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En zone agricole, la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (LPTAA) interdit d’utiliser un terrain à une fin autre que l’agriculture, sauf avec l’autorisation de la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ)1. Mais qu’en est-il de l’utilisation d’un terrain à des fins de conservation? La Cour du Québec a récemment rendu un jugement à ce sujet2.
Dans cette affaire, une demande d’autorisation a été déposée pour séparer un milieu humide de 13,5 ha d’un lot situé en zone agricole « pour des fins de conservation, tout en préservant la partie agricole » de la superficie résiduelle dudit lot. Dans la parcelle visée, la demanderesse souhaite établir une aire protégée, également qualifiée d’aire de conservation. La particularité de ce projet est qu’il n’y aurait aucune infrastructure ni aucune activité sur le terrain. Au sens figuré, une véritable « cloche de verre » serait déposée sur la parcelle visée.
La position de la CPTAQ
La CPTAQ avait initialement rejeté la demande, puisque selon elle, une autorisation n’était pas nécessaire pour établir une aire protégée, dans la mesure où cette utilisation impliquait de laisser les lieux dans l’état où ils sont3. La CPTAQ basait principalement son raisonnement sur le fait que la définition d’ « agriculture » dans la LPTAA comporte expressément « le fait de laisser le sol sous couverture végétale » et que la LPTAA n’oblige pas à faire de l’agriculture.
En somme, pour la CPTAQ, la parcelle visée ne serait pas utilisée et ne ferait pas l’objet d’une intervention humaine quantifiable si bien qu’elle serait utilisée à des fins d’agriculture.
Les précédents
Les tribunaux judiciaires ont depuis longtemps établi qu’il n’est pas suffisant de répondre à un des éléments de la définition d’« agriculture » pour déterminer si un lot est utilisé à des fins agricoles, mais qu’il faut plutôt considérer l’usage du sol, et ce, indépendamment de l’état du fonds de terre. En effet, la LPTAA prohibe toute utilisation autre que l’agriculture, même si cela implique de laisser le sol sous couverture végétale.
La décision de la Cour du Québec
Le tribunal rappelle qu’il est vrai que laisser le sol sous couverture végétale peut être une des illustrations de la définition de l’agriculture. Cependant, l’examen plus poussé de la CPTAQ relève que l’utilisation projetée est incompatible avec la LPTAA. L’usage avoué de la parcelle visée par la demande d’autorisation est « à des fins de conservation », et c’est ainsi que la demande est adressée à la CPTAQ. D’ailleurs, la CPTAQ reconnaît que le projet n’est pas simplement de ne rien faire sur la parcelle visée, mais bien d’y faire une « utilisation comme aire protégée ».
Bref, il n’y aura pas d’agriculture; ce lot sera soustrait de la base territoriale pour la pratique de l’agriculture sans même un examen de la CPTAQ. De l’avis du tribunal, les demandes d’autorisation déposées à des fins de conservation doivent faire l’objet d’une analyse par la CPTAQ, où sera évalué leur impact sur la base territoriale créée pour la pratique de l’agriculture. La demande est donc retournée à la CPTAQ, où elle sera appréciée sur la base des critères prévus à la LPTAA.
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La chronique juridique est une vulgarisation de l’état du droit en vigueur et ne constitue pas une opinion, un conseil ou un avis juridique. Nous vous invitons à consulter un avocat ou un notaire pour connaître les règles particulières applicables à une situation donnée.
1 Des droits, privilèges et exceptions sont prévus dans la LPTAA et ses règlements d’application.
2 Fédération de l’UPA de la Montérégie c. CPTAQ, C.Q., no 460-80-001584-216, 6 mars 2023.
3 Fondation pour la sauvegarde des écosystèmes du territoire de la Haute‑Yamaska, CPTAQ, no 425657, 24 février 2020.