À coeur ouvert 6 mars 2024

Les femmes, ça compte!

Nous célébrerons, vendredi, la Journée internationale des droits des femmes et j’avais envie, pour l’occasion, de leur donner la parole dans cette chronique. 

Commençons par Justine, propriétaire d’une ferme laitière. Quand elle reçoit des gens du milieu agricole, Justine se fait encore demander où est son « boss ». On lui fait « passer le message » au lieu de transiger avec elle directement. Si Justine en rit certaines journées, ce réflexe l’irrite la plupart du temps. Elle aimerait avoir plus de crédibilité et qu’on reconnaisse enfin qu’une femme est capable de gérer une ferme. 

Stéphanie a étudié en GTEA (gestion et technologies d’entreprise agricole). Elle y a rencontré Maxime. Après leurs études, le couple a décidé de prendre la relève de la ferme des parents de Stéphanie. La première année, ils travaillaient toujours ensemble à la ferme et avaient l’impression de vivre leur rêve. L’année d’après, Stéphanie est tombée enceinte. Maxime a alors pris l’ensemble des tâches de la ferme pendant que Stéphanie s’est occupée des tâches de la maison et de la comptabilité de l’entreprise. Stéphanie et Maxime ont maintenant trois enfants, et Stéphanie n’est jamais retournée faire une traite. Elle est parfois nostalgique de son projet de carrière agricole, sans toutefois oser en parler avec son conjoint. Maxime serait ouvert à des changements, mais il croit que la séparation actuelle des tâches convient à Stéphanie.

Je peux aussi vous parler de Sarah. Propriétaire d’une ferme maraîchère avec son frère Pascal, c’est elle qui s’occupe de l’organisation générale de la ferme, des commandes, des suivis avec les clients et des ressources humaines. Si Pascal est plus en contact avec les employés qu’elle ne l’est elle-même – puisqu’il est directement dans les champs – c’est tout de même vers Sarah que ceux-ci vont s’ils ont des conflits, des questions ou des mauvaises journées. Et ce, même si Pascal est bien plus patient qu’elle et mieux outillé pour ce genre de situation. 

Il y a également Nicole. Elle travaillait à la ferme, mais sans être actionnaire. Elle ne se versait pas non plus de salaire puisque les finances de l’entreprise ne le permettaient pas. Cependant, elle et Gilles sont en train de penser au divorce. Les parts de Gilles seront transférées à sa relève. Nicole est très inquiète de devoir repartir à zéro.

Je pense enfin à Julie, maman qui travaille à l’extérieur comme comptable. Son conjoint Jérôme et elle-même sont toujours en train de se disputer. Julie voudrait voir son conjoint plus souvent et aimerait qu’il l’aide avec les enfants, la cuisine et le ménage. Jérôme perçoit que Julie ne comprend pas bien son métier et la charge qu’il demande, tandis que Julie perçoit que Jérôme ne comprend pas la charge mentale de devoir gérer toute la maisonnée en plus de son travail. Ils sont à la recherche d’une solution de compromis pour les deux.

Même si on remet de moins en moins en question la pertinence des femmes en agriculture, leur place continue d’être un défi en 2024.

Il existe bien évidemment des femmes heureuses en agriculture qui ont pu trouver, avec leurs partenaires, leurs conjoints, leurs associés, des modèles d’affaires ou de répartition des tâches qui convenaient à tous. Certaines femmes sont comblées par leur modèle familial plus traditionnel qui leur offre la chance d’élever leurs enfants à la maison. D’autres ont à cœur leur implication agricole, mais souhaiteraient y vivre un meilleur partage des tâches; participer davantage aux travaux plus physiques, par exemple, et partager la charge mentale et le care avec leur douce moitié. 

En cette journée des droits des femmes, puissions-nous nous rappeler que tous les modèles se valent et qu’il importe de s’en parler. Messieurs, ce soir, faites partie de la solution et ouvrez la discussion avec vos sœurs, vos mères, vos filles ou vos conjointes en agriculture; ont-elles la place qu’elles souhaitent?  


Besoin d’aide?

Si vous avez des idées suicidaires ou si vous êtes inquiet pour un de vos proches, contactez le 1 866 APPELLE (1 866 277-3553). Un intervenant en prévention du suicide est disponible pour vous 24 heures sur 24, sept jours sur sept.

Pour l’aide d’un travailleur de rang, contactez le 450 768-6995 ou par courriel [email protected].