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MIRABEL – Lorsqu’il a appris que le ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD) voulait aménager un grand carrefour giratoire, qui aurait empiété sur sa terre, à Mirabel, Éric Couvrette a décidé de ne pas se laisser faire.
C’est qu’en plus de lui retirer de l’espace de culture, le projet d’infrastructure proposé par Québec aurait obligé le producteur laitier et maraîcher à refaire son plan de drainage et à déplacer son kiosque de légumes.
Soutenu par sa fédération régionale de l’Union des producteurs agricoles, il a plaidé sa cause devant la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ), qui lui a finalement donné raison, le 5 novembre.
« Il aurait fallu qu’ils m’exproprient. Ça n’avait pas d’allure. Il n’était pas question que je scrappe mon champ », exprime l’agriculteur. Dans sa décision, la CPTAQ a fait valoir qu’il existe « des solutions alternatives moins dommageables » pour le milieu agricole. « C’est juste une question de gros bon sens et de logique », croit Éric Couvrette. Considérant son historique familial, il n’était pas question pour lui de perdre ce combat.
Le souvenir douloureux de l’expropriation
Au tournant des années 70, une bonne partie de ses terres, qui appartenaient alors à ses parents, ont été expropriées pour la construction de l’aéroport international de Mirabel. Ces superficies, qu’il a finalement reprises des années plus tard, ont une grande valeur sentimentale pour lui. Et l’idée de s’en faire enlever, ne serait-ce qu’une parcelle, ravive chez l’agriculteur un douloureux souvenir familial.
« J’étais un enfant quand c’est arrivé, mais j’ai des souvenirs de mon père et de ma mère qui ont vraiment été blessés. Ils sont toujours restés un peu nerveux, après ça », se remémore-t-il, en faisant visiter sa ferme à La Terre. « Je me souviens du moment où on a déménagé les vaches. Je vais toujours m’en rappeler. »
Est-ce que cet événement marquant a façonné l’esprit de combattant qu’il a aujourd’hui? « C’est une bonne question. Probablement. »
Lorsqu’Éric a repris les terres ancestrales de la famille, en 1989, son père, Clément, l’a aidé à y bâtir une grange et une cabane à sucre. Puis, en 1994, les deux hommes ont aussi construit une étable à vaches, pour qu’Éric, qui avait acquis du quota, puisse y démarrer sa ferme laitière. Ils étaient loin de s’imaginer, toutefois, que le malheur frapperait de nouveau 30 ans plus tard.
Un incendie
En juin dernier, un violent incendie a complètement détruit l’étable qu’Éric a construite avec son père. Seulement trois des 83 vaches que logeait le bâtiment ont survécu.
Mais le producteur, encore une fois, a choisi de ne pas se laisser abattre. Non loin du site où le brasier faisait rage quelques mois plus tôt, une autre étable est déjà en construction. Son père, Clément, qui habite tout près, est sur place pour constater l’avancement des travaux. Il observe la structure avec un brin d’espoir.
« Il fallait reconstruire. Pas le choix! » lance, avec un sourire, l’homme de 89 ans.
Une artère dangereuse
Mirabel fait pression depuis longtemps auprès du gouvernement provincial pour qu’il réaménage l’intersection du chemin Saint-Simon et du rang Saint-Rémi, où surviennent de nombreux accidents chaque année. Or, le projet de carrefour giratoire qu’a proposé le ministère des Transports et de la Mobilité durable du Québec en guise de solution a finalement été refusé par la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ), le 5 novembre, après près de deux ans de procédures. Jugeant qu’il y a urgence d’agir, le maire, Patrick Charbonneau, déplore les longs délais avant de régler le problème.
« Ç’a été vraiment long avant d’avoir la décision, et là, on se retrouve qu’on repousse encore la résolution du problème. Plus on prend de temps, plus il y a des chances qu’il y ait encore un autre accident qui devienne mortel à cet endroit », dénonce-t-il. Depuis le début de l’année, plus de 17 collisions ont été recensées à cette intersection en forme de « T », rappelle le maire. « Nous, on n’a pas les compétences pour dire quoi faire au ministère et à la CPTAQ. Peu importe la solution retenue, ce qu’on dit c’est qu’à cet endroit-là, ça frappe, qu’il y a des gens qui se font tuer et qu’il est temps qu’il se passe quelque chose », martèle-t-il.
Dans sa décision, la CPTAQ suggère aux « autorités concernées » la priorisation d’« installations plus modestes pouvant être implantées à court terme » à cet endroit pour améliorer la sécurité. Le ministère des Transports dit justement analyser des « pistes de solutions temporaires afin de sécuriser cette intersection », en attendant de trouver une solution de rechange à plus long terme.