Grandes cultures 22 novembre 2024

535 hectares sans moissonneuse-batteuse

Dans les fermes spécialisées en grandes cultures de plus de 500 hectares, posséder sa propre ­moissonneuse-batteuse va de soi. Sauf chez les Péloquin, de la Ferme de Ste-Victoire, à Sainte-Victoire-de-Sorel, en Montérégie. 

Après avoir aligné tous les chiffres, Renaud Péloquin et sa sœur Maude ont réglé assez rapidement le dilemme de la moissonneuse-batteuse : ils n’en veulent pas et confient toute la récolte des 535 hectares à un forfaitaire.

« Je fais partie d’un groupe de gestion. On compare nos chiffres avec les autres producteurs de notre taille, et tous les ans, on bat le groupe de tête pour le poste de dépense ­associé à la récolte. Financièrement, ça parle tout le temps », dit celui qui détient une formation universitaire en ­agroéconomie, et dont la ferme a remporté le Prix de la relève agricole, le 18 novembre.

Renaud Péloquin tire plus d’avantages à travailler sur les chiffres dans le bureau que de travailler dans le garage. Photo : Gracieuseté de la Ferme de Ste-Victoire

Les Péloquin n’ont jamais conduit de moissonneuse-­batteuse. Lorsqu’ils cultivaient 220 hectares, toute la récolte était déjà entre les mains de leur forfaitaire. Lorsqu’ils ont acquis une deuxième entreprise, en 2010, qui a doublé les superficies, ils ont conservé la même stratégie pour une question financière, mais aussi en raison de l’excellent lien qu’ils ont avec leur forfaitaire. Quatorze ans plus tard, le constat est toujours positif. 

La valeur de calculer

Renaud l’avoue candidement :  la mécanique n’a jamais été sa passion. Même si Maude conduit les tracteurs et le camion 10 roues, la mécanique n’est pas non plus sa tasse de thé.

Les chiffres nous intéressent plus que la mécanique. On aime mieux passer du temps dans le bureau que dans le garage. Avec ma sœur, qui est comptable, on connaît vraiment nos coûts.

Renaud Péloquin, Ferme de Ste-Victoire

Ils ont religieusement comparé leurs coûts de forfait à ceux de tout récolter eux-mêmes, qui incluraient les paiements d’une batteuse usagée, d’un débardeur à grain, le carburant, le salaire de trois employés et l’entretien de ladite batteuse. « L’entretien, c’est là que ça rattrape les gars. J’en connais plusieurs qui envoient leur batteuse au concessionnaire pour un entretien de A à Z. Pour ceux qui sont en bas de 500 ha, je le vois, ça leur coûte beaucoup plus cher de posséder leur batteuse que de donner ça à forfait », ­mentionne Renaud. Il nuance cependant ses propos en indiquant qu’un producteur, capable de tout réparer lui-même, à faible coût, peut effectivement rentabiliser l’achat d’une ­moissonneuse-batteuse usagée, même pour une superficie moindre. 

La patience est de mise

Il n’y a pas que des avantages à ne pas avoir de batteuse. Attendre après son forfaitaire lorsque les conditions sont propices peut aiguiser la patience. Les voisins des Péloquin qui ont leur propre équipement terminent une semaine avant eux, en moyenne. Par contre, en donnant la récolte à forfait, cela permet d’exécuter les travaux de sol en même temps que la récolte. « Quand il récoltait le soya, j’avais le temps de semer mon blé d’automne. Si j’avais eu ma propre batteuse, je n’aurais pas semé le blé dans d’aussi bonnes conditions », souligne Renaud. « Le seul gros bémol avec le forfait, argue-t-il, c’est la compaction. On ne peut pas obliger notre forfaitaire à laisser les grain carts en bout de champ. Il serait trop ralenti. Et la compaction, ça paraît sur les rendements. »

Au printemps, par contre, pas de forfait pour les Péloquin. Ils effectuent leurs semis eux-mêmes, avec deux planteurs et un semoir. Terminer les semis une semaine plus tôt fait une plus grande différence sur la profitabilité que de terminer les récoltes une semaine plus tôt, estiment-ils.