Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
La logistique complexe du dépeuplement des oiseaux pendant la grève des employés de l’usine d’abattage et de transformation de volaille d’Exceldor à Saint-Anselme, du 23 mai au 26 juin 2022, a été révélée devant la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec, dans le cadre des audiences sur le renouvellement de la convention de mise en marché du poulet.
Alors qu’elle était invitée à témoigner le 2 novembre, Silke Schantz, directrice des approvisionnements chez Exceldor, a expliqué les décisions difficiles qui ont dû être prises par la coopérative en constatant que les oiseaux s’accumulaient à la porte de l’abattoir. Au départ, a-t-elle précisé, « le plan de relève » ne prévoyait pas l’euthanasie des oiseaux, mais leur redirection vers d’autres abattoirs avec qui des ententes avaient été conclues.
Or, en raison de différentes contraintes quant à l’équipement de transport notamment, la livraison n’allait pas assez vite. « Déjà, le premier jour, on avait 45 000 oiseaux en attente d’abattage, et on savait qu’il y en aurait le double le lendemain. À un moment, il n’y avait plus d’autres solutions [que l’euthanasie] », a-t-elle déploré.
L’équipe de 25 personnes formée pour procéder au dépeuplement des oiseaux s’est aussi frappée à de nombreux défis, comme des poulaillers menaçant de s’effondrer sous le poids d’oiseaux trop lourds ou d’autres bâtiments trop vieux pour être scellés afin de mener des opérations de CO2. La distance entre les sites compliquait également la logistique de déplacement de l’équipe, alors que les canicules imposaient une gestion rapide des cadavres d’oiseaux.
Après deux semaines de grève lors desquelles environ 60 % des oiseaux arrivaient à être redirigés vers d’autres abattoirs, Mme Schantz dit avoir reçu pendant une nuit plusieurs appels d’éleveurs désespérés qui la suppliaient d’envoyer l’équipe d’euthanasie sur leur site, puisqu’ils voyaient leurs oiseaux mourir dans des poulaillers bondés. « À ce moment, les choses ont changé. On a formé une deuxième équipe de dépeuplement pour être plus efficaces. Ça n’enlèvera jamais ce que ces éleveurs ont vécu, et comment ils l’ont vécu, mais il y avait une crise. Il n’y avait pas beaucoup de monde pour la gérer, puis on a pris une décision : celle d’euthanasier le plus d’oiseaux possible en se concentrant sur les plus gros sites. »
L’enjeu de la concentration
Bien que leurs membres aient été dédommagés par Exceldor pour la perte de leurs oiseaux, les Éleveurs de volailles du Québec (EVQ) soutiennent avoir eu à gérer une baisse de leur production en lien avec cet événement, qui n’aurait pas eu la même ampleur, selon eux, si l’abattage et la transformation n’étaient pas concentrés à 96 % entre les mains de deux grands joueurs, soit Olymel et Exceldor.
Dans leur projet de refonte de la Convention, les EVQ suggèrent donc de réserver 30 % de la croissance pour créer ou sécuriser d’autres transformateurs. Une proportion que le Conseil québécois de transformation de la volaille estime trop élevée. Selon cette dernière, la grève ne devrait d’ailleurs pas justifier la construction de nouvelles usines, puisqu’il s’agit d’un événement isolé survenu dans un contexte généralisé de pénurie de main-d’œuvre.