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De façon générale, le forçage est une technique par laquelle la dormance d’une plante est levée hors de sa saison naturelle de croissance. Le forçage de la rhubarbe a été découvert par hasard en Angleterre à la fin des années 1800 et il a été largement utilisé en Ontario, jusque dans les années 1960. Un irréductible producteur le pratique encore aujourd’hui, suivant le pas de cinq générations précédentes, avec les mêmes plants que ses ancêtres…
Dès la première journée de mes études en technique de production horticole agroenvironnementale, les cultures désaisonnalisées en serre froide nous ont été présentées par nos professeurs comme une voie additionnelle pour occuper et rentabiliser les installations serricoles au Québec. C’est dans ce contexte que, tout au long de mon parcours, j’ai voulu trouver une idée de projet terminal qui m’amènerait à explorer une nouvelle avenue en serres minimalement chauffées. C’est avec grand enthousiasme que je suis plutôt plongée dans une avenue centenaire en voie de disparition : le forçage de la rhubarbe.
De la rhubarbe en hiver
Pour forcer la rhubarbe, des couronnes dormantes sont déterrées à l’automne et entreposées au froid jusqu’à ce qu’on les astreigne à sortir de leur dormance en janvier, dans un entrepôt non éclairé à 10 °C. Les bourgeons débourrent rapidement. La première récolte a lieu après quatre semaines, quand les pétioles atteignent une longueur entre 45 et 60 cm. Il peut y avoir de six à huit semaines de récolte. Par cette technique, il devient alors possible de se procurer de la rhubarbe fraîche en février, d’où sa popularité d’antan, quand les légumes et les fruits importés n’étaient que peu offerts en épicerie.
Le projet consistait donc à tenter de reproduire les conditions de forçage en entrepôt dans les serres minimalement chauffées de l’Institut de technologie agroalimentaire du Québec, campus de Saint-Hyacinthe. L’objectif était de voir si cette production était réalisable en hiver au Québec. Pour ce faire, une structure recouverte d’une toile d’occultation a été érigée au-dessus de grands bacs de 20 cm de profondeur. Des couronnes de deux cultivars de rhubarbe y ont été plantées : Red Champagne et Canada Red. Tout juste à côté, dans la même serre, les mêmes cultivars ont été utilisés, dans les mêmes conditions, mais exposés à la lumière.
Un produit différent de la rhubarbe d’été
Les pétioles forcés à la noirceur ont montré des caractéristiques différentes des pétioles de rhubarbe d’été. Ils se sont avérés moins fibreux, plus juteux, moins amers et donc plus doux au goût. Leur couleur était attrayante puisque l’absence de photosynthèse chlorophylle a entraîné la prédominance des pigments rouges sur les verts. Ainsi, il est raisonnable de penser que ce produit a un potentiel pour la consommation en accompagnement des salades de légumes ou de fruits, dans les vinaigrettes ou la transformation en jus.
Des rendements intéressants
Dans le contexte expérimental de forçage à la noirceur, le cultivar Red Champagne, plus hâtif et avec de longs pétioles robustes, s’est révélé plus prometteur. Son rendement en poids moyen par plant a été nettement supérieur à celui du cultivar Canada Red.
Il pourrait éventuellement mener au développement d’autres cultures forcées sans lumière en hiver telle que l’asperge blanche.
Remerciements à la Ferme Serbi et à la Pépinière Villeneuve pour le matériel végétal utilisé dans ce projet.
Institut de technologie agroalimentaire du Québec