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J’habite une maison où il n’est pas nécessaire de se cacher derrière de grands draps puisqu’elle n’a comme voisins immédiats que d’immenses champs de foin, de maïs et de luzerne.
Une demeure où les fenêtres servent aux « p’tites » bouches et doigts crasseux à se poser pour regarder le ciel devenir rose, la pluie s’abattre devant eux, le soleil se lever lorsqu’il est encore beaucoup trop tôt. Des « p’tits » yeux voyant défiler le recueil complet de ce que la faune laurentienne a à offrir et à entendre.
Des châssis poussiéreux ouverts sur un monde rempli de bruits de clutch, de break et de vroum agricoles. Des sons brisant un silence qu’on apprivoise au fil du temps, des bruits qu’on entend arriver au loin et qu’on apprend à deviner en fermant les yeux.
Un toit où l’on voit défiler les saisons par les odeurs de foin coupé, de petite rosée du matin, de feux de camp les soirs d’été. Toutes ces journées à contempler les hectares changer de couleur et les arbres les accompagner.
Des portes par lesquelles les grands froids se glissent en même temps que les bûches dans le poêle et où, tout à coup, l’ouvrage, les vroum et la faune disparaissent peu à peu.
Mes enfants habitent dans une maison sans rideaux avec vue sur des centaines d’acres de terrain.
Le soir, ils contemplent la réserve étoilée devenant alors la tapisserie de leurs nuits. Ils dorment sur des terres habitées par leurs ancêtres depuis autant de générations que les doigts de leurs « p’tites » mains potelées peuvent en compter. Une maison où l’amour, plus grand que la panse, a pris toute la place. Un, deux, trois, quatre enfants! J’habite dans une maison où les fenêtres ne restent jamais propres bien longtemps.
Mais, dans le fin fond de notre rang, nul besoin de rideaux. Les nuits sans lampadaires sont remplies d’étoiles et de rêves.
Émilie Fontaine, Agrimom