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Réduire les émissions de méthane d’un troupeau tout en améliorant sa productivité globale – soit davantage de lait ou de viande selon le cas –, c’est le défi paradoxal que devront relever dans les prochaines années les producteurs bovins et laitiers du Québec.
La solution consiste principalement à adapter le régime alimentaire des animaux et à améliorer leur bien-être. « Avoir une bonne stratégie alimentaire, analyser les ingrédients disponibles à la ferme, répondre aux besoins des animaux, se donner une bonne régie de reproduction et favoriser l’alimentation au pâturage, ce sont tous des éléments qui permettent d’aller chercher des animaux performants qui vont produire plus de viande ou de lait tout en rejetant moins de méthane dans l’atmosphère », explique Élizabeth Lepage, coordonnatrice de projet au Centre du développement du porc du Québec.
Dans ses présentations sur le sujet, l’agronome s’assure que les producteurs comprennent bien le processus de production du méthane à l’intérieur de l’animal afin de pouvoir développer une stratégie alimentaire cohérente.
La stratégie a cependant ses limites puisque des rations riches en concentré peuvent poser un problème pour la santé de l’animal en augmentant le risque d’acidose ruminale.
« Pas de recette magique »
« Il n’y a pas de recette magique, prévient Élizabeth Lepage. Si tu exploites une ferme au nord du Lac-Saint-Jean et que tu n’as pas de grains, juste du fourrage, tu dois travailler sur d’autres éléments comme l’alimentation au pâturage, par exemple. C’est une stratégie que je recommande fortement parce que ça permet aussi de réduire les émissions de CO2. Tu fais travailler une vache au lieu d’un tracteur, et en plus, l’herbe est plus digestible que le foin sec », dit-elle en rappelant le principe voulant que les rations plus digestibles contribuent à la réduction des émissions de méthane.
L’amélioration de l’ingestion des aliments par le bétail peut d’ailleurs être obtenue de diverses façons, notamment en s’assurant d’avoir un fourrage bien conservé et de qualité; en fauchant ses fourrages à la hauteur optimale; en améliorant la régie des mangeoires (repoussage, nettoyage, séquence alimentaire, refus); en ayant un bon débit d’eau et une eau de qualité; en améliorant le confort et le bien-être des animaux, etc.
Autres avenues
La revalorisation des déchets comestibles est également une avenue à envisager lorsque ces produits sont disponibles et à proximité. « Ce sont souvent des ingrédients qui ne coûtent pas cher », poursuit l’agronome en évoquant la drêche de brasserie ou de distillerie, les grains déclassés ou les surplus de légumes provenant de fermes maraîchères environnantes.
Du côté des cultures fourragères multiespèces, Élizabeth Lepage suggère aussi d’introduire des variétés contenant des tanins, comme le lotier corniculé, le sainfoin ou la chicorée, par exemple. L’agronome évoque une étude où un troupeau de vaches laitières au pâturage dans un champ à 100 % de lotier a été comparé à un autre troupeau broutant dans un champ à 100 % de ray-grass. Résultat : une réduction de 17 % des émissions de méthane avait été enregistrée dans le troupeau expérimental.
Déjà utilisé par de nombreux producteurs de vaches/veaux, l’antimicrobien Monensin est destiné à améliorer la digestibilité de la fibre et l’efficacité alimentaire des bovins. Les études révèlent qu’il permet également une réduction du méthane de 15 %, mais il n’est pas encore démontré que ses effets sont persistants à long terme.
Enfin, l’introduction d’algues rouges dans le régime alimentaire offre des avenues prometteuses avec des taux de réduction de méthane pouvant aller de 25 % à 70 % selon les études, mais l’approvisionnement de la matière sur une base commerciale est complexe. De plus, des recherches sont nécessaires pour s’assurer que ces produits sont sécuritaires pour les humains et qu’ils n’affectent pas négativement la productivité des animaux.