Vie rurale 9 septembre 2014

Sur les traces d’une géante

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Jehane Benoît fut la cuisinière la plus médiatisée de son époque et a influencé l’alimentation de plusieurs générations de Canadiens.

Jehane Benoît a joué un rôle déterminant dans notre alimentation, et le Musée des communications et d’histoire de Sutton a souhaité la rappeler à notre souvenir.

Précurseure de Sœur Angèle et de Ricardo, hôtesse de Femmes d’aujourd’hui et de Young Chiefs Jehane Benoit (1904-1987) fut la cuisinière la plus médiatisée de son époque, un phénomène incontournable. La bible de cette diplômée de la Sorbonne en chimie alimentaire, l’Encyclopédie de la cuisine canadienne, s’est vendue à deux millions d’exemplaires, anglais et français confondus. Chaque semaine, les supermarchés Steinberg la publiait en fascicules qu’on pouvait acheter avec des timbres Gold Star. Elle fut aussi porte-parole de plusieurs compagnies, comme la bière Dow, le riz Dainty, et Jell-O. Plus tard, Jehane Benoît quitta sa retraite pour tester les fours micro-ondes de Panasonic, dont elle écrivit les livrets d’accompagnement, et pour lesquels elle adapta son encyclopédie.

Richard Leclerc, concepteur et réalisateur de l’exposition, donne la mesure du personnage. « Jehane Benoît a été la première laïque à prendre le relais des écoles ménagères, explique-t-il, souvent dirigées par des religieuses. Avant elle, on ne mangeait que du steak, du jambon et du poisson, qu’on ne savait pas faire cuire. Jehane Benoît, qui a élevé jusqu’à 3000 moutons par année à sa ferme de Sutton, nous a aussi fait découvrir l’agneau. Auparavant, on trouvait que ça goûtait la laine! »

Pour Richard Leclerc, Jehane Benoît a adapté la cuisine française à notre réalité tout en valorisant notre terroir. « Elle a conçu une cuisine confort avant l’heure, ajoute-t-il. Elle créait un bel assemblage de couleurs et de saveurs, mais économique et facile à préparer. Elle a par exemple rendu accessible la mousse au chocolat, que les restaurants nous présentent souvent comme un plat haut de gamme. »

Héritage majeur

Encore aujourd’hui, 25 ans après sa mort, la pionnière de la cuisine canadienne habite nos cuisines. À Sutton, tout au long de l’exposition, la plupart des restaurants présenteront un plat inspiré par Jehane Benoît. Plusieurs jeunes chefs ont confié à Richard Leclerc que l’Encyclopédie de la cuisine canadienne –qui s’intitule aujourd’hui L’Encyclopédie de la cuisine de Jehane Benoît – était encore leur livre de base. Pour une, la compagne de l’auteur de ces lignes, dans la quarantaine, ne jure que par le potage Saint-Germain et les crêpes françaises de Jehane! « Ses recettes sont peut-être un peu grasses par rapport à aujourd’hui, constate Richard Leclerc, mais personne ne m’a dit que c’était dépassé. »

Dans le cadre de son exposition consacrée à Jehane Benoît, présentée jusqu’au 24 novembre, le Musée des communications et d’histoire de Sutton a reconstitué sa cuisine, avec les moules, les poêles, les ustensiles, la décoration. Plus des deux tiers des accessoires présentés appartenaient à Jehane Benoît. L’exposition s’enrichit également d’archives d’époques, visuelles et écrites, d’un film, et d’œuvres inspirées du thème, réalisées par des artistes locaux et autres. L’exposition permanente est consacrée aux technologies de communications et à l’histoire de la région. Outre les réservations de groupe, le musée est ouvert les samedis et dimanches, de midi à 16 h.