Vie rurale 19 septembre 2014

Le dernier service déserte Fugèreville

6dbb1f71cd7770d5abe192c0fbb95a985908853f7959a8d781b22ae4344bfc0a

Le dernier dépanneur à 15 kilomètres à la ronde, avec ses pompes à essence et son bureau de poste, vient de fermer.

Les célébrations du centenaire pourraient bien être chagrines, l’an prochain, à Fugèreville, 312 habitants, porte d’entrée de l’Est témiscamien et de cinq municipalités. Le dernier dépanneur à 15 kilomètres à la ronde, celui de Paul Gauthier avec ses pompes à essence et son bureau de poste, vient de fermer. Fugèreville, où régnait pourtant l’optimisme au début de la dernière décennie.

Inauguré en 2001, le grand projet des gens du coin, Abitémis, un abattoir multi-espèces traitant agneaux, lapins, émeus, cerfs, boeufs et porcs, avait reçu son accréditation « Approuvé Canada », une première québécoise. En plus de créer une quarantaine d’emplois locaux, Abitémis réglait le dilemme de la poule et de l’oeuf auquel se heurtent depuis trente ans les éleveurs d’Abitibi-Témiscamingue: pas de troupeaux sans abattoir, pas d’abattoir sans approvisionnements.

Malheureusement, Abitémis fermait ses portes, terrassée dès avril 2003 par le moratoire sur l’industrie porcine, alors que la rentabilité passait par l’abattage de 800 porcs par semaine. Un réseau de fermes porcines s’établissait partout en région pour l’alimenter. Cet abattoir, qui attendait depuis ce temps des jours meilleurs, a été rasé par le feu l’an dernier. Toutes les fermes porcines de Fugèreville, une maternité, une pouponnière et une porcherie de quarantaine ont été acculées à la faillite en 2007.

Aujourd’hui, outre six entreprises agricoles, reliquats des dizaines de fermes implantées dans ce village de onze cents habitants dans les années quarante, le dernier pourvoyeur d’emplois à Fugèreville reste « La Bottine à Grébiche » où six salariés produisent bardeaux et bois décoratifs. S’ajoutent évidemment du personnel pour la mairie, un bedeau pour l’église, deux ou trois enseignants pour les 26 écoliers du primaire. Puis, plus rien. Rien, sinon la forêt… en crise !

Reste aussi la fierté. « On va faire du mieux qu’on pourra l’an prochain pour bien recevoir ceux avec qui on est allés à l’école, tous ceux qui sont passés par ici », se promet le maire André Paquet.

Mais c’est Paquet le producteur agricole qui gardait le mot de la fin : « Dites-leur bien dans votre journal que ce qui nous manque au Témiscamingue…, c’est un abattoir! »