Actualités 8 juillet 2022

Un producteur met au point un bouton d’arrêt d’urgence

Le producteur laitier Michel Coursol n’a pas attendu qu’un autre accident avec l’arbre de transmission se produise pour inventer un bouton d’arrêt d’urgence reliant son tracteur à une machine agricole.

Cette idée a commencé à mijoter après l’accident vécu par son père en 2009. « Il déchargeait le tracteur, mais le convoyeur n’avançait pas. Alors il a mis son pied sur le pôle et son genou est entré en contact avec le PTO [power take-off, également connu sous le nom de prise de force], puis sa ceinture de cuir s’est enroulée et l’a serré. En voulant se dégager, c’est son bras qui a été arraché, raconte l’agriculteur de Mirabel, dans les Laurentides. Je peux vous dire que ce n’est pas une situation qu’on souhaite revivre. Quand je suis arrivé, c’était une scène d’horreur. »

Après avoir acquis un nouveau tracteur en 2012, il a décidé de mettre au point un bouton d’arrêt d’urgence accessible à une personne qui serait prise dans l’arbre de transmission. « Un tel bouton existe déjà sur les ailes de tracteurs de certains modèles, explique-t-il, mais il est situé trop loin pour être atteignable pour une personne seule qui serait prise dans l’engrenage. »

Il a ensuite fait breveter son idée dans l’espoir d’arriver un jour à la commercialiser chez des fabricants de machinerie agricole. « Si on fait un parallèle avec l’automobile, il y a eu beaucoup de choses qui ont été améliorées à travers les années pour la sécurité. Mais du côté agricole, concernant le PTO particulièrement, rien », déplore le producteur.

Des protecteurs à maintenir en bon état

Des vendeurs de machinerie agricole questionnés par La Terre jugent de leur côté que les dispositifs de protection actuels, qui respectent les plus hautes normes de protection émises par l’American Society of Agricultural and Biological Engineers, sont efficaces s’ils sont correctement utilisés et maintenus en bon état. « Parfois, des producteurs décident de les enlever pour gagner du temps », signale Bruno Bouchard, directeur des ventes chez Groupe JLD-Laguë, à Saint-Hyacinthe. « D’autres tardent plutôt à réparer l’équipement lorsqu’il se brise, ajoute Martin Archambault, directeur des ventes chez Équipements Claude Joyal à Napierville. Certains se disent : “Ah, ce n’est pas grave, on le fera plus tard”, ou bien ils ne remplacent pas les pièces parce qu’ils craignent que ça coûte trop cher. Mais quand il est question de vie humaine, il ne faut pas s’arrêter à ça. Surtout que ces pièces existent et qu’elles sont toutes disponibles. »

La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail abonde dans le même sens, signalant que les deux derniers accidents mortels impliquant l’arbre de transmission, survenus en 2019, se sont produits alors que l’équipement de protection était endommagé. Elle recommande néanmoins de toujours maintenir une distance sécuritaire avec cette pièce d’équipement, car même avec des protecteurs en bon état, un lacet ou un bout de vêtement peut entrer sous les protecteurs dans les zones de chevauchement. 


Le pari risqué des modifications faites maison

Selon la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail (CNESST), un employeur agricole qui modifie une machine et permet qu’elle soit utilisée sur les lieux de travail est responsable de la sécurité de cet équipement pour les utilisateurs et les personnes travaillant à proximité. Elle recommande donc de faire vérifier la modification par un ingénieur avant de permettre aux travailleurs de l’utiliser. « Au Québec, les ouvrages ou équipements industriels [qui incluent les équipements et machines agricoles] impliquant la sécurité du public et des travailleurs font partie du champ de la pratique de l’ingénieur. Ainsi, en l’absence d’une appréciation des risques réalisée par un ingénieur, un vice de sécurité pourrait passer inaperçu, tel un risque de démarrage intempestif, et provoquer un accident grave, voire mortel », prévient la CNESST.