À coeur ouvert 5 août 2024

Homosexualité en agriculture : l’histoire de Joé

Depuis plusieurs mois, j’ai envie de parler de la communauté LGBTQ+ pour vous faire voir les producteurs et productrices au-delà de ces cinq lettres. Mon désir de parler de cette communauté vient de discussions avec des producteurs ayant de la difficulté à se retrouver dans la communauté agricole plutôt traditionnelle. 

Avant d’aller plus loin, ça mange quoi en hiver, les LGBTQ+? Ce sont des personnes qui mangent de la viande, des fruits et des légumes, qui boivent du lait, du vin et de la bière tout comme vous qui êtes hétérosexuels. Blague à part, nous parlons ici de personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, trans, queers, et le + est pour les personnes intersexuelles et pansexuelles, pour ne nommer que celles-là.

J’amorce les portraits en vous présentant un exemple de producteur pour qui le coming out s’est fait sans embûche. Eh oui, ça se peut! J’ai le plaisir de vous présenter Joé, producteur agricole et président par intérim de Fierté agricole. C’est en 2008 qu’il a fait ses débuts avec le Club des agriculteurs gais du Québec, qui a su mettre les bases de ce qui deviendrait Fierté agricole en 2012. Cet organisme met sur pied des événements pour briser l’isolement et favoriser l’intégration et l’acceptation des personnes LGBTQ+ en milieu agricole et rural. 

Joé vient de l’Abitibi. Il a 8 ans lorsque ses parents achètent une ferme laitière. Jeune adulte, Joé se dirige vers Sainte-Anne-de-Bellevue, au campus Macdonald de l’Université McGill, où il étudie en agriculture. C’est lors de ses études qu’il fait son coming out en tant qu’homosexuel. Les parents de Joé acceptent bien son identité d’homme homosexuel. Contrairement à d’autres, il n’a pas à faire face à des préjugés négatifs sur son orientation sexuelle dans son milieu familial agricole.

C’est en 2011 qu’il rencontre Michel, son futur compagnon, qui fait aussi partie de Fierté agricole. À cette époque, Michel a une ferme laitière, et quatre ans plus tard, Joé y travaille à temps plein. Les deux hommes décident de vendre le troupeau et le quota en 2019 et de démarrer une boutique à la ferme où ils peuvent vendre les produits issus de leurs durs labeurs. Ils produisent plusieurs légumes, fines herbes, viandes élevées à la ferme et ont des poules pondeuses.

La passion de Joé pour l’agriculture va au-delà de la production de lait et il est bien fier de nourrir les gens avec ses légumes. 

Lorsque je demande à Joé comment il vit son identité de gai dans une ferme, il me dit de but en blanc que lorsqu’il « pelte de la marde », son discours intérieur n’est pas qu’il le fait parce qu’il est gai, mais parce qu’il est producteur agricole. Ces phrases m’ont emmenée à lui demander comment les gens autour de lui réagissent lorsqu’ils voient que c’est un couple d’hommes qui est propriétaire de la ferme. Joé n’a pas vécu d’homophobie; du moins, il n’a pas entendu de commentaires désobligeants à son égard. Les gens, dit-il, ne s’arrêtent pas plus sur son identité sexuelle que sur l’orientation sexuelle d’un taureau. Ils abattent le même boulot que deux agriculteurs hétéros et lorsqu’un ou l’autre va acheter de la machinerie, personne ne leur demande où est leur conjoint, contrairement aux femmes lesbiennes. Joé souligne que même si son histoire est heureuse, ce n’est pas rose pour tous les producteurs et productrices. Il reste beaucoup de travail à faire, et on ressent même un certain recul. 

Comme travailleuse de rang, je veux donner une voix aux gens de la communauté LGBTQ+ pour que le sujet de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre soit moins tabou et plus fluide. Si certaines personnes font l’objet de railleries ou vivent leur homosexualité « en cachette », l’histoire de Joé est porteuse d’espoir d’une plus grande ouverture face aux différences.


Besoin d’aide?

Si vous avez des idées suicidaires ou si vous êtes inquiet pour un de vos proches, contactez le 1 866 APPELLE (1 866 277-3553). Un intervenant en prévention du suicide est disponible pour vous 24 heures sur 24, sept jours sur sept.

Pour l’aide d’un travailleur de rang, contactez le 450 768-6995 ou par courriel [email protected].