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SAINT-LAMBERT-DE-LAUZON — Une grange à l’abandon est devenue le point de départ d’un ambitieux projet agricole pour la famille Lefebvre, pour qui la complémentarité des talents contribue aujourd’hui au rayonnement tant local qu’international de l’entreprise. Celle-ci combine l’élevage porcin et la fabrication d’équipement destiné à cette production.
La Ferme Aldo a été fondée d’humble manière par Euclide Lefebvre et son épouse, Madeleine Gagné, en 1963. Ils vivaient alors à Montréal et souhaitaient revenir s’installer dans leur patelin natal, plus près de leurs familles respectives, en Beauce. Le couple a alors jeté son dévolu sur une maison et une terre de 20 hectares à Saint-Lambert-de-Lauzon.
C’est un peu par hasard que le projet agricole s’est amorcé. Mécanicien de formation, Euclide Lefebvre a d’abord envisagé de transformer la vieille grange abandonnée sur sa nouvelle propriété en atelier de mécanique automobile. « C’était son rêve d’avoir son entreprise, raconte son fils Alain. Mais pour commencer, il avait trouvé un emploi de mécanicien à l’extérieur. »
Puisque la vieille grange restait vide, les membres de sa famille, des agriculteurs, se sont empressés d’y emmener quelques vaches afin que le bâtiment « serve à quelque chose », rapporte-t-il. Au fil des ans, d’autres vaches se sont ajoutées au troupeau, suivies de quelques cochons, jusqu’à ce que la petite ferme devienne rentable après l’acquisition de quelques terres voisines. « Mes parents réinvestissaient l’argent qu’ils gagnaient dans la ferme. Ils étaient très travaillants et n’ont jamais calculé leurs heures. »
Ce projet imprévu a aussi permis à Euclide d’exploiter ses compétences en mécanique en fabriquant différents appareils pour l’aider dans son travail. « Il construisait des épandeurs à fumier de A à Z. Il nous disait toujours : ‘‘Si c’est fait par du monde, on est capable de le faire’’. Je pense que s’il était né de nos jours, ç’aurait probablement été un ingénieur mécanique », observe celui qui dit avoir hérité de ce petit côté inventif de son père.
Tout ou rien
En 1988, alors qu’ils avaient respectivement 24 et 19 ans, Donald et Alain ont pris la relève de l’entreprise familiale, qui comptait des élevages porcins et une production laitière de 30 vaches. Ils souhaitaient d’abord ne racheter que le volet porcin, mais ils se sont retrouvés, malgré leur jeune âge, propriétaires de tout. « Notre père nous a dit : ‘‘Vous êtes prêts, alors si vous achetez la ferme, c’est tout ou rien’’. Il ne voulait pas être dans nos pattes », se remémore le plus jeune des deux.
Leur frère Nelson s’est joint à eux, deux ans plus tard, pour prendre en main le volet du transport des animaux et de la moulée. À travers les années, les trois frères ont augmenté les superficies en culture et la taille des élevages porcins, en délaissant les vaches. Leur père, Euclide, a continué de les épauler dans leurs décisions et leur travail jusqu’à ce que la santé ne le lui permette plus, en 1995. Il a rendu son dernier souffle récemment.
Puis, en 2004, pour exploiter une passion grandissante pour la productivité des troupeaux, Alain a convaincu ses deux frères d’acquérir Jyga Technologies, un fabricant d’équipement d’alimentation de précision qui connaissait alors des difficultés. « Le propriétaire cherchait des actionnaires, mais on leur a dit : ‘‘On achète tout ou rien’’, et ils ont accepté », raconte l’entrepreneur. Ce projet était risqué, mais il répète combien l’appui et la confiance qu’il a reçus de ses frères a permis de propulser l’entreprise familiale au rang de multinationale quelques années plus tard. En effet, les équipements porcins développés par la filiale Jyga Technologie sont aujourd’hui exportés dans une trentaine de pays à travers le monde.
Une troisième génération en piste
Dans les dernières années, Roxanne et Isabelle, qui sont les filles de Donald, ainsi que Sarah-Maude et Samuel, qui sont les enfants d’Alain, ont intégré l’entreprise dont ils prendront un jour la relève. Ils occupent des postes en comptabilité, en gestion, en ressources humaines et à la direction des ventes.
Alexis et Félix, les plus jeunes fils de Donald et d’Alain, pourraient également se joindre à l’entreprise après leurs études. « On les laisse explorer différentes choses. Ils ont travaillé dans les élevages, ils font du lavage, l’un d’entre eux voulait essayer de travailler en restauration pendant l’été. On essaie de les chapeauter comme notre mère et notre père ont fait avec nous, sans prendre trop de place et en leur accordant une grande confiance », souligne Alain.
Fait maison
En rachetant l’entreprise Jyga Concept en 2004 (rebaptisée Jyga Technologies), la famille Lefebvre a donné un nouvel élan aux appareils d’alimentation de précision Gestal. Selon Alain Lefebvre, le fait d’être à la base un éleveur a joué un grand rôle dans le succès international que ces appareils connaissent aujourd’hui. Ils ont pu être testés sur le terrain, dans les élevages de la Ferme Aldo, et ont pu être réadaptés en fonction des besoins les plus précis de la production et pour que le système soit « le plus simple d’utilisation possible pour les producteurs, qui ne sont ni des ingénieurs ni des nutritionnistes ».
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La guider vers l’indépendance
Les trois frères Lefebvre attribuent une grande partie du succès de l’entreprise familiale à la grande confiance que leur accordaient leurs parents par rapport aux responsabilités à la ferme et à l’indépendance qu’ils ont ainsi pu gagner. « Notre père ne nous a jamais arrêtés dans nos ambitions. Il nous montrait et après, il nous laissait faire », raconte Nelson, encore reconnaissant. « Je dirais qu’aujourd’hui, j’ai 55 ans, et ça m’a servi toute ma vie. L’entreprise qu’on a aujourd’hui, c’est grâce à ça », renchérit son frère Alain.
Laisser libre cours à ses passions
Avec une formation collégiale en administration, Alain devait d’abord s’occuper de la gestion de l’entreprise familiale. Or, sur le terrain, c’est plutôt la productivité et le bien-être des troupeaux qui le passionnaient et qui l’ont finalement mené à gérer ce volet au sein de l’entreprise. Le côté gestion et administration a donc été pris en charge par l’aîné, Donald.
Garder un ratio d’endettement bas
Euclide Lefebvre a toujours fait preuve de prudence dans ses décisions d’affaires, en continuant, par exemple, de travailler à l’extérieur de la ferme, à ses débuts, pour financer l’achat de nouvelles terres. « Il nous a toujours dit : ‘‘Ne vous mettez jamais dans une position où vous êtes obligés d’accepter ce qu’un banquier vous dit’’ », raconte Alain, qui assure qu’ils ont toujours suivi ce conseil, malgré les nombreux emprunts qu’ils ont dû faire pour permettre à l’entreprise de croître. « On a toujours travaillé très fort pour que nos ratios d’endettement restent les plus bas possibles, pour garder notre indépendance. Comme en 1988, quand on a décidé de monter notre élevage à 300 truies, il fallait construire des bâtiments, alors on a bûché notre bois et on a fait notre coffrage et notre béton nous-mêmes, avec l’aide de notre père, qui a fabriqué une mini-bétonnière », se remémore-t-il.
Fiche technique | |
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Nom de la ferme : | Ferme Aldo et Jyga Technologies |
Spécialités : | Production porcine (naisseur-finisseur) et fabrication d’équipement porcin |
Année de fondation : | 1963 |
Noms des propriétaires : | Alain, Donald et Nelson Lefebvre |
Nombre de générations : | 3 |
Superficie en culture : | 485 hectares |
Cheptel : | 2 200 truies, 9 600 porcelets et 18 000 places en engraissement |
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