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La publication en ligne de l’article sur Sébastien Angers et son désaveu du bio, a atteint plus de 100 000 personnes sur la page Facebook de La Terre, tout en suscitant beaucoup de commentaires, dont ceux de Denis La France, enseignant au Centre d’expertise et de transfert en agriculture biologique et de proximité (CETAB+) et… ancien mentor de Sébastien Angers.
Denis La France se dit en désaccord avec les critiques adressées au bio comme quoi le travail de sol, comme le labour, entraîne chaque année « une déconstruction » de sa structure. « Il y a beaucoup de producteurs bio qui labourent une fois aux trois ans ou une fois aux quatre ans pour empêcher les mauvaises herbes vivaces de trop prendre de place dans leur système. Alors, ce n’est pas chaque année [les labours]; ils vont alterner avec du travail minimum léger », précise-t-il.
À ceux qui critiquent le contrôle uniquement mécanique des mauvaises herbes (ex : sarcleur et, à l’occasion, labour, etc.), Denis La France répond que le contrôle par un traitement chimique (herbicide) est pire pour le sol et l’environnement. « Le problème, en agriculture régénératrice non bio, c’est qu’ils font ça avec des glyphosates. Ils peuvent en mettre deux fois par année, ou plus, avec le discours que c’est bénin. C’est faux de dire que c’est bénin. Le glyphosate est utilisé partout et ça devient extrêmement dangereux. […] On retrouve des résidus de glyphosate même dans le corps des vers de terre », dit M. La France, qui, par ailleurs, tiendra une conférence sur l’importance des vers de terre en agriculture lors du prochain Colloque Bio pour tous!, le 17 février 2023.
Rentable, le compagnonnage?
Prioriser la technique du compagnonnage des plantes pour gérer les populations de mauvaises herbes, comme l’a proposé Sébastien Angers, voilà une solution qui ne convainc pas Denis La France, à court terme du moins. « Le compagnonnage, ce n’est pas nouveau. Ça date des années 50. Des livres sur le biodynamisme en parlent. Et on en fait aujourd’hui avec le trèfle en intercalaire, par exemple. Mais le problème, c’est que tu dois empêcher la plante de trop compétitionner l’autre. Comment on applique ça [à l’ensemble des fermes] sans moyen mécanique (ou chimique) pour que les producteurs puissent avoir des bons rendements? » M. La France donne en exemple la technique de semis de maïs aux 60 pouces, testée dernièrement au Québec, qui incorpore d’autres plantes, mais qui n’a pas offert des rendements permettant une rentabilité aux producteurs dans notre climat, mentionne-t-il.
Des vertus au travail de sol
Denis La France n’affirme toutefois pas que le bio est parfait. « Selon moi, c’est le mieux que l’agriculture peut faire, selon les circonstances », c’est-à-dire d’offrir une rentabilité économique aux producteurs tout en ayant le moins d’impacts environnementaux. Qui plus est, M. La France rappelle qu’il importe d’adopter une perspective plus large lorsqu’on évalue des systèmes culturaux, notamment avant de dépeindre négativement le travail de sol en bio.
« Travailler le sol, c’est un facteur de minéralisation de la matière organique, laquelle contient des éléments nutritifs, dont l’azote, qui augmente les rendements des cultures. Dans le régénératif [non bio], et sans travail de sol, les gens vont ajouter des engrais de synthèse directement près de la plante pour fertiliser, mais la production d’engrais azotés de synthèse avec le gaz naturel équivaut, dans le maïs grain, à l’utilisation de 300 litres de pétrole par hectare! De plus, une partie de cet engrais va se dénitrifier en N2O, qui est un gaz à effet de serre plus puissant que le CO2 », fait-il valoir.
Pas en guerre
Pour Denis La France, l’innovation et la recherche de solutions ont toujours caractérisé le bio. Il nomme entre autres l’agriculteur Denis Ouellette, qui travaille à améliorer les pratiques de conservation du sol. Il mentionne aussi l’émergence d’une certification d’agriculture régénératrice biologique, qui fait foi de l’amélioration toujours possible des pratiques.
Concernant le changement d’allégeance de Sébastien Angers, qui quitte le bio pour l’agriculture régénératrice non bio, Denis La France reste zen. « J’ai mentoré Sébastien pendant 20 ans. Je lui ai enseigné. Je trouve ça regrettable et je ne suis pas d’accord avec toutes ses idées, mais on n’est pas en guerre parce qu’il a lâché le bio. On va continuer à se parler. »
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