Un projet de vie provoqué par la pandémie

SAINT-PASCAL — Bien qu’il appartienne à une longue lignée d’agriculteurs, Olivier Bissonnette-Lavoie n’aurait jamais cru se lancer un jour dans la production maraîchère. Après avoir étudié en communication et en science politique, il voulait plutôt devenir professeur au collégial. Puis, le vent a tourné.

Au bout d’une longue montée, les bâtiments émergent lentement de la brume opaque comme un petit village gaulois. C’est là qu’Olivier Bissonnette-Lavoie et Maha Farah Elmir ont démarré une production de légumes d’hiver en 2021. C’est aussi là que Claude Lavoie et Diane Bissonnette, les parents d’Olivier, ont élu domicile, il y a six ans, après avoir vendu leur ferme porcine du 5e Rang. L’atmosphère est chaleureuse dans la maison ancestrale que le couple de jeunes parents est en train de rénover. Du haut de ses deux ans et demi, le petit Youssef s’invite dans la conversation pendant que grand-papa Claude évoque les racines agricoles de ses ancêtres. 

Claude appartient à la 4e génération de la famille Lavoie sur la terre du 5e Rang. C’est son père, Paul, qui, en 1966, a converti la ferme laitière en production porcine. « Quand j’ai pris officiellement la relève, en 1988, on produisait 4 000 porcs par année avec 300 truies », raconte-t-il en précisant n’avoir jamais eu le désir de créer une trop grande entreprise. Lorsqu’il l’a vendue, en 2018, elle comptait à peine une soixantaine de truies de plus. « Durant les meilleures années, j’ai produit jusqu’à 9 200 porcs par année », souligne tout de même M. Lavoie.

La vente

Pendant qu’il était impliqué en tant que président du Syndicat des producteurs de porcs de la Côte-du-Sud, Claude a pu compter sur le soutien d’employés de confiance cumulant, pour certains, plus de 30 années de service au sein de l’entreprise. C’est à l’un de ses vétérans, Michel Lavoie, qu’il a vendu la ferme, il y a six ans. Claude et Diane ont alors décidé de s’établir sur les 100 hectares de terres de la route 230 dont ils étaient propriétaires depuis 2013. Avant de les acheter, ils les louaient pour la fertilisation ainsi que pour la culture d’orge et d’avoine, qu’ils ajoutaient à la moulée du troupeau porcin.

Olivier a trouvé en Youssef un assistant de choix.

L’appel qui a tout changé

Durant la pandémie, ils ont reçu un appel de leur fils Olivier, qui songeait non seulement à revenir s’établir dans la région avec sa famille, mais aussi à y développer un projet agricole. Aussitôt emballés par l’idée, ils lui ont proposé de venir s’installer sur leurs terres, où se trouvait déjà une grange bovine désaffectée. 

Pour Claude et Diane, cette annonce a mis un baume sur le fait que ni l’un ni l’autre de leurs trois enfants ne souhaitait poursuivre en production porcine. Outre Olivier, Antoine travaille chez Ubisoft et Léa, pour UPA Développement international.

Un projet de vie

« Maha et moi voulions démarrer un projet ensemble qui serait aussi un milieu de vie, mais on ne savait pas lequel », raconte Olivier, qui était alors chargé de cours à l’Université de Montréal. L’agriculture n’était même pas encore une option.

Par un concours de circonstances, Maha, employée dans l’un des nombreux restaurants ayant dû fermer leurs portes en raison de la pandémie, s’est retrouvée sans emploi et a commencé à travailler dans une ferme maraîchère. Olivier y a aussi travaillé.

C’est alors que l’idée qu’ils pourraient faire de l’agriculture leur projet de vie a germé.

Plusieurs fermes maraîchères avaient été lancées au Kamouraska pour vendre des paniers d’été. Nous devions donc trouver un modèle différent. Nous avons choisi celui des paniers de légumes d’hiver.

Maha Farah Elmir, productrice

Les légumes produits durant l’été sont mis en chambre froide à l’automne et vendus de novembre à avril.

Maha s’assure que les plants sont en santé.

Le couple s’est installé à la ferme en 2020 et a commencé à régénérer les sols. L’année suivante, il a entamé la production et transformé la grange en espace de conservation et de manutention pour les légumes. Deux serres se sont ajoutées en 2023. La Ferme des Rhizomes cultive environ cinq hectares, dont plus de la moitié en engrais verts, en incluant les deux serres. « L’an dernier, nous avons approvisionné 105 familles du Kamouraska et nous visons 150 familles en 2024 », ajoute la productrice. L’après-midi tire à sa fin, et ce qui semblait être un village gaulois, deux heures plus tôt, se transforme en un refuge paisible à mesure que l’image de celui-ci s’estompe dans le rétroviseur.

La production en champs et en serre permet d’assurer l’approvisionnement durant les mois d’hiver.

La production en champs et en serre permet d’assurer l’approvisionnement durant les mois d’hiver.

Le bon coup de l’entreprise

Le bon coup de l’entreprise a été de ne pas arriver avec un modèle déjà établi. « On a fait une analyse du milieu et, comme il y avait déjà beaucoup de légumes d’été qui étaient produits, nous avons choisi de combler un manque pour les légumes d’hiver », explique Maha. La complémentarité avec l’offre existante a permis à l’entreprise de trouver sa place et de se développer.  

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Le bon coup de l’entreprise a été de ne pas arriver avec un modèle déjà établi. « On a fait une analyse du milieu et, comme il y avait déjà beaucoup de légumes d’été qui étaient produits, nous avons choisi de combler un manque pour les légumes d’hiver », explique Maha. La complémentarité avec l’offre existante a permis à l’entreprise de trouver sa place et de se développer.

Miser sur un bon entourage

Savoir bien s’entourer est une condition essentielle pour démarrer une production et assurer sa pérennité, selon Olivier Bissonnette-Lavoie. Cela concerne autant la famille que les amis et les personnes-ressources. Il est important de leur faire confiance.

Choisir les meilleurs équipements

Même si cela implique que l’on doive s’endetter un peu plus, il est primordial d’acheter de bons équipements dès le départ. Des équipements en mauvais état ou non performants ralentiront la production et finiront par coûter plus cher, estime Olivier. Même si ce sont des équipements usagers, il faut s’assurer qu’ils correspondent aux besoins à long terme de l’entreprise.

Viser l’autonomie

Une autre bonne façon de démarrer sur des bases solides et de garder le cap à long terme est de viser le plus possible l’autonomie en achetant des équipements qu’on est capable de réparer et d’améliorer soi-même. « Nous avons choisi d’aller vers le bois pour le chauffage pour produire notre matière première et parce qu’on peut réparer soi-même la fournaise au besoin », donne en exemple Maha Farah Elmir.

Fiche technique
Nom de la ferme

Ferme des Rhizomes

Spécialités

Légumes de conservation et verdures

Année de fondation

2021

Noms des propriétaires

Maha Farah Elmir et Olivier Bissonnette-Lavoie

Nombre de générations

5

Superficie en culture

5 hectares

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