Maraîchers 5 août 2024

Beaucoup trop de maïs sucré pour la demande

Après un chaud mois de juillet, les champs regorgent de maïs sucré aux Jardins Agripro, si bien que la ferme de Saint-Eustache, au nord de Montréal, peine à tout écouler. L’offre surpasse largement la demande, tant au kiosque que sur les marchés de gros.

« Le mot d’ordre au kiosque, c’est de ne pas perdre de vente. Si quelqu’un dit : « Je l’ai vu moins cher ailleurs », tu t’arranges pour ne pas perdre la vente », lance sans détour Alain Sauriol, le propriétaire de l’entreprise maraîchère. Le 30 juillet, il venait d’abaisser ses prix au détail, les faisant passer de 8 $ à 7 $ la douzaine.

Ça fait un mois qu’il fait 30 degrés. Ça mûrit trop vite et il y en a trop qui sortent en même temps. Ils embarquent un par-dessus l’autre.

Alain Sauriol, propriétaire des Jardins Agripro

Celui qui cultive 30 hectares de maïs sucré remarque un marché particulièrement engorgé du côté des grossistes montréalais à qui il vend des épis à prix qu’il juge dérisoires, cette année.

« Les champs sont super beaux et le maïs est super bon, mais les marchés ne sont pas bons », se désole M. Sauriol, dont les récoltes ont commencé au début juillet, avec de l’avance par rapport à la normale.

À L’Assomption, le producteur Gilles Turcot, qui vend son maïs sucré à des kiosques partout dans Lanaudière ainsi qu’à des grossistes de la métropole, constate le même phénomène.

Les vagues de chaleur, ça crée de l’abondance, beaucoup d’abondance. Dans ce temps-là, les prix chutent au boutte, mais ça fait partie de la game. La température, on ne contrôle pas ça.

Gilles Turcot, producteur de maïs sucré à l’Assomption

« Pas d’argent à faire » sur le marché de gros

Chez Courchesne Larose, un important distributeur de fruits et légumes frais au Canada, le vice-président exécutif, Guy Milette, admet qu’il n’y a « pas d’argent à faire dans le maïs » sur le marché de gros en ce moment, car la chaleur et le bon dosage de pluie depuis le début de l’été ont occasionné « des rendements énormes » par rapport à la demande. Le 31 juillet, les agriculteurs recevaient entre 10 $ et 11 $ pour un sac de 60 épis qui leur coûtait entre 10 $ et 12 $ à produire, donne-t-il comme exemple.

« Un bon rendement, ça peut durer plusieurs semaines, peut-être même toute la saison », avance par ailleurs M. Milette, qui entrevoit que l’engorgement pourrait persister. Surtout que le marché de l’exportation vers les États-Unis est lui aussi saturé, en raison de forts volumes récoltés entre New York et la Virginie.

Un tableau plus rose dans certaines fermes

Il y a en revanche des producteurs qui connaissent une bonne saison jusqu’ici, dépendamment de la localisation de leur ferme et du marché qu’ils desservent. À Saint-Rémi, en Montérégie, Éric Vinet affirme que les ventes roulent « à plein régime » depuis qu’il a commencé les récoltes de maïs sucré, le 11 juillet. Ce dernier en fait le commerce à sa ferme, mais aussi dans les fruiteries.

« Ça va numéro un. Les ventes, ça va bien et les rendements, c’est bon », témoigne celui qui obtient des fruiteries environ 20 $ pour un sac de 60 épis.

À Neuville, près de Québec, Isabelle Béland juge, pour l’instant, que l’achalandage à son kiosque de ferme est normal. « Dans notre coin, ça fait deux-trois semaines que c’est commencé. Je n’ai pas trop de maïs, parce que j’ai semé ce dont j’avais besoin. Ça va bien. Le maïs est beau, ça pousse bien », exprime-t-elle.