Page conseils 17 juin 2024

Quel recours peut être entrepris en cas de contravention à la réglementation d’urbanisme? 

La Loi sur l’aménagement et l’urbanisme(LAU) permet aux municipalités d’adopter une pluralité de règlements d’urbanisme afin d’encadrer l’aménagement de leur territoire, notamment les règlements de zonage, de construction et de lotissement. 

Lorsqu’une personne ne respecte pas la réglementation d’urbanisme, par exemple, en effectuant un usage interdit ou en construisant un bâtiment dérogatoire, la Municipalité peut intenter un recours en droit pénal et/ou un recours en injonction fondé sur l’article 227 LAU. 

Le recours en droit pénal permet à la Municipalité d’imposer une pénalité financière à une personne par la transmission d’un constat d’infraction. Lorsque cette personne conteste sa culpabilité, c’est la Cour municipale qui a la compétence pour trancher la question. 

Le recours en injonction fondé sur l’article 227 LAU permet à la Municipalité de demander à la Cour supérieure d’ordonner la cessation d’une utilisation du sol ou d’une construction incompatible avec sa réglementation d’urbanisme. Ce recours permet également de forcer un propriétaire à exécuter les travaux requis pour rendre l’utilisation du sol ou la construction conforme. Dans cette éventualité, les frais d’exécution seront à la charge du propriétaire.

Cependant, la Cour supérieure jouit d’un pouvoir discrétionnaire dans le cadre de l’application de l’article 227 LAU. Cette discrétion, qui ne doit être utilisée que lors de circonstances exceptionnelles, lui permet de refuser d’ordonner une sanction ou encore de choisir le remède approprié. Dans l’arrêt Ville de Montréal c. Chapdelaine1, la Cour d’appel fait état des sept critères pouvant permettre l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire par la Cour supérieure : 

  1. Il doit s’agir de circonstances exceptionnelles et rarissimes.

2. L’intérêt de la justice doit commander le rejet du recours.

3. La personne en contravention de la réglementation municipale doit avoir été diligente et de bonne foi. 

4. L’effet du maintien de la contravention ne doit pas entraîner une conséquence grave pour la zone municipale touchée.

5. Il doit y avoir existence d’un délai déraisonnable (généralement plus de 20 ans) et inexcusable de la part de la Municipalité.

6. Il doit y avoir eu un acte positif de la Municipalité (par exemple, l’émission d’un permis ou la perception de taxes).

7. La situation dérogatoire ne doit pas avoir pour effet de mettre en danger la santé ou la sécurité publique, l’environnement et le bien-être général de la Municipalité.

Lorsque ces critères ne sont pas satisfaits, la Cour supérieure ne peut utiliser son pouvoir discrétionnaire et doit ordonner la sanction appropriée. Par ailleurs, dans certaines circonstances, la sanction peut être sérieuse. Cela a notamment été le cas dans l’affaire Bibeau c. Ville de Saint-Sauveur2, où la démolition d’une maison de prestige a été ordonnée puisqu’elle avait été construite sans permis et au mauvais endroit sur le terrain.

Finalement, il est important de souligner qu’une municipalité n’est pas obligée d’entamer un recours.

En effet, une municipalité bénéficie d’un pouvoir discrétionnaire pour décider d’entamer ou non un recours à l’encontre d’une personne qui ne respecte pas sa réglementation. 

Cela dit, le recours en injonction fondé sur l’article 227 LAU n’est pas exclusif à la Municipalité et peut également être entrepris par toute personne intéressée. Dans ces circonstances, si votre voisin ne respecte pas la réglementation d’urbanisme et que la Municipalité fait défaut d’intervenir, vous pourriez entreprendre par vous-même un tel recours afin de forcer votre voisin à remédier à la situation.  

12003 CanLII 28303 (QC CA)      22021 QCCA 290


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La chronique juridique est une vulgarisation de l’état du droit en vigueur et ne constitue pas une opinion, un conseil ou un avis juridique. Nous vous invitons à consulter un avocat ou un notaire pour connaître les règles particulières applicables à une situation donnée.

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