Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
La production hors champ navigue sous des vents favorables actuellement au Québec. Aux cultures en serre s’ajoutent désormais les productions en endroits clos où les éléments comme l’humidité et l’éclairage sont entièrement contrôlés.
« Les agriculteurs se lancent beaucoup là-dedans pour produire à l’année », observe Stéphane Pilon, vice-président chez J. L. Priest, un entrepreneur général et maître électricien qui travaille sur les rives sud et nord de Montréal. « Beaucoup de producteurs nous appellent. On fait de plus en plus de serres et de grands projets », soutient l’entrepreneur.
L’intention du gouvernement Legault de doubler la production en serre en cinq ans, annoncée en novembre de l’année dernière, ne serait pas étrangère à la croissance des affaires de Stéphane Pilon en milieu agricole. Québec prévoit dépenser une centaine de millions de dollars, notamment pour l’agrandissement de serres et le remboursement de 40 % des coûts mensuels d’électricité assumés par les producteurs, une facture qui grimpe à une hauteur stratosphérique en période hivernale.
« La demande en électricité, pour une serre, c’est pour la période hivernale », rappelle l’électricien dont une partie des contrats porte sur l’installation de systèmes d’éclairage au sodium dans les serres. « C’est seulement l’hiver que ces systèmes-là fonctionnent. Puis l’éclairage, c’est la plus grosse partie pour les projets de serre. Ça remplace presque le chauffage parce qu’il y a beaucoup de chaleur qui se dégage de ces lumières-là », ajoute Stéphane Pilon.
Du sodium à la DEL
Martin Quintal possède l’entreprise Futur Vert, de Montréal, qui fait aussi dans l’installation de systèmes d’éclairage pour la culture intérieure de végétaux. Dans son cas, oubliez les grandes cultures qui s’étendent à perte de vue et l’éclairage au sodium. Futur Vert se spécialise dans l’éclairage de fermes urbaines à l’aide de diodes électroluminescentes (DEL).
« On installe un système d’éclairage à la DEL qui ne va pas trop chauffer, mais qui va produire énormément de luminosité », explique l’entrepreneur. C’est d’ailleurs son entreprise qui s’est occupée du système d’éclairage des Fermes Urbaines Ôplant, qui fait pousser des herbes en plateaux superposées dans un entrepôt situé à proximité du stade olympique de Montréal. « La Ferme Urbaine Ôplant, c’est sur six étages qu’elle fait pousser sa laitue. Donc la superficie est réduite de six fois. Ça ressemble à un rack qu’on utilise dans les entrepôts. Sur une hauteur de huit pieds, je vais avoir six étages de culture. Chacun des étages est séparé de l’autre d’environ 14 pouces », illustre Martin Quintal, dont le système d’éclairage se trouve entre chaque étage.
Malgré le potentiel que présente l’éclairage à la DEL, les producteurs restent à convaincre, admet Martin Quintal. « Les serres représentent notre marché à gagner. Les gens sont très conservateurs dans le domaine de l’horticulture; ils aiment beaucoup l’éclairage au sodium et connaissent peu les avantages de la DEL », dit-il. Le propriétaire de Futur Vert compte sur la nouvelle génération de producteurs, parfois plus audacieuse, selon lui, pour gagner le secteur de l’alimentation qu’il considère comme immense.
Marie-Pier Lépine possède Feuilles et Lépine, à Saint-Augustin-de-Desmaures, près de Québec. La productrice fait pousser une variété impressionnante de légumes feuilles et d’herbes, à la verticale, sur une surface de 1 000 pieds carrés éclairée à la DEL avec les équipements de Martin Quintal. « Les DEL font le travail amplement, surtout que moi, je fais de la verdure, je ne fais pas mûrir des fruits », explique l’horticultrice qui arrive à produire jusqu’à 40 kilos de plantes par semaine dans ses petites installations. Le choix de Marie-Pier Lépine repose aussi sur une réalité impitoyable : éclairer au sodium coûte cher, deux fois plus que la DEL, estime Martin Quintal.
Si la production horticole intérieure se développe, un peu de sable demeure dans l’engrenage, soutient Stéphane Pilon. Selon lui, les installations d’Hydro-Québec limitent le développement d’entreprises énergivores en milieu rural. « Les stations d’Hydro-Québec postées dans les régions rurales sont souvent inadéquates, explique l’électricien. Elles datent d’une époque où il n’y avait pas autant d’automatisation, autant de technologies dans les fermes. »
Une des solutions à la limite de capacité du réseau électrique passe par l’utilisation d’équipements moins gourmands, croit pour sa part Martin Quintal. Là encore, on trouve un cheveu dans la soupe. Les subventions accordées par Hydro-Québec aux grands consommateurs d’électricité, et le remboursement partiel des coûts d’énergie par le gouvernement du Québec, freinent la transition vers des technologies à l’appétit plus modeste, regrette le propriétaire de Futur Vert. « Le problème qu’on a, c’est Hydro-Québec puis le gouvernement Legault. Ils ont donné des taux hyper préférentiels aux producteurs en serre sans mettre aucune restriction sur l’efficacité de ce qu’ils achètent. On pourrait mettre la pire fournaise électrique qu’on trouve sur le marché, et ce serait correct », déplore l’homme d’affaires.
Conquérir les cœurs avec un luminaire Percer le marché de l’éclairage des serres avec ses luminaires à la DEL représente le prochain défi de Futur Vert. Son propriétaire, Martin Quintal, croit avoir dessiné le système qui finira de convaincre les horticulteurs les plus récalcitrants. L’objet? Un luminaire à la DEL d’une puissance de 850 watts qui permettrait, selon son concepteur, de réduire considérablement la taille du système d’éclairage des serres, tout en offrant une luminosité équivalente à un système au sodium d’une puissance de 1 500 watts. « Ce qu’on vient vendre aux clients, soutient Martin Quintal, c’est un système d’éclairage qui consomme beaucoup moins d’énergie que les systèmes traditionnels et qui génère beaucoup moins de chaleur que les luminaires au sodium. » Les systèmes à la DEL, ajoute le propriétaire de Futur Vert, marquent aussi la fin du remplacement des ampoules, comme il faut le faire aux deux ans environ avec les lumières au sodium. Même si les diodes électroluminescentes ne possèdent pas une longévité infinie, reconnaît l’entrepreneur, avec une durée de vie estimée d’environ 20 ans, « on a le temps de voir venir », dit-il, un sourire dans la voix. |
Claude Fortin, collaboration spéciale