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Ah! Ces maudits tas de roches! J’ai la chance que dans le temps où mon père avait son entreprise d’excavation, il a fait disparaître, avec sa pelle mécanique et ses 10 roues, la presque totalité de ces amas pierreux disgracieux de nos champs. Maintenant, on met la faucheuse à terre d’un bout à l’autre du champ, on a des rangs de foin presque parfaits, et l’on aligne les balles, l’une dernière l’autre, à la file indienne.
Wow! Comme c’est beau; comme c’est grand! Nous louons aussi des champs, plus petits, plus vallonnés, plus rocheux avec de nombreux tas de roches. Une caractéristique de mon village au pied des Appalaches surnommé « le Buton ».
Dame Nature a décidé de nous donner une chance. Go! Go! Go! On fauche, on fauche. Je suis en train de racler ces champs loués. Je sacre après les tas de roches : une vraie perte de temps, grrr! Et puis, je me mets à regarder ces roches, les plus grosses tout en bas de la digue, toutes bien alignées, et des centaines de petites, presque trop petites pour finir l’amas. Assise sur mon tracteur, je réfléchis deux minutes à ce que signifient ces infâmes tas de roches dans ces champs, que plusieurs producteurs d’autres régions qualifieraient de minuscules. Tellement d’heures de labeur, de sacrifices, de doigts écrasés. Combien de gouttes de sueur de mère de famille, d’angoisse de père qui veut faire vivre les siens convenablement, de pleurs d’enfants, de prières prononcées, de lampions allumés, mais aussi d’entraide entre voisins et de fierté du travail bien fait à voir la grosseur de roches qu’ils ramassaient. Pour certains, le rêve d’une vie était de défricher et d’épierrer leur terre pour y élever leur famille et espérer que la passion se transmette de génération en génération.
Pour la plupart aujourd’hui, ces champs avec leurs tas de roches ne sont plus cultivés par les descendants de ces défricheurs de mon village, mais moi, je suis là, à les faucher, à les récolter et à les engraisser. Désormais, je vais le faire avec fierté, parce que oui, ces tas de roches m’ont réellement fait réfléchir. Je ne les aime pas plus qu’avant, mais j’aurai toujours un énorme respect pour ce qu’ils représentent. Des hommes, des femmes et des enfants qui, de leurs mains, ont réussi à faire des vallons du Buton des champs cultivables qui me permettent d’y faire vivre mes proches. À vous tous, je ne suis peut-être pas de votre famille, mais je vous dis un sincère merci!