Autodidactes et passionnés

SAINT-MARC-DE-FIGUERY – Depuis près d’une vingtaine d’années, la Miellerie de la Grande Ourse a su se tailler une place de choix dans l’offre agrotouristique de l’Abitibi-Témiscamingue. Au-delà de sa passion pour les abeilles, la famille Ouellet cherche surtout à partager — et à propager — l’amour du terroir et du développement régional. 

Comme la constellation qui lui vaut son nom, la Miellerie de la Grande Ourse est facilement repérable dans le paysage agrotouristique de l’Abitibi-Témiscamingue. Non seulement elle se distingue par le développement d’une offre touristique originale, mais elle cherche surtout à innover pour repousser les limites de ce qu’il est possible de faire en zone agricole. 

L’entreprise a commencé avec des abeilles, bien sûr, mais aussi avec la production de petits fruits et de légumes. David Ouellet, un touche-à-tout qui « carbure aux projets », s’est cependant rendu compte rapidement que le cœur de sa ferme repose sur ces petites butineuses qui transforment le nectar des fleurs en précieux miel. La diversification de l’entreprise a donc été orchestrée autour du miel. 

Le nom de la Miellerie de la Grande Ourse rend hommage au « roi des forêts d’Abitibi » ainsi qu’aux ciels étoilés. « Mais je paie un peu pour de temps en temps. Il y a un tribut qu’il faut que je donne aux ours : une fois de temps en temps, ils viennent manger mes ruches », rigole l’apiculteur David Ouellet. Photo : Émilie Parent-Bouchard

« J’ai produit de la framboise et du légume pendant un bout de temps. Je ne dirais pas qu’on s’est plantés, mais ce sont deux volets qui devenaient assez difficiles à gérer sans main-d’œuvre étrangère », explique-t-il, précisant avoir fait le choix de ne pas y recourir pour éviter de complexifier l’accueil du public, dans le contexte où tous les employés doivent développer une certaine polyvalence.  

Aujourd’hui, le miel est décliné de plusieurs manières, incluant la production d’hydromel, de spiritueux et de boissons prêtes à boire. « C’était super cool, le maraîchage, mais on s’est rendu compte que ça prenait énormément d’énergie et que ce n’était pas ça qui rapportait. Donc on s’est lancés dans les abeilles et dans la production d’alcool », poursuit son fils aîné, Naïm Ouellet, qui aspire à prendre la relève de l’entreprise. 

Au cours des dernières années, on a donc multiplié les projets autour de la production artisanale d’alcools à base de miel, jusqu’à ouvrir, il y a deux ans, une buvette où l’on peut siroter un cocktail fin ou encore casser la croûte. En plus de bonifier le safari apicole par la visite des installations de fabrication d’alcool et la dégustation d’hydromels et de spiritueux à base de miel, cette buvette permet de prolonger le séjour à la ferme.

« J’ai sauté dans le vide! J’adore ça, me mettre en danger! Me déstabiliser jusqu’à reprendre le dessus et regarder derrière et dire : ‘‘Wow, j’ai réussi!’’ C’est mon trip, c’est ce que j’aime. Je suis un bâtisseur. » 

David Ouellet

Il affirme vouloir dynamiser le territoire et ainsi contribuer à la communauté avec un tel lieu. « [Mes filles] sont fières de dire à leurs amis que c’est eux autres, la Grande Ourse, et qu’elles y travaillent. Et elles me fournissent aussi de la main-d’œuvre par leurs amis », poursuit celui qui se réjouit que ses trois enfants — Naïm, 21 ans, Zélie, 16 ans et Cassiopée, 14 ans — aient aussi la piqûre. 

Vers un agrotourisme culturel à la ferme

Naïm a littéralement grandi en même temps que la ferme. Il y travaille maintenant à temps plein, en plus de poursuivre des études supérieures en informatique et en administration des affaires, ce qui lui permet de mettre ces nouvelles compétences à profit. « Ce que je trouve le plus trippant ici, c’est qu’il n’y a pas une journée où je fais la même chose. Aussitôt qu’un projet est fini, il y en a un autre qui part », soutient-il. 

« Il est en train de mettre en place tout le virage numérique de façon autodidacte, résume fièrement David Ouellet. Il programme à l’interne tous les logiciels : punch clock, réservations, site Web, registre d’entretien, de fermentation, etc. Il est en train de développer lui-même sa place dans l’entreprise », décrit fièrement son père.

Naïm Ouellet travaille à temps plein dans l’entreprise familiale, où il applique les connaissances qu’il acquiert dans ses cours d’informatique et d’administration des affaires. Photo : Émilie Parent-Bouchard

Et on aura d’ailleurs l’embarras du choix pour poursuivre le développement de l’entreprise tant la boîte à idées de la Miellerie de la Grande Ourse bourdonne. À moyen terme, on envisage de proposer un site de glamping à la ferme. Mais cet été, on se concentre surtout sur la tenue de spectacles dans le cadre champêtre de la buvette, une chose rendue possible grâce au travail d’un comité au sein de la MRC, pour s’assurer de respecter la réglementation de la zone agricole, et aux partenariats avec divers événements musicaux. 

David Ouellet prévoit aussi la distribution de ses hydromels à l’extérieur de la région, contrairement aux spiritueux, qui ne sont disponibles qu’à la ferme. « Mais je ne veux pas en manquer en Abitibi parce que j’ai commencé à en vendre à Montréal. Le cœur, il faut que ça reste l’Abitibi. Qu’ils viennent nous voir, les Montréalais! »  

Un safari apicole

Il fallait certes un peu d’audace et de vision pour imaginer que l’idée d’un safari, une activité généralement appliquée à l’observation de grands animaux africains, puisse aussi être consacrée à de tout petits animaux au cœur des basses terres de l’Abitibi.

« Le safari apicole, c’est quelque chose d’unique à la grandeur de la province, même plus largement. Les entreprises apicoles vont souvent montrer les ruches par une fenêtre avec l’apiculteur de l’autre côté de la fenêtre moustiquaire. Tandis que ce qu’on a décidé de faire, c’est une balade en tracteur dans une charrette safari protégée par les moustiquaires pour vous emmener au cœur du rucher », explique David Ouellet. 

Le safari apicole est une manière unique de découvrir le monde des abeilles. Les participants montent à bord d’une charrette protégée par des moustiquaires qui les mènera directement au cœur d’un rucher. Photo : Émilie Parent-Bouchard

Le bon coup de l’entreprise

Le meilleur coup de David Ouellet a été, selon lui, de diversifier son entreprise, même s’il lui a fallu délaisser certaines productions — par exemple les petits fruits et les légumes — pour se recentrer autour de l’ADN de la miellerie. « C’est de pousser la passion des abeilles et de s’être lancé dans la transformation du miel de toutes les façons, de ne pas juste rester dans la première transformation », dit-il. Miser sur l’agrotourisme pour expliquer non seulement la production de miel, mais aussi d’alcools, s’est aussi avéré payant pour l’entrepreneur. « Créer une entreprise polyvalente, ç’a créé une marque employeur vraiment trippante. Le monde a le goût de venir travailler ici. Je suis une des rares entreprises dans le coin qui a plus de CV que de jobs. » 

La Miellerie de la Grande Ourse s’est dotée d’une buvette où l’on peut boire un cocktail créé par une mixologue professionnelle à base des spiritueux et hydromels élaborés avec le miel. Photo : Émilie Parent-Bouchard
Fiche technique
Nom de la ferme :

Miellerie de la Grande Ourse

Spécialités :

Apiculture, transformation et agrotourisme

Année de fondation :

2006

Noms des propriétaires :

David Ouellet

Nombre de générations :

2

Superficie en culture :

15 hectares (non cultivés, mais une partie est en jachère fleurie)

Cheptel :

800 ruches

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