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Au moment d’écrire ces lignes, la table est presque mise pour les nouvelles récoltes sud-américaines. Au Brésil, le battage du soya est quasiment achevé, et la deuxième récolte de maïs safrinha, qui représente les trois quarts de la production nationale, est à mi-chemin. En Argentine, le battage a démarré à grande vitesse pour la fève et le maïs. On peut donc tracer un portrait global.
La saison a été très favorable au soya brésilien, avec d’abondantes pluies tout au long de la saison. Le résultat est une production record estimée à 154 millions de tonnes (Mt). Le seul problème est dû aux précipitations ininterrompues qui ont retardé le battage de la fève. Les pluies n’ont pas affecté le soya, mais elles ont retardé les semis du maïs safrinha. Le rendement du maïs dépendra de la fin de la saison des pluies. Si les pluies se poursuivent jusqu’au début de mai, le rendement sera très bon; sinon, il sera moyen. La production brésilienne de maïs, qui pourrait atteindre un niveau record de 125 Mt selon les estimations, n’est donc pas encore assurée. Mais compte tenu des pluies qui se sont poursuivies jusqu’à la mi-avril, on peut d’ores et déjà exclure un scénario désastreux similaire à celui de 2021 alors que le Brésil avait eu une récolte de maïs de 87 Mt. Même si la saison des pluies s’achève avant la fin d’avril et que le rendement n’atteint pas son plein potentiel, la production brésilienne de maïs sera bonne. Au pire, elle atteindrait le niveau de la récolte de l’an passé, qui avait été un record avec 116 Mt.
Le portrait de l’Argentine est carrément à l’opposé de celui du Brésil. L’Argentine a souffert de la sécheresse tout au long de la saison. Selon les estimations, les productions de maïs et de soya devraient chuter de 26 % et 39 %, respectivement, atteignant 37 Mt et 27 Mt. Ces prévisions du département de l’Agriculture des États-Unis (USDA) pourraient toutefois s’avérer optimistes, surtout en ce qui concerne la fève, qui a été dévastée par le manque d’eau. En effet, la Bourse des grains de Rosario a abaissé son estimation de la production de soya à 23 Mt – la Bourse indique qu’une partie des superficies ensemencées ne sera même pas récoltée.
La progression phénoménale du Brésil
Le Brésil a connu une progression phénoménale de sa production de soya au cours des deux dernières décennies, et plus récemment, c’est la deuxième récolte de maïs qui a eu une croissance fulgurante. En effet, la superficie ensemencée en grains a augmenté de 3 % à 5 % chaque année au cours des 20 dernières années. Par conséquent, le pays est devenu le premier exportateur mondial de soya, loin devant les États-Unis. Et cette année, le Brésil pourrait même ravir aux États-Unis la première place mondiale pour ce qui est des exportations de maïs. Le développement des infrastructures a suivi l’augmentation de la production : le Brésil est capable d’exporter 16 Mt de grains par mois!
Le parcours de l’agriculture de l’Argentine a été moins spectaculaire que celui de son voisin, principalement en raison des politiques économiques défaillantes. Il n’en demeure pas moins que l’Argentine est le troisième exportateur mondial de maïs, et le premier exportateur de tourteau de soya (les tarifs douaniers privilégient la vente de tourteau).
Le marché mondial des grains est en train de s’ajuster à la réalité sud-américaine. D’une part, on a un raz-de-marée de soya brésilien, qui sera suivi à partir de juillet par un flot de maïs. D’autre part, les exportations argentines de maïs et de tourteau de soya seront en forte baisse. Dans une certaine mesure, la production record de grains au Brésil est contrebalancée par une récolte médiocre en Argentine. Les exportations de tourteau de soya de l’Argentine vont chuter – en fait les usines de trituration argentines vont devoir importer de la fève du Paraguay et du Brésil afin de maintenir leurs opérations!
Maintenant que le portrait des récoltes est établi pour l’Amérique du Sud, toute l’attention du marché est portée sur les cultures aux États-Unis et la progression des semis. Les intentions d’ensemencement indiquent que la superficie américaine du soya sera inchangée par rapport à l’an passé, avec 87,5 millions d’acres (Ma), alors que celle du maïs va augmenter de 3,8 % pour s’établir à 92 Ma. Il faudra voir au cours des prochaines semaines si ces chiffres sont confirmés.