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La veille de Noël, alors qu’il accompagnait sa maman au magasin général, le petit Nicolas aperçut dans la vitrine la jolie statuette d’une petite souris coiffée d’une tuque rouge.
– T’as vu, maman? C’est elle que j’ai vue passer près du sapin, hier soir. Tu sais, la souris…
– Oui, je sais : la souris qui avait une tuque. Allez, entre!
Nicolas poussa la porte du magasin. Une clochette annonça l’entrée des clients.
– Ho! Ho! Ho!, s’écria le marchand.
Nicolas, surpris, dévisagea le vieil homme, gros, joufflu, souriant, ses deux mains sur la poitrine, accrochées aux bretelles de son pantalon rouge, et sa longue barbe blanche… Il n’en croyait pas ses yeux.
– Mais vous êtes le père…
– Noël Tremblay, répondit le joyeux personnage.
Était-ce lui? Comment savoir? Un secret si bien gardé…
– Tu connais Grignote? demanda le vieil homme. Grignote, la petite souris que tu regardais dans la vitrine.
– C’est ma souris, répondit Nicolas. Je veux dire… c’est la souris qui est entrée chez moi hier soir.
– Je parie qu’elle portait une tuque rouge, reprit le commerçant.
– Oui, acquiesça l’enfant. Mais comment le savez-vous?
– Disons que j’en connais un bout sur les fées.
– Les fées? répéta Nicolas.
– Oui, les fées. Tu connais la fée des Étoiles? Eh bien, je te présente sa petite cousine : la fée Grignote.
– Mais c’est une souris…
– Oui… La fée des Étoiles l’a transformée en petite souris parce que la fée Grignote était trop gourmande. Elle se faufilait dans les maisons, les soirs de Noël, et croquait les biscuits que les enfants m’avaient… je veux dire : avaient laissé pour le père Noël au pied de leur lit, du sapin ou du foyer. Grignote redeviendra fée lorsqu’elle aura cessé de croquer les biscuits de Noël, pas avant, expliqua le vieil homme.
Impressionné, Nicolas ne dit plus rien. Mais le soir, après le souper, plutôt que de dormir, il garda l’œil ouvert après avoir déposé près du sapin un verre de lait, un biscuit et…
Quand il entendit trotter sur le parquet de bois, il sut que sa visiteuse était revenue. Il descendit du lit et, sans faire de bruit, se coucha sur le plancher puis s’approcha du salon, en rampant. Il l’aperçut! À peine plus grosse qu’un pouce, mignonne comme tout et sa tuque sur la tête.
Allait-elle manger le biscuit du père Noël et à jamais garder l’apparence d’une souris? Elle s’approcha du sapin, leva son museau, huma l’air et repéra le biscuit! Elle en sentait les arômes sucrés et s’en pourléchait les babines. Elle trottina encore un peu, s’approcha, et le prit entre ses pattes, prête à le croquer.
Mais alors, elle vit une enveloppe sur laquelle était écrit : « À Grignote, pour Noël. »
Intriguée, elle saisit l’enveloppe d’une main, en grignota le contour et l’ouvrit, tout en gardant le biscuit dans son autre main. Le cœur de Nicolas battait bien fort. Grignote lut la carte qu’on lui avait adressée : « Ma chère Grignote. Je te trouve très jolie. Tu es sûrement gentille. Alors, pour faire plaisir au père Noël, accepterais-tu de ne pas manger le biscuit que maman a préparé pour lui? Ce serait le plus beau cadeau que tu puisses me faire, car tu es une fée et j’adooore les fées! »
La petite souris, au bord des larmes, déposa le biscuit et chercha du regard, autour d’elle, celui qui avait signé la lettre : Nicolas.
Le garçon n’osait bouger. Il restait là, le cœur battant. Grignote l’aperçut et lui sourit. Tout doucement, alors, l’enfant vit apparaître autour de la petite souris des milliers d’étoiles. Puis, tout doucement aussi, le corps du petit rongeur se transforma, devint lumineux, de plus en plus clair, jusqu’à devenir presque transparent! Née de la lumière et de la couleur des étoiles apparut alors une minuscule fée aux grands yeux verts, à la fois libellule et papillon. Elle s’éleva un peu dans les airs, s’approcha de Nicolas et déposa sur sa joue un baiser humide et froid comme la neige.
– Merci, Nicolas, dit la jeune fée, d’une voix cristalline. Tu m’as délivrée de mon sort. Tu m’as aussi guérie de mon vilain défaut.
Eh bien, à compter de ce jour, jamais la fée Grignote n’a croqué les biscuits offerts au père Noël. Si, parfois, quelques bouchées disparaissent encore, c’est le fait de vraies petites souris… ou de papas gourmands!
Texte / Serge Labrosse
Illustrations / Judith Boivin-Robert