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Chaque matin, mon torse se gonfle de fierté lorsque je pense à ma vie, aux choix faits dans le passé pour qu’elle soit ainsi, à ma famille, mes projets, mon homme et ma ruralité. Cette chose méconnue et difficile à cerner aperçue à La semaine verte ou à L’amour est dans le pré et que rappelle Fred Pellerin aux citadins en leur expliquant qu’ils sont tous ruraux.
Dans ma vie, la ruralité se définit comme seul lieu de bonheur. Aucun compromis possible dans ces rangs où les GPS n’osent pas nous amener et où les gens ont pris le temps de vivre, de vieillir et de survivre. Nous sommes chanceux. Il y a de vieux pick-up abandonnés et des maisons qui ne survivent pas au départ des leurs, et des artéfacts pour ne pas oublier le passé et se rappeler que l’expression « dans mon temps… » est maintenant devenue l’ancien temps pour les petits.
Ma ruralité est parsemée de jardins, d’arbres, d’enfants, de cabanes dans le bois bâties pas très loin de vieilles digues de roches oubliées. Il y a des dindes sauvages à la queue leu leu et des orignaux magnifiques qui, deux heures après la fin de la chasse, sortent se pavaner dans les champs déjà enneigés. On entend les hurlements des coyotes, à la fin de l’été, quand le froid commence à entrer par les vieux châssis. C’est le prétexte pour se coller un peu plus, en dessous des courtepointes de Grand-Mom et de Mémé.
De jour en jour, la perpétuité est dans ma ruralité qui se couvre d’un ciel étoilé dont on tombe assurément amoureux.
« Ça, c’est la Grande Ourse, maman? Et à côté, mon très vieux grand-papa Henri-Paul?
– Oui, oui, mon petit Henri d’amour. »
Notre vie est au ralenti. Les petits arrivent à trouver les réponses à leurs questions dans le ciel. Nos quotidiens, loin de la grande ville, sont si ordinaires et ô combien extraordinaires. Pas de magasin de Ricardo où acheter ses dernières « belles p’tites napkins ». Tant pis. Chez nous, on saute dans le fossé l’hiver venu et on se promène en trois-skis jusqu’à ce que les petits soient tannés du grand air.
Nous aimons notre ruralité et ses silences, les nuits sans lampadaires ni trafic où seuls les petits pas du bébé nu-pieds, se glissant dans notre lit, se font entendre. C’est le calme plat avant la frénésie du matin. Notre maison a des fenêtres où les voisins n’existent pas et où le poêle à bois ronronne depuis octobre.
On manquera certainement de bois de chauffage cette année. Pas grave. On se collera encore plus en dessous des couvertures.
Émilie Fontaine, Agrimom