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Les augmentations de température dues aux changements climatiques ont, sans aucun doute, accentué la présence, la mutation et l’expansion de certains ravageurs des cultures au cours des dernières années. Il est donc primordial, vu l’étendue et l’importance économique du secteur des grandes cultures (maïs, soya, blé, orge, canola, etc.) au Québec, de renforcer l’efficacité de la lutte contre ses ravageurs.
Malgré le développement de plusieurs outils pour la surveillance des insectes ravageurs et de leur dynamique, le défi d’une très bonne prédiction est de taille, car le niveau de précision est parfois critiqué. Dans d’autres secteurs économiques, on a fait appel à l’intelligence artificielle (IA) pour pallier de telles imperfections, et celle-ci a fait ses preuves. Ainsi, la production de grains ne peut faire bande à part et le recours à l’IA est devenu inéluctable.
Un levier dans la lutte contre les ravageurs
En effet, l’IA peut permettre de modéliser une grande quantité de données collectées par différentes sources et favoriser ainsi une meilleure analyse des tendances et une prédiction plus robuste des infestations futures.
Là où l’humain rencontre souvent des limites dans l’identification d’espèces au champ, l’IA peut le faire de façon instantanée. Elle peut renseigner simultanément sur l’abondance de l’espèce, leur répartition dans l’espace, les différents stades phénologiques des cultures, etc. Intégrée à certaines applications numériques, l’IA génère des informations en temps réel sur les insectes ravageurs, permettant ainsi au producteur ou au conseiller d’effectuer le suivi en continu et à n’importe quel moment. Ce type d’information permet une meilleure prise de décision pour, par exemple, optimiser l’utilisation des pesticides ou d’autres moyens de lutte grâce aux connaissances améliorées sur les cycles de vie des ravageurs et sur les conditions environnementales adéquates.
Identification des ravageurs
Il est parfois difficile de bien reconnaître les insectes. Le recours à des applications numériques de reconnaissance d’insectes agricoles, comme « Seek » par « iNaturalist » et « Picture Insect », peut aider à une meilleure identification des espèces. Cependant, ces applications génériques ne sont pas toujours adaptées au contexte québécois et certaines fonctionnalités payantes rendent leur fiabilité relativement faible. Par ailleurs, certains projets de développement d’applications numériques ont été entrepris pour les grandes cultures au Québec. À titre d’exemple, « IAIA » – pour « identification automatique des insectes agricoles » – a été développé en 2019 par Julien Saguez, chercheur en biosurveillance au CÉROM. Selon M. Saguez, même si l’application est performante pour identifier une vingtaine d’espèces d’insectes agricoles, elle n’a pu être mise à la disposition des utilisateurs, car il aurait fallu plus de financement pour ajouter de nouvelles fonctionnalités et accroître le nombre d’espèces identifiables par l’application. C’est une occasion manquée de mettre à contribution l’IA dans l’identification rapide des insectes.
Autre exemple concret : les pièges à phéromones automatisés
Dans le contexte actuel de changement climatique, l’arrivée et la recrudescence de certains ravageurs nécessitent un dépistage plus précis et plus fréquent, ce qui n’est pas toujours possible avec les méthodes classiques. Depuis 2017, le CÉROM a commencé l’essai et l’utilisation de pièges automatisés dans le cadre du Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) Grandes cultures pour la capture et la surveillance de trois espèces : le ver-gris noir, la légionnaire uniponctuée et le VGOH. De nouvelles espèces, comme la chrysomèle des racines du maïs, ont été ajoutées en 2024. Grâce aux composants électroniques et au concept de l’apprentissage automatique, ces pièges sont capables d’identifier et de compter automatiquement et quotidiennement les papillons capturés. Ainsi, ils permettent de prédire plus finement les pics de population.1 Ces pièges peuvent donc être considérés comme un outil de prévention permettant de renforcer l’adoption des principes de gestion intégrée des ennemis des cultures (amélioration des dépistages et des interventions) afin d’optimiser l’usage des pesticides.
Défis
L’IA constitue un levier dans la gestion efficace et durable des ravageurs, tant à moyen qu’à long terme. Cependant, le défi réside dans le développement des algorithmes de reconnaissance, qui prend énormément de temps et d’expertise avant de rendre fonctionnelle l’IA.
1. Saguez, J. (2019). « Pièges automatisés : l’intelligence artificielle en appui à la surveillance des grandes cultures », Grains, 29 (5), pp. 8-9.