Société 19 juillet 2024

La réalité des grossesses à la ferme

Claudine Vachon a appris à ses dépens combien il est risqué de travailler enceinte dans une ferme. La copropriétaire d’une ferme laitière de Saint-Séverin, dans Chaudière-Appalaches, a accouché prématurément de son premier enfant à 31 semaines. Bien que la productrice, qui est maintenant enceinte de 16 semaines, veille à ne pas reproduire le même scénario, elle réalise qu’elle n’est pas à l’abri des accidents. « Hier, je me suis fait ramasser par une vache. Elle s’est tassée sur moi et j’ai revolé dans la séparation », décrit-elle.

Selon un sondage effectué par le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) auprès de 900 familles agricoles en 2020, 70 % des femmes considèrent que les tâches de la femme enceinte à la ferme ne représentent aucun danger, alors que 23 % considèrent leur travail comme dangereux.

Lorsqu’elle était enceinte d’Ethan, Amélie Brien n’a pas déchargé les foins durant l’été de son premier trimestre afin de ne pas soulever de charges lourdes, mais elle a continué à faire les travaux en tracteur. Photo : Gracieuseté d’Amélie Brien

À Racine, en Estrie, la copropriétaire d’une ferme laitière de 100 kg de quota, Amélie Brien, avait arrêté de faire la traite en raison de douleurs dans le ventre alors qu’elle était enceinte de son premier bébé en 2023. Si elle n’a pas déchargé les foins durant cet été-là afin de ne pas soulever de charges lourdes, elle a toutefois continué à faire les travaux en tracteur.

On regarde ce qui est le moins pire pour nous, mentionne la productrice, mais c’est sûr que si j’avais perdu mon bébé et que ça avait peut-être été à cause de ça, la prochaine fois, ç’aurait été différent.

Amélie Brien, copropriétaire d’une ferme laitière

Des agricultrices prudentes

Avec 20 ans de pratique auprès d’une clientèle agricole, la sage-femme Geneviève Guilbault admet que le risque zéro n’existe pas dans le milieu agricole. Toutefois, elle dit ne pas avoir vu beaucoup d’agricultrices vivre avec des complications obstétricales reliées à leur travail dans sa carrière.

Je trouve que les agricultrices, de façon générale, sont très prudentes durant la grossesse et assez entourées. Elles arrivent à gérer avec intelligence leurs risques.

Geneviève Guilbault, sage-femme
Patricia Koolen a délégué la manipulation des hormones et des pesticides. Photo : Gracieuseté de Patricia Koolen

Patricia Koolen a acheté seule une ferme laitière non apparentée, il y a six ans, à Saint-Stanislas-de-Kostka, en Montérégie. Cette mère de deux enfants, qui est présentement enceinte de 28 semaines, n’a pas encore réduit ses tâches à la ferme. Si elle continue de se promener en tracteur, de traire et de déplacer les vaches, la productrice a délégué la manipulation des hormones et des pesticides. « L’insecticide que tu mets pour les mites pour les vaches, je n’y touche pas et je ne fais pas la traite pendant les deux à trois jours [suivant son application sur le dos des animaux] parce que juste par le contact avec la peau, tu es capable d’absorber le produit, alors ce sont des choses comme ça auxquelles je fais attention », indique-t-elle.


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