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En moins de 15 ans, une petite révolution s’est opérée à la Ferme avicole Paul Richard et Fils. Cette entreprise de Rivière-Héva, en Abitibi, a revu en profondeur ses pratiques dans un souci manifeste de faire sa part pour la planète. Non seulement les gestes posés ont permis de réduire son empreinte environnementale, mais plusieurs initiatives sont aussi devenues des occasions d’affaires.
Auparavant, lorsque la relève Jean-Philippe Richard et son frère Alexandre se promenaient sur la terre familiale, ils étaient presque assurés d’apercevoir des monocultures de céréales, traitées systématiquement aux herbicides. Les temps ont bien changé. Ce printemps, la totalité des 1 500 acres sous culture sera désormais en régie biologique.
Au cours des dernières années, les deux frères ont apporté plusieurs changements à leur régie culturale. Davantage de rotations, des engrais verts, des cultures de couverture et des intercalaires. Pour diminuer la compaction, ils sèment désormais à la volée et pratiquent un travail réduit du sol, guidé par GPS, ce qui a pour effet de limiter la consommation d’intrants. « Avant, notre philosophie était de tirer le maximum de la terre; maintenant, on mise sur sa durabilité », résume Jean-Philippe Richard.
Au-delà des beaux principes, il y a une plus-value à cultiver bio, expose Alexandre Richard. « Depuis longtemps, on importait des intrants du sud de la province, mais nos camions repartaient vides. En cultivant des grains bio, on a pu développer de nouveaux marchés en raison de la forte demande dans ce créneau. »
Sécher le fumier grâce à la ventilation des bâtiments
La vision des éleveurs va cependant bien au-delà des méthodes culturales. Pour héberger ses 100 000 pondeuses, l’entreprise a construit des poulaillers faits de panneaux structuraux de mousse, qui procurent aux bâtiments une isolation très performante puisqu’il y a absence de pont thermique avec le bois. L’air de la ventilation provenant des cheminées du toit est par la suite capté par un séchoir à fumier. « On obtient un produit à 10 % d’humidité qu’on cube en vue de le commercialiser. Le fait de décurer tous les jours diminue de beaucoup les émissions d’ammoniac liées aux déjections des poules et nous offre une nouvelle source de revenus », commente Alexandre Richard.
Étant donné son éloignement, la Ferme avicole Paul Richard a aussi posé plusieurs gestes pour minimiser sa consommation de carburant. En plus de prioriser l’achat local pour ses intrants – un quart des grains qu’elle achète est cultivé dans la région –, l’entreprise a décidé de composter sur place les animaux en fin de cycle, leur épargnant un trajet de 8 à 16 heures vers l’abattoir, ce qui correspond aussi à une volonté d’assurer un plus grand bien-être animal.
« Beaucoup de nos décisions qui sont favorables à l’environnement ont eu des retombées économiques positives pour la ferme, comme la culture en régie bio, le séchage du fumier et le compostage. Notre éloignement nous oblige à devenir créatifs et autosuffisants », observe Jean-Philippe Richard.
Plein de projets en tête
Chose certaine, cette ferme familiale fondée en 1954 n’hésite pas à sortir des sentiers battus. L’entreprise a été l’une des premières au pays à implanter des habitacles enrichis dans ses poulaillers. Elle figure aussi parmi les rares à effectuer le nettoyage des cages à la glace sèche. « Cette technique est très efficace et nous permet d’économiser une quantité importante d’eau, en plus de limiter l’usure prématurée des équipements », ajoute-t-il.
Les dirigeants de la ferme songent déjà aux prochaines étapes de sa transition écologique. La construction de silos ouvrira la porte à l’achat en vrac et mettra fin à la production de déchets issus des poches de semences.
Dans ses objectifs à long terme, la ferme souhaiterait trouver un débouché pour les emballages de carton provenant de la mise en marché des œufs. « Les emballages pourraient servir de nourriture pour un élevage de vers et d’insectes, qui, par la suite, seraient incorporés à la ration de nos poules. On évalue aussi la possibilité de construire une usine d’emballage qui réutiliserait les déchets de papier et de cartons des épiceries, expose Jean-Philippe Richard. On est toujours à la recherche d’innovations pour être plus compétitifs. »
Enfin, l’ouverture prochaine d’un centre multiservices à Rivière-Héva pour transformer le gaz naturel pressurisé en carburant pave la voie à la conversion des quatre camions de l’entreprise. Au revoir, le diesel! Sans surprise, Jean-Philippe Richard s’est impliqué dans le projet qui, selon lui, sera un atout pour la région. « En tant qu’individus et entrepreneurs, on doit préparer l’avenir pour les prochaines générations en réduisant notre impact sur la planète », affirme l’éleveur.
Ce texte a été publié dans notre cahier L’UtiliTerre du mois de février 2022.