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À toi, à vous. Je peux ressentir vos cœurs se twister à la simple lecture du titre. J’entends votre peine, votre souffrance. Cette christi de souffrance silencieuse qui se vit seule, au fond de nos maisons vides de cris d’enfants. Tu te doutes bien de quoi je vais parler, c’est tough, oui. Mais parfois, les mots font du bien. En parler aussi, si jamais tu veux essayer, je te jure que c’est libérateur.
La famille, les enfants, ça fait partie des valeurs en agriculture. Aborder la difficulté d’en avoir, des enfants, et au sens large, une famille, c’est encore tabou aujourd’hui. Et pourtant, au nombre de personnes qui vivent ça, ça ne devrait pas. Le discours social nous fait croire qu’aussitôt la contraception arrêtée, on va tomber enceinte. On nous apprend comment ne pas faire d’enfants, comment se protéger, où se procurer la pilule du lendemain « au cas où ». Mais justement, il est exactement là le problème : on ne nous prépare pas aux obstacles. Autrefois, nos grands-mères disaient qu’elles avaient eu « huit enfants, six de vivants ». Aujourd’hui, c’est comme si nous avions perdu ce contact si précieux avec cette partie de la vie. Ceux qui sont éleveurs savent que ça fait partie intégrante de l’existence. Une vache qui ne colle pas ou qui avorte trop près du tarissement, on le sait qu’elle fera partie du prochain tour de truck. Mais quand on parle de l’homme ou de la femme de sa vie, c’est une autre affaire (heureusement). Dans ce temps-là, ton transporteur ne pourra pas t’aider, mais ta travailleuse de rang, oui.
On ne nous apprend pas que c’est possible que ça ne marche pas, qu’on va peut-être vivre des deuils périnataux. Peut-être aussi qu’on ne va pas trouver la bonne personne avec qui fonder une famille avant que la fameuse horloge biologique ne sonne. En agriculture, on va se le dire, trouver un ou une partenaire qui accepte les horaires atypiques, la paille sur le plancher et dans les poches des pantalons, ça ne court pas tous les rangs.
Il arrive donc que non, des fois, notre « plan A », notre idéal, ne fonctionne pas comme dans nos rêves. On passe au « plan B », puis peut-être aux plans « C » et « D », en entretenant encore l’espoir de ne pas avoir à se rendre à une autre lettre. Pourquoi nous, alors que nous avons tant d’amour à donner?
Si c’est ce que tu vis, ne reste pas seul avec ça. Je ne te dis pas d’en parler avec quelqu’un qui va te répondre des phrases creuses qui vont refléter son grand inconfort à entendre ta souffrance. Parles-en à ta travailleuse de rang. Parles-en également avec des personnes qui ont vécu cette réalité-là. Celles qui ont ressenti le flot d’émotions qui revient à chaque cycle d’ovulation. Celles qui ont vécu l’attente et l’espoir d’un retard des menstruations, et la déception lorsque le filet rouge se pointe le bout du nez. Celles qui savent que tu peux te sentir coupable de peut-être « ne pas avoir assez fait l’amour », parce que ça ne vous tentait tout simplement pas. Celles qui comprennent à quel point ça peut faire mal d’être entouré de personnes ayant un parcours « sans faute », et de les entendre parler de leurs enfants (en bien ou en mal).
L’important, c’est de trouver des choses qui vous feront du bien, en tant que couple, qui vont vous permettre de vous rapprocher et de réapprendre à voir le beau et le léger autour de vous. Je vous confie notre acquisition d’un chiot, et, qui sait, peut-être qu’à notre prochain coup dur, ce sera un cheval de trait pour aller ventiler dans le bois (ne le dites pas à mon père, il n’est pas encore au courant!).
Dans tous les cas, prenez soin de vous et de votre couple.
Soumettez votre témoignage en toute confidentialité :
[email protected] ou 1 877 679-7809
555, boulevard Roland-Therrien, bureau 100
Longueuil (Québec) J4H 3Y9
Pour une aide d’urgence : 1 866 APPELLE (277-3553).
Pour l’aide d’un travailleur de rang : 450 768-6995.