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Gabriel Cossette, l’une des figures de proue du syndicalisme sur les chantiers de bûcherons, s’est éteint le 7 septembre. Il était âgé de 91 ans.
M. Cossette a grandi à la ferme de ses parents à Saint-Narcisse, en Mauricie. Âgé de 16 ans à la mort de son père, il a repris avec ses frères l’exploitation agricole en travaillant d’arrache-pied pour joindre les deux bouts. « Des années misérables où les fins de mois arrivaient trop vite. Dans ce temps-là, ils risquaient à tout moment de perdre la terre qu’ils louaient », se remémore son épouse des 64 dernières années, Pauline Tessier.
Comme le voulait la coutume de l’époque, plusieurs cultivateurs prenaient le chemin des camps de bûcherons l’hiver venu. Le jeune Gabriel ne faisait pas exception à la règle.
À 18 ans, il a commencé à se frotter au rude métier de bûcheron. Il a vite constaté que les conditions de travail étaient exécrables sur les chantiers. « Des heures de travail interminables pour un salaire misérable, et c’est sans compter les patrons qui en voulaient toujours plus », raconte son épouse.
En 1940, le salaire d’un bûcheron pouvait atteindre 45 $ par mois pour 26 jours de travail, dépendamment de l’expérience du travailleur.
Selon Raymonde Beaudoin, auteure du livre La vie dans les camps de bûcherons au temps de la pitoune, les conditions de travail sur les chantiers ont été difficiles pendant de nombreuses années : « Le froid, le manque d’hygiène dans les camps et les accidents fréquents faisaient partie de la dure réalité des bûcherons. Les hommes travaillaient d’une noirceur à l’autre. »
Après quelques hivers sur les chantiers, Gabriel a décidé de s’impliquer activement dans sa communauté pour améliorer les conditions de vie des jeunes paysans, en fondant la première cellule de la Jeunesse agricole catholique (JAC) dans la paroisse de Saint-Adelphe.
Leader naturel et fort de son expérience sur les chantiers de bûcherons, il s’est fait remarquer par l’Union catholique des cultivateurs (UCC) lors d’ateliers-conférences qu’il animait. « L’UCC lui a confié le mandat le plus exigeant de sa vie, celui de parcourir les chantiers de la province dans le but de persuader les bûcherons de se regrouper et de mettre leurs forces en commun », raconte son épouse.
Caché dans le foin
Mme Tessier estime que la vie de son mari propagandiste a été mise en danger à de nombreuses reprises. « Les boss de chantiers ne l’aimaient pas. Gabriel se cachait dans les bottes de foin pour ne pas se faire voir par eux. » Malgré les menaces, altercations et conditions de voyage difficiles, M. Cossette ne s’est jamais laissé distraire de son objectif de servir les travailleurs et d’améliorer leurs conditions de travail. « Le respect de l’être humain a toujours été sa principale motivation », confie son épouse.
Quelques années plus tard, Gabriel Cossette a été aux premières loges lors de la création de chantiers coopératifs à Trois-Rivières, qui permettaient aux bûcherons d’obtenir des contrats directs des compagnies forestières. Sa contribution a eu une incidence significative sur l’amélioration de la vie des bûcherons, tant au niveau moral, social et qu’économique.
Dans les années 1950, de nouvelles normes ont été instaurées dans les campements et les conditions se sont améliorées au fil du temps. « Le travail de l’UCC auprès des industries forestières et du gouvernement a été salutaire dans l’amélioration de la santé et de la sécurité sur les chantiers de bûcherons », estime l’auteure Raymonde Beaudoin.
Gabriel Cossette a consacré toute sa vie à la défense et à la promotion du monde agricole et forestier et a poursuivi sa carrière au sein de l’Union des producteurs agricoles pendant de nombreuses années. Son leadership et son intégrité ont été de nombreuses fois soulignés par ses confrères et consœurs.
Audrey Simard, collaboration spéciale
Ce texte est paru dans l’édition de novembre 2020 du magazine Forêts de chez nous.