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LA VISITATION-DE-YAMASKA — Si la possibilité lui était offerte de repasser par le rang Saint-Joseph aujourd’hui, Justin Courchesne, peinerait à s’y reconnaître. La ferme laitière qu’il a fondée a complètement changé de vocation dans le but d’améliorer la qualité de vie de la nouvelle génération de producteurs. Ce virage ne s’est toutefois pas fait sans épreuves.
Fiche technique Nom de la ferme : Spécialité : Année de fondation : Noms des propriétaires : Nombre de générations : Superficie en culture : Cheptel : |
Depuis deux ans, à La Visitation-de-Yamaska, dans le Centre-du-Québec, Olivier Courchesne a donné une nouvelle vocation à la Ferme Justina et Fils, fondée il y a plus de 75 ans par son grand-père. Le troupeau de vaches laitières a disparu et a été remplacé par 20 000 poussins.
Lorsqu’il a obtenu son diplôme de l’Institut de technologie agroalimentaire de Saint-Hyacinthe en 2010, le jeune homme était pourtant motivé à prendre la relève de ses parents, Jean Courchesne et Élise Champagne, comme eux-mêmes l’avaient fait en 1983, en poursuivant le rêve de Justin.
En 2018, le destin a toutefois contrecarré les plans de la famille lorsque Jean a vu ses capacités physiques amoindries grandement à la suite de problèmes de santé qui l’ont laissé aphasique. « Olivier aimait les animaux comme nous, mais là, on tombait deux au lieu de trois pour les gros travaux physiques. Il trouvait ça très demandant, même si on était bien organisés », se rappelle sa mère.
Lui-même à la veille de fonder sa propre famille avec sa conjointe, Kelly Sylvestre, qui travaillait à l’extérieur dans un cabinet de comptables, Olivier ne voyait pas le bout de cette aventure, qu’il n’avait pas imaginée ainsi. « Je commençais à en avoir assez. Je n’avais jamais de congé. Il y avait assez d’ouvrage pour un autre employé, mais on n’était pas assez gros pour se le payer », se remémore Olivier.
Pour réduire son fardeau et s’accorder une meilleure qualité de vie, le jeune producteur propose de donner une nouvelle orientation à la ferme. L’idée est reçue avec réticence dans un premier temps par ses parents. « Des poulets? On n’était pas tant alignés vers ça au départ, reconnaît Élise, mais à force d’en parler, Jean et moi, on s’est dit qu’on avait eu la chance de faire ce qu’on aimait dans la vie et qu’on pouvait considérer qu’Olivier y avait droit aussi. Ça nous faisait de la peine, mais nous, on était en fin de carrière et on pouvait concevoir que la ferme puisse continuer sous une autre forme. »
En novembre 2019, la décision a été prise de vendre le quota de lait et les équipements pour redémarrer la Ferme Justina et Fils sur de nouvelles bases en construisant un poulailler. C’était évidemment sans compter sur une certaine pandémie qui s’est pointée quelques mois plus tard, à la mi-mars.
Dernier arrivé, premier coupé
« C’était la panique, et la fédération ne donnait plus de quota. Comme j’étais le dernier arrivé, j’ai été le premier à être coupé. J’ai investi 750 000 $ pour acheter une génératrice et construire mon poulailler, mais il est resté vide pendant trois mois », se rappelle le nouveau producteur avicole, qui a pu compter alors sur l’appui financier et moral de ses parents pour passer à travers cette nouvelle épreuve. Ce sont aussi les contacts de son père, longtemps administrateur à la coopérative Covris, qui lui ont permis de louer des quotas pour partir enfin son premier élevage de poulets sans antibiotiques en juillet 2020.
Deux ans plus tard, Olivier Courchesne respire mieux tout en étant réaliste. « Sans l’aide de mes parents, je n’aurais pas été capable de faire ça, reconnaît-il. Un jeune qui veut démarrer dans la volaille, c’est impossible, car les quotas
coûtent tellement cher. Dans l’industrie laitière, quand tu fais 1 $ en revenus, il te reste 40 cennes dans tes poches. Avec le poulet, il t’en reste juste vingt. Si j’avais juste regardé la rentabilité, je n’aurais pas été vers là. Mais aujourd’hui, j’ai plus de temps pour moi. Et puis avec une production sans antibiotiques, le poulailler doit rester vide durant trois semaines. Ça me donne un peu de répit. L’hiver, je fais du déneigement; l’automne, du battage pour d’autres producteurs. Pour la qualité de vie, je peux te garantir que ç’a été un bon move », assure le père de deux jeunes enfants, Nathan et Flavie.
Équipement techno S’il a réussi à décrocher la 2e position de l’EPEF (indice européen d’efficacité de production) en 2020-2021 dans le poulet sans antibiotiques chez Sollio Agriculture dès sa première année de production avicole, Olivier Courchesne estime que c’est en raison de la passion et du sérieux qu’il a mis dans son travail ainsi qu’à son poulailler fraîchement construit, qui a maximisé ses performances. L’application Agrimesh lui permet d’ailleurs de confier la gestion complète des équipements, par exemple la ventilation, l’éclairage ou le taux de CO2, à des capteurs qui interagissent pour obtenir les conditions optimales dans les bâtiments, et ce, en temps réel. « Tout est relié à mon téléphone, explique le producteur. C’est un système qui apprend de ses erreurs. Il se teste tout le temps, ce qui fait qu’il ne reproduira jamais [la même erreur]. » |
3 conseils pour se lancer dans la production avicole
- Visiter plusieurs fermes
C’est ce que suggère Olivier Courchesne.
« C’est comme ça que j’ai découvert l’application Agrimesh. Ce n’est pas toujours facile parce que dans l’industrie, les producteurs hésitent à transmettre leurs connaissances. On dirait que tout le monde est en compétition. C’est ce que je trouve plate. »
- Posséder son propre quota
« L’idéal, c’est de posséder ton propre quota parce que les locations vont éventuellement disparaître. Traditionnellement, le couvoir, la meunerie et l’abattoir te louaient des quotas pour remplir ton poulailler, mais là, ils veulent limiter les locations à 40 % et les baisser graduellement par la suite. Ce n’est pas comme ça qu’on va attirer la relève, déjà que la moyenne d’âge des éleveurs au Québec est à 57 ans actuellement. »
- Avoir de bonnes relations
« Entretiens de bonnes relations avec les intervenants, car ce sont eux qui vont t’aider quand tu en auras besoin. Ce qui est dommage dans l’élevage de la volaille, c’est qu’il n’y a pas de formation qui se donne. Il faut s’entourer de gens qui connaissent ça ou avoir un bon ami producteur de poulets qui peut t’aider, mais ça, c’est assez rare. »
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