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L’éleveur Bryan Maloney, de Thurso, en Outaouais, se dit le plus détesté des producteurs en raison de ses constats et de ses discussions associées aux lacunes en gestion des éleveurs de bovins. Améliorer la gestion et la rentabilité est l’une des solutions, selon lui, pour renverser la décroissance notoire de la production bovine, notamment dans l’élevage de veaux d’embouche. Rappelons que le cheptel de vaches de boucherie destinées à la production de veaux d’embouche est passé de 214 000 vaches en 2010 à 124 000 vaches enregistrées au Programme d’assurance stabilisation des revenus agricoles (ASRA) du gouvernement québécois, en 2022.
M. Maloney remarque que de façon globale, les profits et les pratiques sont des sujets trop souvent tabous. « La vérité, c’est qu’il y a des fermes inefficaces, ou trop petites. Beaucoup d’éleveurs n’ont pas l’esprit de business des cattlemen. Si on ne gère pas l’élevage comme un business, ça devient un passe-temps. Il y a des fermes qui gèrent comme un passe-temps et qui sont sur l’ASRA depuis trois générations, et ça reste comme ça. Mais est-ce le rôle de la société de payer pour le passe-temps? Quand je dis ouvertement ces choses, c’est pour ça que je suis le plus détesté des producteurs de bovins », fait-il remarquer.
Un modèle à réformer
Paul Villeneuve, qui a conseillé une soixantaine de fermes ces dernières années au sein du groupe de professionnels Bovi-Expert, croit aussi qu’il est temps pour plusieurs producteurs vache-veau d’améliorer la gestion. « Je parle avec d’autres conseillers et on est pas mal tous d’accord. Il y a beaucoup de producteurs démoralisés. Dans le vache-veau, on a un modèle qui s’en va à l’agonie. Les coûts de production de plusieurs sont trop hauts; ils doivent couper partout pour survivre. Mais il y a beaucoup des fermes où il y a des choses à améliorer, par exemple, ce n’est pas encore rentré chez tous les producteurs de produire des fourrages à moindre coût et de meilleure qualité », explique le conseiller, qui est lui-même producteur de veaux d’embouche en Estrie.
Il juge qu’il est temps de réformer le modèle. « Nous sommes les seuls qui ont un programme d’aide comme l’ASRA, mais on s’en va quand même dans le trou [chez la majorité des élevages vache-veau]. Il y a quelque chose qui ne marche pas! Notre modèle d’aide a déjà été très bien et le fondement est correct, mais il faut l’adapter à la réalité d’aujourd’hui si on veut que nos jeunes embarquent. »
De son côté, Bryan Maloney, qui est conseiller en gestion des pâturages, indique que des améliorations de régie permettraient à des éleveurs de vache-veau d’aller chercher plus d’argent. « La gestion du pâturage, c’est une partie mal comprise. Chaque journée de plus que tu peux garder les animaux au pâturage, c’est quelques dollars de plus que tu sauves par animal. Si, au final, tu les gardes 60 jours de plus par année au pâturage, ça devient énorme », affirme-t-il.
Le futur
« Il ne faut pas dire que tout n’est pas bon. Ce n’est pas mon message, souligne Paul Villeneuve. Dans le vache-veau, je crois qu’il faut mettre en place un système simple de production des fourrages, augmenter le rendement et la qualité en faisant mieux travailler nos plantes et nos sols et diminuer nos coûts en utilisant la machinerie plus efficacement. Il y a des fermes qui vont très bien au niveau financier. Il faut partir avec ça et s’en inspirer », indique-t-il. Bryan Maloney non plus ne se veut pas négatif. « J’ai la chance de voyager à travers le Québec, et des producteurs de bovins qui font de l’argent, il y en a. Dans chaque région, je vois de belles opportunités pour développer des élevages », indique-t-il.
Vision gouvernementale?
Bryan Maloney ajoute que le gouvernement provincial devrait manifester sa vision à long terme pour le secteur bovin. « C’est quoi, l’objectif de notre gouvernement? Maintenir la production juste pour empêcher les branches de pousser dans les régions? Ou avoir l’objectif clair d’augmenter la production de bœuf et de la valoriser, selon nos régions, en encouragent la production vache-veau et la semi-finition dans les régions où on a de l’herbe, et de concentrer la finition au sud, où on a du maïs? », recommande-t-il.
L’avantage de connaître les marchés
Les fermes vache-veau doivent réduire leurs frais fixes et s’intéresser davantage à l’analyse des marchés, croit l’éleveur et conseiller Bryan Maloney. « Si les producteurs consacraient 30 minutes par semaine à connaître les marchés, comprendre quand vendre et où vendre tel type de veau, ça ferait une grosse différence », est-il persuadé.
À Saint-Liboire, en Montérégie, Mathieu Klassen exploite un parc d’engraissement de 6 000 bouvillons annuellement. Son élevage est viable affirme-t-il, ce qui motive sa famille et lui à investir dans leurs infrastructures. La Terre lui a demandé quelle est la plus importante variable de leur succès. « C’est la mise en marché. Pour l’achat et la vente des animaux, il faut que tu sois au courant », répond-il.
Ensuite, il y a la génétique, ajoute Bryan Maloney. « Il faut se demander si on a les bons animaux au bon endroit. Si on est en Abitibi, par exemple, qu’on veut des vaches avec des gros frame, qui vont donner un gros veau et donner gros du lait et qu’on va les laisser dehors tout l’hiver, et qu’on espère avoir du succès avec ça? Non, on n’en aura pas », argue-t-il.