Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
Depuis plus de trois décennies maintenant, les haricots secs poussent dans les champs de la famille Gras à Grand-Saint-Esprit, dans le Centre-du-Québec, ce qui en fait l’une des plus anciennes exploitations à s’adonner à cette culture au Québec. Aujourd’hui encore, Philippe Gras et son jeune associé William Maillette poursuivent cette tradition, mais en mode biologique.
Pas étonnant donc que les organismes Équiterre et Sème l’avenir aient choisi cette entreprise pour une journée à la ferme portant sur la culture du haricot sec biologique. Une cinquantaine de producteurs, agronomes et représentants d’institutions publiques – principalement du secteur de la santé – susceptibles d’intégrer le haricot sec dans les menus des établissements, se sont déplacés pour l’occasion, le 20 août dernier. La rencontre avait pour but d’explorer les défis agronomiques des haricots secs, dont l’amélioration de la rentabilité des rotations et les stratégies pour réduire l’usage des fongicides et herbicides.
« C’est une culture qui s’intègre bien dans la stratégie de rotation des cultures », explique Philippe Gras. « Évidemment, on a choisi le mode biologique en raison de la valeur ajoutée. »
« Sans compter que c’est une culture qui offre une plus grande souplesse dans la répartition des travaux dans le temps », précise William Maillette.
Une culture marginale
La culture du haricot sec en mode biologique est relativement récente au Québec. Peu de producteurs s’y adonnent et la majorité sont encore en phase d’expérimentation.
Sur leurs 240 hectares de champ à Grand-Saint-Esprit, les deux producteurs des Cultures du Grand ont semé 14 hectares de la variété de haricot sec rouge foncé Dark Red. Ils expérimentent une stratégie qui consiste à cultiver le haricot sec sur des billons sous couvert de maïs fauché, suivi par du blé d’automne.
Les deux producteurs reconnaissent que la conversion en régie biologique demande une importante adaptation. « Notre objectif est de cultiver en travail minimum », indique William Maillette. « On a beaucoup de travail de recherche à faire sur les bonnes variétés, les meilleures techniques de travail du sol. »
L’entreprise, qui cultivait jusqu’à 80 hectares de haricots en mode conventionnel, en avait 28 en biologique l’an dernier et 14 cette année.
« L’an dernier, on a récolté environ 2 000 kilos à l’hectare contre 900 à 1 000 cette année », explique Philippe Gras. « En 2022, on avait labouré et on a eu d’excellents résultats l’année suivante. On se demande donc s’il n’est pas préférable de labourer avant de semer. »
S’inspirer des modèles
Le producteur Sylvain Deschenes, de Saint-Léon-le-Grand en Mauricie, était du nombre des participants à la rencontre de Grand-Saint-Esprit parce qu’il effectue présentement une conversion de ses cultures en mode biologique et souhaite intégrer la culture de haricots secs dès 2025.
En gestion conventionnelle, il récolte plus de six tonnes de haricots sur deux parcelles de quatre hectares.
« Je sais que la conversion en régie biologique représente un défi et je suis ici pour apprendre de ceux qui ont déjà de l’expérience », dit le producteur.
Une récente publication du Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec (CRAAQ) explique que cette culture est de plus en plus perçue comme une stratégie gagnante par les producteurs et donne un certain nombre de conseils pour tenter l’expérience.
« Pour obtenir de bons résultats, peut-on y lire, il est primordial de choisir un cultivar à haut rendement, résistant aux maladies et adapté aux conditions agroclimatiques de sa région. Ce choix doit aussi reposer sur l’équipement de récolte disponible. En effet, si la moissonneuse-batteuse conventionnelle convient bien pour les haricots à petits grains, elle nécessitera des modifications pour la récolte de grains plus gros comme ceux des haricots canneberges ou rognons rouges, par exemple. »
Le haricot sec bio : un marché à développer
Il est difficile pour le président de la compagnie Haribec de comprendre pourquoi la population du Québec ne consomme pas davantage de haricots secs. « On consomme des haricots secs partout dans le monde », dit Pierre-Marc Brodeur, qui participait à la journée à la ferme de Grand-Saint-Esprit. « Le haricot sec est une protéine végétale qui ne nécessite pas de transformation et qui va du champ à l’assiette. »
Dans 25 pays
Son entreprise de Massueville près de Sorel commercialise dans 25 pays six variétés de haricots secs cultivées en régie conventionnelle et trois en régie biologique. Au total, une dizaine de tonnes de légumineuses transitent par l’entreprise, dont environ cinq proviennent de producteurs québécois. « On pourrait en produire beaucoup plus au Québec et on le vendrait, c’est certain », dit-il.
Une année record
C’est en partenariat avec des producteurs du Québec, dont ceux de la ferme Les cultures du Grand, que Haribec a entrepris d’explorer le marché des haricots secs biologiques.
« Cette année sera sans doute celle où on aura semé le plus de haricots secs bio », soutient l’homme d’affaires. Pour lui, la culture du haricot en régie bio s’inscrit surtout dans la perspective d’une stratégie de rotation des cultures dans les champs des producteurs bio.