Chèvres 15 juillet 2024

Un des producteurs laitiers caprins les plus performants songe à vendre

Baptiste Cinter n’installe pas encore d’affiche à vendre sur la devanture de sa ferme, mais il n’hésiterait pas à mettre la clé sous la porte si une occasion se ­présentait à lui. 

« Si, demain, quelqu’un m’appelle et me dit qu’il ramasse tout, c’est sûr que je vends. Peut-être un gros qui voudrait grossir, je suis flexible. S’il veut tout acheter, la ferme avec, je suis open », dit-il. 

Pourtant, sa ferme, à Sainte-Élizabeth-de-Warwick, dans le Centre-du-Québec, se porte bien. Avec 250 chèvres en lactation, il produit en moyenne plus de 1 000 litres par chèvre. La moyenne du Québec se situait à 670 litres par chèvre selon le dernier portrait du secteur, effectué par le Centre d’étude sur les coûts de production en agriculture, en 2020. 

Le problème, c’est que depuis les cinq dernières années, je n’ai pas l’impression d’avoir une grosse lumière au bout du tunnel. Alors, je ne pense pas ­réinvestir. Je pourrais, parce que je pense qu’il y a encore de la place pour du lait au Québec, mais vu les coûts de main-d’œuvre, d’employés et le contexte tout le temps [incertain …].

Baptiste Cinter, producteur laitier caprin

Lors de la dernière assemblée générale annuelle, en juin, des producteurs laitiers caprins se sont plaints de ne pas avoir reçu l’augmentation de prix de la Commission canadienne du lait (CCL), en vigueur depuis le mois de mai, en raison de négociations avec les acheteurs. Il fallait s’entendre sur une augmentation en fonction d’un pourcentage, 1,77 %, ou d’un prix, 1,53 $ l’hectolitre. Le prix à l’hectolitre proposé par la CCL est calqué sur celui de la vache laitière, tandis que les coûts de production des éleveurs laitiers caprins sont nettement supérieurs à ceux dans la vache. Historiquement, les éleveurs laitiers caprins étaient payés en fonction du pourcentage. « C’est ça, le problème des chèvres. Dans les vaches, quand ils disent quelque chose, il n’y a pas besoin de tout le temps renégocier quelque chose qui était normalement entendu », indique ce dernier. 

En date du 9 juillet, la question n’était toujours pas réglée. « On n’est jamais pris au sérieux comme les grosses productions. C’est dommage que ce soit comme ça, parce que ça encouragerait les ­producteurs », dit-il. 

Rappelons que l’augmentation de prix de la CCL a été accordée dans une entente de principe entre les producteurs et leurs acheteurs, mais que la convention de mise en marché 2022-2025 n’a pas encore été homologuée par la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec. Les Producteurs de lait de chèvre du Québec n’ont pas encore rempli la condition voulant qu’un projet de règlement structurant l’offre de volumes des producteurs soit proposé aux acheteurs.

Les coûts de transport explosent

Également transporteur de lait de chèvre, Baptiste Cinter mentionne que les coûts de transport explosent en raison de la diminution du nombre de producteurs année après année. « On est payés au litre [dans] le transport, donc moins on transporte de litres, plus il faut charger cher du litre, sans compter les équipements, les véhicules, le diésel, les salaires, etc. », indique-t-il. Le coût de transport vaut plus du double du montant prépandémique. « Avant, on était 6-7 ¢/l et là, on va péter le 15-16 ¢/l. C’est pour ça qu’on aimerait qu’il y ait du monde qui embarque, mais c’est trop cher, ce n’est plus possible », souligne l’éleveur.