy Growth, un avis les informant qu’il souhaitait cesser totalement la culture de cannabis, qui représentait 75 % de la surface de production des Serres Bertrand. Mais voilà que ces derniers sont aujourd’hui sur une lancée inattendue et veulent prendre d’assaut le marché du radis.
Petit retour en arrière : au printemps 2023, alors qu’ils cherchaient quoi produire dans leurs serres auparavant affectées au cannabis (une surface de 700 000 pieds carrés), ils ont décidé de retourner à leurs premières amours, soit la production maraîchère. « On ne savait pas encore laquelle, par exemple », dit Steve Bertrand, le directeur général de l’entreprise. Son père Stéphane et lui produisaient encore des tomates et avaient tout juste amorcé la culture de radis en serres, mais souhaitaient explorer d’autres avenues. « On a testé les haricots [pour lesquels il y avait un marché], raconte Steve. Mais ça coûtait trop cher en main-d’œuvre. On ne peut pas automatiser tout ça avec de la machinerie comme dans les champs. »
Par contre, la production de radis dans leurs serres du quartier de Saint-Janvier à Mirabel, dont la récolte a commencé à la fin février, se portait très bien et les chiffres étaient au rendez-vous. Pour remplacer le cannabis, ils ont donc décidé d’opter pour le radis sur un total de 800 000 pieds carrés.
Et il y a autre chose : le produit distinctif. « Le goût de nos radis est vraiment différent. Ils ne piquent pas! J’ai deux petites filles et même elles, elles en mangent, raconte Steve Bertrand. Le goût piquant vient de la chaleur et des variations de température. Mais en serre, on n’a pas ça. »
Il reste à faire connaître cette caractéristique aux clients, ce qu’ils feront à partir du printemps. L’agence est déjà embauchée et le plan de communication, avancé. « Les jeunes associent le radis à l’ancien temps. On veut leur dire que c’est un légume pas très cher et qu’il est facile à cuisiner, dit le dirigeant. Le radis n’a jamais été proposé de cette manière. »
Les Serres Bertrand ont terminé la transition de production vers le radis à la fin octobre. Elles comptent déjà parmi leurs clients Sobeys/IGA, Metro, Super C et, depuis deux semaines, Maxi et Provigo. « L’autre avantage de nos radis pour les épiciers, c’est leur durée de vie. Car les feuilles des radis fanent normalement très rapidement, rapporte Stéphane Bertrand, président de l’entreprise. Du champ à l’épicerie, c’est d’ordinaire de trois à cinq jours. Pour nous, c’est de 24 à 48 h. Ça fait beaucoup moins de pertes pour eux. »
Les Serres Bertrand ont également dans leurs cartons de proposer de nouvelles variétés de radis. Pour Steve Bertrand, le plan est clair : « On veut devenir les rois du radis ».
Retour sur le buzz du cannabis
Les Bertrand ne regrettent pas leur passage de cinq ans en production de cannabis. « On n’est pas amers », dit Stéphane. Il faut dire que le bilan qu’il en dresse n’est pas catastrophique. « On n’a pas perdu d’argent dans l’aventure, grâce à notre entente de séparation avec Canopy Growth, qui a notamment racheté leur 45 % des parts de la coentreprise, précise-t-il. Ç’a s’est bien terminé et on est encore en bons rapports avec eux. » Pour ce qui est des employés, sur les 200 attitrés au cannabis, ils disent en avoir conservé 70, puis réembauché 5.
Ils rapportent aussi avoir fait beaucoup d’apprentissages. « Le fait d’avoir eu à respecter les normes et la réglementation de Santé Canada, on a gagné de l’expertise qu’on n’aurait pas eue autrement. Ce sont des choses qu’on peut appliquer au maraîchage, dit Steve. On est plus solides en gestion et en production. »
Il jette un regard bienveillant sur l’empressement des joueurs de l’industrie à entrer dans cette production qui a battu de l’aile par la suite. « On s’est tous fait influencer par les aspirations de revenus. Et il y avait aussi beaucoup de pression pour être prêts pour octobre 2018 pour l’ouverture de la SQDC [Société québécoise du cannabis], analyse-t-il. On ne pouvait pas savoir que la demande était surévaluée à ce moment-là. »