Lait 6 septembre 2024

La Fromagerie Perron mise sur du lait provenant de vaches non attachées

La Fromagerie Perron a récemment lancé de nouveaux fromages, dont deux cheddars qui se distinguent par une mention « vaches en liberté » placée en évidence sur l’emballage. Cela certifie aux consommateurs que le lait utilisé provient « de vaches libres de se déplacer dans la ferme », indique la coopérative Nutrinor, propriétaire de la fromagerie de Saint-Prime, au Saguenay–Lac-Saint-Jean. 

On a fait tous nos devoirs. On a fait des focus groups et les consommateurs semblent avoir une réaction très positive [à l’agriculture durable et à ce que les vaches ne soient pas attachées].

Alexandre McElhaw, vice-président aux ventes, stratégies commerciales et marketing du domaine agroalimentaire chez Nutrinor

C’est que la marque Perron a besoin de reprendre la place qui lui revient sur les marchés, dit-il, précisant que l’arrivée de nouveaux joueurs dans les cheddars a entraîné une concurrence féroce qui gruge les ventes de ses fromages au Québec, mais surtout dans le reste du Canada. 

L’entreprise a travaillé sur le développement des saveurs et le goût de ses fromages, mais la fromagerie fondée en 1890 par Adélard Perron entend reprendre des parts de marché en se distinguant par l’utilisation d’un lait issu de l’agriculture durable. L’entreprise a recours à un circuit de collecte de lait spécifique, qui se rend dans les fermes où les vaches ne sont pas attachées et qui ont adhéré au Pacte agricole durable Nutrinor (PADN).

Alexandre McElhaw mentionne à cet effet que l’environnement et le bien-être animal étaient deux critères particulièrement cités chez leurs consommateurs lors d’études marketing. Il fait valoir que l’agriculture durable est complexe à faire comprendre au consommateur, tandis que « vaches en liberté » frappe davantage. Il ajoute que les gens vont souvent faire l’achat initial en raison du sceau « vaches en liberté » pour ensuite s’intéresser au concept plus global de l’agriculture durable et ainsi répéter l’achat du produit.

Matière à débat

La Terre lui a fait remarquer que, selon les données des Producteurs de lait du Québec, 77 % des fermes laitières québécoises sont en stabulation entravée et que délaisser volontairement le lait des vaches attachées pourrait heurter de nombreux producteurs, surtout que Nutrinor est une coopérative de producteurs.  « C’est certain que ça crée des questions et des débats, mais de bons débats », répond M. McElhaw. Ce dernier souligne qu’il ne faut pas dénigrer les producteurs en stabulation entravée, car peu importe que leurs vaches soient libres ou attachées, « les producteurs en prennent soin ». Il indique toutefois que la stabulation libre permet aux vaches d’exprimer davantage leurs comportements naturels. 

Le sceau d’agriculture durable chez Nutrinor repose sur une centaine de producteurs qui ont volontairement adhéré à une démarche d’amélioration continue dans les volets du bien-être animal, de l’environnement et de la santé des producteurs, notamment. Il n’y a pas de cahier des charges, mais les progrès des fermes sont mesurés. 

Plus payant?

En fin de compte, le producteur reçoit-il plus d’argent pour ce lait de vache en liberté et durable? « Non, ils ne reçoivent pas directement de supplément. Les fromages fins sont déjà un produit de luxe. On ne voulait pas ajouter une prime par-dessus, car on se serait disqualifiés [sur les marchés]. Mais on est une coop, les producteurs vont tous en profiter [si les ventes augmentent] », argue M. McElhaw. Nutrinor bonifie toutefois la ristourne des membres qui participent au PADN.

La coopérative offre d’ailleurs des types de lait issu de l’agriculture durable et des vaches en liberté depuis 2021, lesquels affichent des ventes en hausse.