Ma famille agricole 10 janvier 2025

L’immense terrain de jeu des abeilles de Rimouski

RIMOUSKI – Les abeilles domestiques du Château Blanc ont accès, à Rimouski, à un immense terrain de jeu : d’immenses pâturages fleuris que favorise cette région moins propice à la production de grandes cultures. Ces fleurs en quantité permettent à l’entreprise de tirer ses revenus uniquement de la vente du miel et de quelques produits dérivés. 

Sur les étagères de la boutique du Château Blanc, un petit pot de miel doré attire l’attention. L’étiquette contraste avec les autres produits de la miellerie. Une ruche y a été dessinée au crayon bleu, autour de laquelle quelques abeilles gravitent, et le nom de l’ancienne entreprise a été conservé : Rucher des Ruest. 

Le pot contient du miel d’opercule, un miel brut, filtré plus tardivement et qui a aussi une texture différente. Ce produit se veut aussi un clin d’œil au fondateur Charles Ruest, qui s’est lancé en apiculture dans les années 1970. Commerçant de Rimouski dans le monde de la musique et de l’électonique, l’entrepreneur avait opté pour l’apiculture comme projet de préretraite. Et il n’était pas le seul, à l’époque, à tenter sa chance. « En feuilletant des documents d’archives, j’ai été surprise de voir à quel point il y avait vraiment beaucoup de ruches à Rimouski au moment du retour à la terre », s’exclame Mireille, petite-fille de Charles Ruest et maintenant propriétaire de l’entreprise dans laquelle œuvrent aussi son mari et l’un de leurs enfants.

Le miel d’opercule est un produit qui se veut un clin d’œil au fondateur Charles Ruest, qui s’est lancé en apiculture dans les années 1970.

Avec quelques ruches à peine, Charles Ruest a ainsi lancé l’entreprise Rucher des Ruest au début des années 1980. Sa fille, Suzanne, et son gendre, Jean-Guy Lechasseur, lui ont d’abord donné un coup demain avant de créer leur propre entreprise, Le Château Blanc, en 1988. Le couple s’est attelé à développer des marchés dans une région peu encline au commerce de proximité. « Ce n’était vraiment pas évident. On n’était pas dans un contexte de produits régionaux », se souvient Suzanne, qui a dû cogner aux portes de toutes les épiceries et y faire des dégustations.  « Une chance que Jean-Guy était là pour m’apporter un soutien moral parce que j’aurais viré de bord », ajoute-t-elle.

Un enjeu à Rimouski

Encore aujourd’hui, le marché de proximité est un défi. La seule épicerie de produits naturels avec qui faisaient affaire quelques fournisseurs locaux a récemment fermé ses portes, et l’instauration d’un marché public a été le fruit de maints rebondissements. « La mise en marché des produits locaux a toujours été un enjeu à Rimouski », rappelle Mireille. « On a plutôt l’habitude de penser que tout ce qui vient d’ailleurs, c’est mieux », ajoute-t-elle. 

Malgré tout, Mireille peut compter sur une centaine de points de vente, incluant ceux de Montréal. Sans hésiter, elle attribue ce succès à la qualité de son miel. « Mon miel est bon parce que les ruches ne bougent pas. Les agriculteurs ici ont tendance à laisser grainer les champs comme les deux grands champs de luzerne en fleurs tout près d’ici », explique-t-elle.

Cette nouvelle génération a permis de procéder à la transition numérique de l’entreprise, qu’on n’avait pas le bagage pour faire. La création du site Web, ça nous a mis sur la map. C’est ça qui fait que l’entreprise rayonne un peu partout.

Jean-Guy Lechasseur

Allergique

Rien ne prédestinait Mireille Lechasseur à un brillant avenir en apiculture. Allergique aux abeilles depuis l’enfance – elle a été désensibilisée depuis –, l’apicultrice ne considère toujours pas le travail dans les ruches comme sa tasse de thé. C’est plutôt son mari, Simon Major, et son père, toujours mobilisé à temps plein durant la belle saison, qui s’occupent des abeilles. 

Suzanne, quant à elle, a dû se retirer un peu dernièrement pour des raisons de santé et regrette de ne pouvoir en faire davantage. « Ce n’est pas l’envie qui manque d’être ici, mais mon corps ne veut plus », avoue-t-elle, émue.

Jean-Guy Lechasseur passe encore beaucoup de temps dans les ruches.

Lors du passage de La Terre de chez nous, des clientes profitaient d’une belle journée de septembre pour faire leur provision de miel pour la saison et goûter à l’hydromiel. Car même si l’entreprise ne se situe pas en ville, la clientèle n’hésite pas à se déplacer. « Ça n’existe pas ailleurs, un miel comme celui qu’on a ici, avec les fleurs qu’on a dans la région, surtout au printemps », répète fièrement Jean-Guy.  

Fait maison

En 1996, Suzanne, formée comme technicienne en diététique et maman à la maison, développe un produit désormais populaire dans la région : le Caramiel. Il s’agit d’une recette de caramel modifiée pour ajouter 30 % de miel. Cette tartinade a permis à l’entreprise de se démarquer. « Un jour, dans mon sous-sol, alors que je m’occupais de mes trois enfants, je me suis dit que j’allais créer quelque chose que les gens allaient aimer. Je ne me serais jamais doutée que ce serait dans l’apiculture que je trouverais », évoque Suzanne. C’est maintenant au tour de Mireille de se charger de la recette. « On s’est améliorés. On a mis des valves pour empoter », explique-t-elle en pointant un grand chaudron. Mireille a également développé un produit « sœur » : le chocomiel, qui marie cette fois le miel et le cacao.

On doit à Suzanne, la fille du fondateur Charles Ruest, la création d’une tartinade alliant miel et caramel.

Le bon coup de l’entreprise

Même si Le Château Blanc était d’abord le nom d’une maison de chambre que Suzanne et Jean-Guy ont jadis détenue, il sied à merveille à l’entreprise apicole qui a pignon sur rang dans une vieille maison blanche en retrait du centre-ville. Son acquisition pour la somme de 25 000 $ à la fin des années 1990 constitue pour la famille Ruest-Lechasseur la meilleure décision prise jusqu’à présent. À l’époque, Suzanne et Jean-Guy faisaient encore l’extraction du miel à Saint-Anaclet, dans le chalet de Charles Ruest, et s’y trouvaient à l’étroit. « La maison était abandonnée, le foin était long, mais la structure tenait bon », se souvient Jean-Guy. Grâce à des matériaux récupérés, la famille a redonné au bâtiment un second souffle. Encore en 2024, des modifications y sont apportées. En plus de représenter un actif pour l’entreprise, la propriété a aussi une valeur ajoutée : des pruniers aux fruits dorés mis à l’honneur avec Prunelle, un hydromel à base de prunes.

Mireille Lechasseur et  Simon Major travaillent à temps plein à développer l’entreprise apicole.
Fiche technique
Nom de la ferme :

Le Chateau Blanc, apiculture

Spécialité :

Apiculture

Année de fondation :

1988

Nom de la propriétaire :

Mireille Lechasseur

Nombre de générations :

4

Superficie en culture :

400 ruches

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